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Athlète paralympique, Pauline Déroulède partage son histoire marquée par un accident tragique en 2019 dans son livre intitulé "(Im)possible". Après la perte de sa jambe, elle s'est promis de se relever et de réaliser l'impossible en visant les Jeux paralympiques.
RTL info : Pauline Déroulède, vous êtes athlète paralympique et avez participé aux Jeux olumpiques de Paris. Vous êtes arrivée dans ce studio en marchant, c’était important pour vous ?
Pauline Déroulède : Effectivement, c’était important pour moi de pouvoir me tenir debout à nouveau après l’accident que j’ai eu. J’ai tout fait pour me remettre sur pied le plus rapidement possible, car j’ai la chance de pouvoir encore marcher et c’est une fierté à chaque fois.
Vous jouez au tennis en fauteuil roulant. Est-ce compliqué de vous installer dans ce fauteuil alors que vous marché ?
Au début, c’était difficile. Je jouais debout avant l’accident, et accepter de jouer en fauteuil a été un véritable blocage psychologique. J’avais des préjugés, je l’assume. Je voyais le fauteuil uniquement comme un obstacle physique. Finalement, j’ai dû apprendre à le maîtriser. Et même si je marche dans la vie quotidienne, je n’utilise ce fauteuil qu’au tennis désormais.
Vous venez de publier un livre intitulé "(Im)possible". Vous y racontez votre histoire et ce jour du 27 octobre 2019. Que s’est-il passé ce jour-là ?
C’était un jour ordinaire, dans une vie dans laquelle j’étais très épanouie. Et malheureusement je me retrouve fauchée sur un trottoir par un monsieur très âgé qui a perdu le contrôle de sa voiture, en appuyant sur l’accélérateur au lieu du frein. Ce jour là on est 3 à se faire faucher. Et sur le choc, je perds immédiatement ma jambe gauche. Je m’en rends compte tout de suite. Et là je bascule dans un monde que je n’imaginais pas. On pense souvent que ça n’arrive qu’aux autres, ce jour là ça m’est arrivé. Je comprends tout de suite également qu’il y aura une Pauline d’avant et une Pauline d’après. Et qu’il va falloir se battre pour survivre, et revivre dans un second temps.
Vous avez dit à vos proches depuis votre lit d'hôpital : "Je vais faire les Jeux paralympiques de Paris". D’où est venue cette idée ?
Je comprends à ce moment là qu’il va falloir un objectif très fort et ambitieux. Je me fais cette promesse à moi-même dans un premier temps. Et aussi pour rassurer mes proches qui sont très inquiets et qui se demandent ce que je vais devenir. Et quelque part j’identifie sur le champ que c’est le sport et au plus haut niveau qui va me permettre de survivre et de rebondir mais voila il n’y avait aucune garantie d’y arriver mais j’avais besoin de m’accrocher à cet objectif tout de suite.
Le titre de votre livre "(Im)possible" marque cette transition du drame au destin ?
C’est exactement ça, rendre l’impossible possible. Depuis cet accident, j’essaie de transformer ce drame en quelque chose d’autre. J’ai dû faire des choses qui étaient sur le papier impossibles et je les ai rendues possible en tout cas c’est ce que je m’efforce de faire partout ou je passe maintenant. J’ai du réapprendre à marcher avec une prothèse, une jambe de haute technologie. Et c’est vrai que j’ai dû refaire tout presque comme une enfant. Et l’idée, c’est de passer le message que rien n’est impossible, en tout cas que l’impossible peut devenir possible, ça dépend de nous, de l’entourage, des armes qu’on prend, moi ça été le sport mais pour d’autres ça peut être autre chose.
Vous parlez dans votre livre de la rééducation, de la colère qui l’accompagne, et d’un médecin militaire qui vous a dit : "C’est clair il te manque quelque chose, on ne reviendra pas en arrière, c’est comme ça tu n’as pas le choix. Tu n’as même pas le choix de penser que tu as le choix". Ca été un déclic pour vous ?
Ce militaire qui rentre dans ma chambre m’a vraiment secoué littéralement, mais il m’a parlé avec beaucoup de franchise. C’était violent et brutal parce que moi je ne suis qu’une civile qui vient de perdre sa jambe, mais ça m’a servi pour la suite car il voulait me dire que ce qui m’arrivait ce n’était qu’un détail et qu’effectivement tous les projets que j’avais étaient juste reportés. Donc ça donne tout de suite une perspective vers l’avenir, que je n’arrivais pas à voir seule et c’est grâce à lui que j’ai pu commencer à l’imaginer et à me projeter dans cette rééducation que j’ai finalement bien vécu grâce à des militaires autour de moi, qui étaient eux blessés en opération extérieur et qui m’ont énormément inspiré. J’ai compris très rapidement qu’il y avait 10x pire que moi et que j’allais avoir la chance de pouvoir remarcher, donc je n'avais pas à me plaindre.
Vous avez traversé cette épreuve avec Typhaine, votre compagne. Elle vous a fait une déclaration d’amour peu après l’accident. Comment l’avez-vous vécue ?
Sur le moment, j’étais envahie par le désespoir. Mais ces mots, "Je vais t’aimer toute ma vie", ont été la plus belle déclaration d’amour que l’on puisse recevoir. Elle a été à mes côtés tout au long de cette épreuve. C’est une chance inouïe d’avoir quelqu’un qui nous aime à ce point.
Vous êtes devenue maman en 2022. C’est la plus belle partie de l’histoire ?
C’est la vie qui reprend le dessus. Notre fille, Ava, connaît déjà l’histoire de ses deux mamans. Elle est déjà ouverte sur le monde et c’est vrai que c’est un bonheur absolu. Et ce qui est beau, c’est que même après des drames, la vie reprend le dessus encore et encore, il faut juste lui faire confiance.
Vous vous battez aussi pour la sécurité routière. C’est devenu une part intégrante de votre vie ?
Oui, il y a le combat sur le terrain de tennis et puis, il y a le combat en dehors, plus sociétal, politique. Puisque quand j'ai connu les circonstances de mon accident, je me suis dit que ce drame aurait pu être évité si une seule personne avait arrêté de conduire. Le monsieur qui m'a fauché était inapte à la conduite, il était responsable. Je me bats pour qu'en France et ailleurs, on puisse mettre en place des visites médicales pour tous les conducteurs, avec une fréquence plus régulière à partir d'un certain âge. Et même si c'est un combat difficile, il faut trouver des solutions alternatives de mobilité. Qu'est-ce qu'on fera des gens qui ne pourraient plus conduire ? J'ai une confiance inébranlable dans le fait qu'on y arrivera.
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