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C'est une offre qu'ils ne pouvaient pas refuser: en invitant Francis Ford Coppola, 85 ans, et ses frères d'armes du "Nouvel Hollywood", le Festival de Cannes rend un hommage, peut-être le dernier, à un mouvement qui a changé l'histoire du cinéma.
Sur la Croisette, le réalisateur d'"Apocalypse Now" cotoiera le créateur de "Star Wars", George Lucas, ainsi que le cinéaste Paul Schrader, plus connu comme scénariste aux côtés de Martin Scorsese notamment pour "Taxi Driver" (Palme d'Or 1976).
Trois carrières qui ont marqué l'histoire du cinéma, et du festival.
Cinquante ans après leurs débuts, Coppola et Schrader sont en lice pour la Palme d'or. Le premier espère décrocher un troisième trophée, du jamais vu, avec "Megalopolis", le second être enfin couronné, avec "Oh, Canada". George Lucas, lui, recevra un prix honorifique pour l'ensemble de sa carrière le 25 mai.
"On a l'impression de voir les vieilles gâchettes de retour en ville pour un dernier tour de piste !", observe l'historien d'Hollywood Thomas Doherty.
"C'est comme un point d'orgue de leur carrière", ajoute Tim Gray, vétéran du journalisme ciné aux Etats-Unis. "Oui, ces types sont des marques à eux seuls. Ils sont très connus, mais ce sont des artistes, et ils sont reconnus par la communauté du cinéma dans le monde entier".
Tous trois, comme Martin Scorsese, présent l'an dernier à Cannes avec son acteur fétiche, Robert De Niro, pour "Killers of the Flower Moon", font partie des plus éminents représentants du "Nouvel Hollywood", né au tournant des années 1970.
S'inspirant de la "Nouvelle Vague" française portée par Godard ou Truffaut, de jeunes cinéastes rebelles à l'empire commercial des studios et à leurs productions corsetées font souffler un vent de révolte.
Ils revendiquent leur vision d'auteur à part entière, et la liberté qui va avec, et s'adressent à un public adulte.
La folle chevauchée à moto à travers l'Amérique d'"Easy Rider", l'épouvante de "L'Exorciste", la noirceur du "Parrain" en seront parmi les emblèmes.
Derrière la caméra, tout un système de financement est bousculé, à l'instar de Francis Ford Coppola qui risqua toute une partie de sa fortune dans le tournage dantesque d'"Apocalypse Now".
- "Tête brûlée" -
Rebelote pour "Megalopolis", le film de science-fiction qu'il présente cette année. Le projet aurait coûté plus de 120 millions de dollars, pour lesquels il a dû vendre une partie de son vignoble californien.
Le film a trouvé un distributeur en France, mais pas encore aux Etats-Unis.
"Coppola est une tête brûlée", souligne Tim Gray, qui travaille désormais pour l'organisation des Golden Globes. "Coppola a toujours pris d'énormes risques. Et sa carrière a défié la logique".
La sélection à Cannes peut être un coup de pouce pour la carrière de son film, mais la présence de ces géants du cinéma sonnent aussi comme un au revoir.
C'est à Cannes, que George Lucas a fait ses premiers pas en 1971 avec "THX 1138", un film de science-fiction, avant "Star Wars" et "Indiana Jones".
Le cinéaste, qui fêtera ses 80 ans à l'ouverture du Festival le 14 mai, a fait fortune et pris sa retraite: "lI n'a pas besoin d'argent, ni de rien", souligne Tim Gray. Mais sa Palme d'or d'honneur "est une façon de le reconnaître comme auteur".
Aux côtés des grands réalisateurs du "Nouvel Hollywood", des acteurs qui les ont accompagnés depuis des décennies seront également à Cannes, à commencer par Dustin Hoffman et Jon Voight dans "Megalopolis", aux côtés de Laurence Fishburne, qui apparaissait, adolescent, dans "Apocalypse Now".
Richard Gere, chevelure désormais intégralement blanche, retrouve pour sa part Paul Schrader, pour un rôle qui s'annonce nostalgique dans "Oh, Canada". Quarante-quatre ans après avoir tourné ensemble dans "American Gigolo".
Et comme un clin d'oeil de l'histoire, les enfants de deux réalisateurs iconiques, Francesca Scorsese et Sawyer Spielberg, sont attendus sur la Croisette pour "Christmas Eve In Miller’s Point", un film indépendant présenté à la Quinzaine des cinéastes.