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Chambre du conseil pour les attentats de Bruxelles: Salah Abdeslam, radicalisé ou suiveur?

À Molenbeek, Salah Abdeslam a un voisin qui est aussi un ami d’enfance: Abdelhamid Abaaoud. Ensemble, les deux hommes partagent les bières, les "pétards" et les mauvais coups. En 2010, le braquage raté d’un garage les envoie tous les deux en prison.

Les Béguines

À partir de 2013, le café "Les Béguines" devient le QG des fumeurs de shit de Molenbeek. Brahim Abdeslam en est le gérant, Salah y passe l’essentiel de son temps mais Abaaoud est loin désormais. En février, il a rejoint la Syrie. Le café devient alors le point de contact avec l’ami parti et le lieu de diffusion des vidéos de l’organisation terroriste Etat islamique (EI).

L’alerte 

Personne ne s’en émeut jusqu’au 30 janvier 2015. Quinze jours après le démantèlement de la cellule de Verviers, un inspecteur de la police locale de Molenbeek rédige un PV d’information très documenté. Il indique que Salah Abdeslam a l’intention de rejoindre l’Etat islamique en Syrie. "Il en aurait discuté à la sortie de la mosquée Al Mouttaquine…aurait déjà préparé ses bagages, il aurait reçu un coup de fil de son frère aîné Brahim qui aurait dit qu’il se trouvait à la frontière turco-syrienne". Ce PV (n°004703/2015) précise encore que Salah Abdeslam est un ami d’Abaaoud et qu’ils se seraient parlés à plusieurs reprises peu avant les événements de Verviers.


 
Les mensonges de Salah

Le policier auteur du PV initial n’est pas recontacté avant les attentats de Paris mais Salah Abdeslam est convoqué à la police locale le 28 février 2015. Il réfute les soupçons de départ en Syrie : "C’est absolument faux, je ne compte pas aller en Syrie pour y combattre", il affirme que son frère est en vacances en Turquie et qu’il n’a pas eu de contacts récents avec Abaaoud : "C’est un chouette gars. Je le connais depuis environ 10 ans. À l’époque, c’était un bon ami, je traînais tout le temps avec… On s’est un peu perdu de vue avec les années…en dehors du djihad, c’est quelqu’un de bien en général."


L’occasion manquée

Le dossier Abdeslam est alors transmis à la police fédérale, il rejoint la catégorie des "dossiers rouges", ceux qu’on ne traite pas, faute d’urgence et de personnel. Le 23 mars 2015, le magistrat fédéral insiste pour que ces dossiers soient répartis en province, la hiérarchie de la police s’y oppose. Pendant des mois, on s’échange des mails, on contextualise et on conclut : "Aucun élément ne permet de corroborer les informations du PV initial". Le 11 juin 2015, le parquet classe le dossier sans suite.

Cet été-là, Salah Abdeslam semble profiter du ramadan pour arrêter de boire et de fumer. Quelques semaines plus tard, il est contrôlé en Grèce, pays d’entrée en Europe des migrants parmi lesquels se dissimulent les terroristes revenant de Syrie.

Confidence et dissimulation

Une personne est pourtant au courant de ses velléités de départ, c’est sa petite amie Yasmina. Dès le mois de décembre 2014, Salah Abdeslam aurait évoqué son départ "Il pensait aller là-bas pour aider. Il voulait même que je l’accompagne, je ne l’ai pas pris au sérieux. Il n’avait pas du tout le profil : il fumait des pétards de temps en temps, il écoutait de la musique, sortait… Il priait même pas à l’heure", dit-elle.

Mais ensuite, "il n’a plus remis le sujet sur le tapis. En tout cas, pas avec moi", poursuit la jeune fille.

Yasmina évoque aussi Abaaoud, "un de ses amis d’enfance parti en Syrie… On a parlé de lui dans les journaux et j’ai fait remarquer à Salah qu’il était fou. Salah m’a répondu que chacun choisissait son camp."


Quand Salah Abdeslam a-t-il choisi le sien ? "Selon moi, c’est Abaaoud Abdelhamid qui l’a embarqué là-dedans, je pense que Salah était quelqu’un d’influençable" résumera plus tard Yasmina. Ou bien Salah Abdeslam a-t-il parfaitement appliqué la taqiya, cette technique de dissimulation recommandée par le coran ? 

Interrogé le 8 septembre 2016 sur sa radicalisation et sur l’influence d’Abaaoud, Salah Abdeslam a gardé obstinément le silence.

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