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La plateforme de streaming Disney+ à la conquête de nouveaux marchés sort mercredi "Iwájú" ou "Futur" en Yoruba, une série animée de science-fiction se déroulant au Nigeria dans un Lagos futuriste.
Un projet inédit, qu'une poignée de privilégiés ont découvert en avant-première mardi soir dans un cinéma de Lagos, la capitale économique du pays.
"Il s'agit de la première collaboration de Disney avec un autre studio en 100 ans d'histoire de dessins animés", a déclaré à l'AFP Christine Service, directrice générale de Walt Disney Afrique dans l'enceinte du Imax Lekki à Lagos.
Cette série d'animation en six épisodes a été imaginée par la société panafricaine de divertissement Kugali fondée en 2017 par les Nigérians Olufikayo Ziki Adeola et Toluwalakin Olowofoyeku et l'Ougandais Hamid Ibrahim.
Les trois associés, vêtus de costumes sombres, ont fait une arrivée remarquée sur le tapis rouge avant la projection au côté de la ministre de la Culture nigériane, Hannatu Musa Musawa, et de la superstar de Nollywood, Uti Nwachukwu.
- Une histoire d'enlèvement -
"Tous ceux à qui nous avons parlé et qui ont regardé la série ont été stupéfaits", a indiqué Hamid Ibrahim, co-fondateur de Kugali et chef décorateur pour Iwájú.
La série raconte l'histoire d'une fillette prénommée Tola, 10 ans, issue d'une famille aisée de Lagos, et de son meilleur ami, Kole, 13 ans, employé de maison qui vit dans un quartier pauvre. Leur amitié est mise à rude épreuve par les activités de Bode, un expert en nouvelles technologies qui dirige un groupe criminel expert en enlèvements.
L'équipe d'"Iwájú" s'est en partie inspirée d'une histoire vraie pour créer la série. Celle de l'amie d'Olufikayo Ziki Adeola, qui a échappé à une tentative d'enlèvement à Lagos. Il y a 10 ans, la jeune femme a sauté dans la lagune depuis un pont de la mégalopole nigériane pour échapper à ses ravisseurs.
Cette mésaventure fait écho à un problème sécuritaire majeur au Nigeria: les enlèvements contre rançon sont devenus monnaie courante dans le pays le plus peuplé du continent avec quelque 220 millions d'habitants.
"Disney avait toutes les clés et l'expérience pour savoir comment développer l'histoire, pour que les enfants puissent la voir sans être traumatisés", confie Toluwalakin Olowofoyeku.
"Iwájú aborde plusieurs autres thèmes intéressants tels que l'amour familial, la curiosité, les inégalités et la remise en question du statu quo", précise Olufikayo Ziki Adeola.
- L'identité de Lagos -
Les six épisodes de 20 minutes regorgent d'éléments du paysage actuel de Lagos, des grands marchés aux embouteillages monstres dans les deux zones principales de la ville, Mainland et Lagos Island, sans oublier les vendeurs de rue.
"Il était important pour nous que les Lagosiens reconnaissent leur ville et que les autres découvrent ses spécificités et son organisation", précise Hamid Ibrahim.
Le parti pris de Kugali et des studios de Disney semble avoir convaincu les premiers spectateurs. "C'est bien fait avec les accents, il y avait même un peu d'argot nigérian, c'est drôle", commente Ella Gbinije, une influenceuse de 25 ans.
Pour Femi Branch, grand nom de Nollywood qui prête sa voix au personnage de Bode, Iwajù est "un événement révolutionnaire pour l'industrie de Nollywood, pour les cinéastes africains et pour les professionnels africains de l'animation".
Depuis plusieurs années, Disney ambitionne d'inclure davantage de personnages africains dans ses contenus.
Dans le documentaire, "Iwájú: un nouveau jour" qui accompagne la série, Jennifer Lee, directrice créative des studios d'animation Walt Disney explique avoir découvert Kugali à travers une vidéo de la chaîne publique britannique BBC en 2019.
Hamid Ibrahim y indiquait que les créations de Kugali allaient "botter les fesses de Disney".
L'audace et le travail accompli par Kugali autour de bandes dessinées africaines ont convaincu Jennifer Lee, qui a rapidement pris contact avec la société panafricaine pour cette collaboration.
"Nous voulons nous assurer que nous racontons des histoires authentiques et nous devons le faire par l'intermédiaire de personnes qui connaissent la ville, les personnages, la nourriture et la musique. C'est ce que nous avons fait avec Kugali, c'est leur ville", a confié Christine Service, la directrice générale de Walt Disney Afrique.
D'après une étude de l'entreprise britannique Digital TV Research publiée en février 2024, l'Afrique subsaharienne comptera 16 millions d'abonnements payants à des plateformes numériques de vidéo à la demande (VOD) d'ici 2029, contre 7 millions fin 2023. Une croissance dont devrait profiter Disney +.