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L'auteur britannique Salman Rushdie a été poignardé au cou ce vendredi par un homme lors d'une conférence dans l'ouest de l'Etat de New York. A ce stade, l'auteur est placé sous respirateur, et pourrait perdre un œil. "Les nouvelles ne sont pas bonnes", a déclaré vendredi soir au New York Times l'agent de l'écrivain britannique de 75 ans, Andrew Wylie. "Salman va probablement perdre un œil ; les nerfs de son bras ont été sectionnés et il a été poignardé au niveau du foie".
Pendant ce temps, la presse conservatrice iranienne félicite l'auteur présumé de l'attaque au couteau. "Bravo à cet homme courageux et conscient de son devoir qui a attaqué l'apostat et le vicieux Salman Rushdie", écrit le journal ultraconservateur iranien Kayhan, dont le patron est nommé par le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei. "Baisons la main de celui qui a déchiré le cou de l'ennemi de Dieu avec un couteau", poursuit le texte.
Qui est l'assaillant présumé ?
Il s'appelle Hadi Matar, il a 24 ans, et est originaire de Californie, aux États-Unis. Il s'agit d'un chiite (courant religieux) libanais qui vit actuellement dans le New Jersey. Au moment des faits, il était en possession d'un faux permis de conduire et d'un couteau. Matar a été rapidement maitrisé par la police. Les circonstances qui entourne l'agression sont encore floues. "C'est beaucoup trop tôt", précise le major Eugene Staniszewski, de la police de l'Etat de New York. "Nous n'avons pas d'indication sur ses intentions, pour le moment. Mais nous allons collaborer avec le FBI pour comprendre le motif de cette attaque."
Sur ses réseaux sociaux, l'assaillant revendique être favorable à l'extrémisme chiite. Il met en avant les figures du régime iranien, ainsi que son fondateur, l'Ayatollah Khomeyneille, auteur de la fatwa (en religion islamique : consultation juridique donnée par une autorité religieuse) contre Salman Rushdie depuis 1989.
Hadi Matar a été capturé vivant, ce qui devrait permettre aux enquêteurs d'éclaircir ses liens avec le Hezbollah et les motivations de son geste.
Salman Rushdie, menacé depuis des décennies
Salman Rushdie, né en 1947 à Bombay, deux mois avant l'indépendance de l'Inde, essaie de ne pas être réduit au scandale provoqué par la publication des "Versets sataniques", qui avait embrasé le monde musulman et conduit en 1989 à une "fatwa" demandant son assassinat. Mais l'actualité (la montée en puissance de l'islam radical) n'a cessé de le ramener à ce qu'il a toujours été aux yeux de l'Occident: le symbole de la lutte contre l'obscurantisme religieux et pour la liberté d'expression.
Déjà en 2005, il considérait que cette fatwa avait constitué un prélude aux attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Contraint dès lors de vivre dans la clandestinité et sous protection policière, allant de cache en cache, il se fait appeler Joseph Anton, en hommage à ses auteurs favoris, Joseph Conrad et Anton Tchekhov.
Installé à New York depuis quelques années, Salman Rushdie avait repris une vie à peu près normale tout en continuant de défendre, dans ses livres, la satire et l'irrévérence.