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Géorgie: le pouvoir promet le vote mardi de la loi décriée sur "l'influence étrangère"

Le Premier ministre géorgien a promis que le Parlement voterait mardi le projet de loi sur "l'influence étrangère", malgré des manifestations de masse dénonçant un texte détournant le pays de l'Europe pour l'entraîner vers Moscou.

"Le Parlement agira demain suivant la volonté de la majorité de la population et adoptera la loi en troisième lecture", a déclaré Irakli Kobakhidzé, lors d'un discours télévisé.

"Face à des compromis injustifié et une perte de souveraineté, la Géorgie partagera le sort de l'Ukraine. Personne en dehors de la Géorgie ne peut nous empêcher de protecter nos intérêts nationaux", a-t-il insisté, en agitant la crainte d'une guerre comme celle entre Kiev et Moscou.

Il a aussi assuré que le passage de cette loi ouvrirait la porte à d'autres textes sur une "immigration incontrôlée" ou les droits des personnes LGBT+, dans un pays toujours conservateur.

Un millier de manifestants, jeunes pour la plupart, sont restés jusque tard dans la nuit lundi soir devant le parlement de la Géorgie contre ce texte, à l'issue d'une journée de manifestation pacifique, avec des familles, et peu de forces de l'ordre visibles.

Beaucoup de manifestants se sont ensuite dispersés, tout en prévoyant une nouvelle manifestation mardi vers 10H00 GMT. "Ils vont adopter cette loi et nous devons manifester notre protestation", a expliqué un médecin de 57 ans, Levan Abalishvili.

Le projet de loi est vivement critiqué par les États-Unis et l'Union européenne à laquelle la Géorgie, ancienne république soviétique, est candidate à l'adhésion.

Washington a réaffirmé son opposition au projet de loi. "Nous exhortons le gouvernement géorgien à poursuivre sur la voie de l'intégration à l'Union européenne" et à agir d'une façon qui soit "compatible" avec celle-ci, a affirmé à la presse le porte-parole du département d'Etat Vedant Patel, estimant que la loi était "incompatible avec ces objectifs déclarés".

Ce projet a suscité des rassemblements massifs d'opposition, dont certains ont été réprimés. Les contestataires, qui manifestent depuis début avril, l'ont surnommé la "loi russe", car il imite une législation utilisée par le Kremlin pour réprimer les voix dissidentes.

"Cette loi veut dire qu'on ne rejoindra pas l'Europe", s'est inquiétée lundi auprès de l'AFP Mariam Kalandadzé, une manifestante de 22 ans, or "c'est quelque chose que j'ai toujours voulu".

Des dizaines de milliers de personnes avaient manifesté dimanche, certains restant toute la nuit pour empêcher les députés d'entrer dans le parlement.

- Craintes -

A l'aube, l'AFP avait vu des policiers interpeller violemment un groupe de manifestants.

Les rassemblements se déroulent dans un climat de tensions, les autorités ayant prévenu qu'elles arrêteraient les personnes bloquant le parlement.

Depuis le début, les moins de 30 ans constituent le fer de lance du mouvement. Mais beaucoup assurent que leurs aînés sont eux aussi convaincus.

"On a toujours su qu'on faisait partie de l'Europe. Toutes les générations le savent", a déclaré Artchil Svanidzé, un manifestant de 26 ans fier de dire que son père était resté manifester une bonne partie de la nuit.

Salomé Lobjanidzé, 18 ans, s'est elle dite "ravagée" par la loi. "Si elle est votée, beaucoup de gens qui sont ici aujourd'hui partiront" du pays, a-t-elle prédit.

L'Union européenne, qui a accordé en décembre 2023 à la Géorgie le statut de candidat officiel, a salué "l'engagement impressionnant" des Géorgiens en faveur de l'intégration européenne et exhorté Tbilissi à enquêter sur les actes de violence à l'égard des manifestants qui ont été signalés.

"Nous condamnons fermement les actes d'intimidation, les menaces et les agressions physiques", a déclaré lundi Peter Stano, un porte-parole du service diplomatique de l'UE.

- "Transparence" ou répression -

En cas d'adoption, la loi imposera à toute ONG ou organisation médiatique recevant plus de 20% de son financement de l'étranger de s'enregistrer en tant qu'"organisation poursuivant les intérêts d'une puissance étrangère".

Le gouvernement assure que cette mesure vise à obliger les organisations à faire preuve de davantage de "transparence" sur leurs financements.

L'élu Nikoloz Samkharadzé, du parti au pouvoir Rêve géorgien, a affirmé que le projet n'avait "rien à voir" avec la loi russe décriée, réaffirmant par ailleurs son attachement à l'adhésion à l'UE.

La loi a déjà été approuvée au cours de deux lectures, et nécessite un troisième vote.

La présidente Salomé Zourabichvili, une pro-européenne en conflit ouvert avec le gouvernement, devrait y opposer son veto, mais le Rêve géorgien assure avoir assez de voix pour passer outre.

Le parti au pouvoir avait déjà tenté de faire passer cette loi en 2023, avant d'y renoncer en raison, déjà, de rassemblements d'opposition massifs.

Bidzina Ivanichvili, homme d'affaires richissime perçu comme le dirigeant de l'ombre de la Géorgie, voit les ONG comme un ennemi de l'intérieur au service de puissances étrangères.

Cet homme, Premier ministre de 2012 à 2013 et aujourd'hui président honoraire du Rêve géorgien, est soupçonné d'affinités avec la Russie, pays où il a fait fortune.

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