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Les actionnaires de Ryanair ont infligé jeudi un camouflet à son président, réélu avec difficulté lors d'une assemblée générale tendue par un climat de grèves inédit au sein de la compagnie aérienne.
David Bonderman n'a été réélu à la tête du conseil d'administration de la compagnie irlandaise à bas coût qu'avec 70,5% des suffrages, lors d'une assemblée générale annuelle organisée dans un hôtel à Gormanston près de Dublin, a constaté un journaliste de l'AFP.
Cela signifie que des actionnaires possédant un total de presque 30% des titres n'ont pas voté pour sa reconduction - un taux remarquablement élevé.
L'an passé, M. Bonderman, un milliardaire américain présidant Ryanair depuis 22 ans, avait recueilli 89,1% des suffrages.
Le directeur général de la compagnie, Michael O'Leary, a en revanche été réélu très confortablement, avec 98,5% des suffrages.
Le président du conseil d'administration remplit un rôle de représentation et de contrôle, alors que la direction exécutive est assurée par le directeur général, en l'espèce le tonitruant M. O'Leary connu pour son ton volontiers provocateur, ses expérimentations surprenantes et ses changements de stratégie.
Lors d'un point presse après la réunion, M. O'Leary a accouru au secours de son président, présentant son apport comme "inestimable, notamment dans nos rapports avec Boeing", l'avionneur fournisseur exclusif de la compagnie.
Il a toutefois ajouté ne pas "sous-estimer" l'ampleur de la défiance à l'égard de M. Bonderman qu'il voudrait voir rester quand même au moins deux ans de plus.
L'importante minorité qui s'est prononcée contre M. Bonderman témoigne d'un malaise au moment où la première compagnie européenne fait face à une grogne inédite de son personnel depuis un an, marquée par plusieurs grèves.
- Fébrilité ? -
L'association LAPFF, qui représente des fonds de pension présents au capital de Ryanair, s'est félicitée de la défiance affichée à l'égard de M. Bonderman contre lequel elle avait appelé à voter.
"Ryanair n'a pas pris à bras le corps les inquiétudes autour de la relation troublée de l'entreprise et de ses employés et de son impact potentiel sur l'activité", a jugé le président du LAPFF, Ian Greenwood.
Une grève des personnels de cabine de Ryanair est appelée pour le 28 septembre par des syndicats en Belgique, Espagne, Italie, Pays-Bas et Portugal. Les syndicats réclament de meilleures conditions de travail et l'emploi de chaque salarié via un contrat relevant de son pays de résidence.
Un représentant syndical a pointé le fait que le choix du lieu de l'assemblée générale, un hôtel en bordure d'autoroute à 35 km de Dublin, montrait que "Raynair prend peur".
"Cela ne donne pas l'image d'une entreprise sereine dotée d'un modèle social sain", a expliqué à l'AFP Stephen Cotton, secrétaire général de la Fédération internationale des travailleurs des transports.
Au mois d'août, la compagnie a connu un vaste mouvement coordonné de son personnel dans cinq pays européens: 400 vols annulés en pleine période de vacances et plus de 55.000 passagers touchés.
Le groupe fait face à une contestation sociale endémique depuis un an. Après avoir refusé de reconnaître et de discuter avec les syndicats lors de ses trois premières décennies d'existence, Ryanair a entamé une virage à 180 degrés en décembre dernier en acceptant de reconnaître les syndicats.
Le lancement de ce processus n'a pas mis fin à la grogne du personnel mais la compagnie a conclu quelques accords sociaux, par exemple au Royaume-Uni, en Irlande et en Italie, acceptant des augmentations de salaires et des améliorations des conditions de travail. Ces concessions font toutefois craindre aux actionnaires que la compagnie ne puisse plus dégager des profits aussi élevés. En un an, l'action Ryanair a perdu 17% à la Bourse de Dublin.