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La première parcelle agrivoltaïque de Wallonie a été inaugurée le 1er juin. Ce concept alliant agriculture et production d’électricité photovoltaïque est bien implanté chez nos voisins. Il présente de nombreux avantages pour les agriculteurs mais suscite encore des craintes chez nous. Pourquoi ? Comment fonctionne ce système ? C'est sur ces questions que se penche le Planète Avenir de ce vendredi.
Pour les uns, c’est un abri. Pour les autres, c’est un revenu supplémentaire. Lumière sur un secteur porteur d’espoir, mais aussi de craintes...
Les moutons découvrent leur nouvelle prairie : une pâture de près de 14 hectares sur laquelle sont implantés des panneaux solaires. Une installation flambant neuve que visitent main dans la main Grégory et Sandrine, éleveurs à Chimay. "On va avoir la même chose chez nous", disent-ils.
Eux aussi comptent faire cohabiter leurs moutons avec une production photovoltaïque. Des panneaux qui produisent de l’électricité, protègent les bêtes en cas d’intempéries et surtout préservent la qualité de l’herbe en été. "Il faut savoir qu'en cas de sécheresse, l'herbe va commencer à mourir sur pied. Elle va commencer à se casser. Les animaux auront une valeur nutritive beaucoup moins élevée avec une sorte de fourrage comme ça. Tandis qu'on voit bien que sous les panneaux, l'herbe est verte et encore bien vivante", note Sandrine.
Les panneaux ont une hauteur d’un mètre minimum. Ils sont vissés dans le sol sans béton ce qui permet de les démonter sans endommager le champ. En échange de la mise à disposition de leur terrain, Grégory et Sandrine recevront un loyer d’environ 2.000 euros par hectare et par an. Un revenu supplémentaire plus que bienvenu aujourd’hui. "Aujourd'hui, je sais combien je vais vendre mon agneau. Demain, si ça se trouve, on ne m'en donnera rien. Par contre, nous, on doit continuer à vivre. À vivre et à payer nos engagements... Donc, on optimise un outil tout en sécurisant financièrement notre installation agricole", poursuit l'éleveuse.
Ce champ d’agrivoltaïsme est le tout premier de Wallonie. L’électricité produite ici est redistribuée sur le réseau, elle alimente environ 3.000 ménages. Une fierté pour le promoteur du projet, Alex Houtart. "Vous savez comme moi qu'on a des objectifs en Wallonie. Et pour atteindre ces objectifs, il faudrait installer à peu près 4 fois par an ce qu'on installe aujourd'hui en photovoltaïque, pour qu'on puisse, d'ici 2030, atteindre ces objectifs", explique-t-il.
Transition énergétique et climatique, bien-être animal... L'’agrivoltaïsme répond aussi à un autre défi qui préoccupe les éleveurs : le retour du loup en Belgique. "Nous, on doit mettre des clôtures de sécurité, de toute façon, pour protéger le champ photovoltaïque. Et ça sert aussi évidemment aux éleveurs de moutons pour les protéger contre les loups... Ce qui est de plus en plus obligatoire maintenant en Wallonie, puis ça coûte cher donc nous, on offre les clôtures", indique Alex Houtart.
Dans les pays voisins, les panneaux solaires préservent surtout des arbres fruitiers de la grêle ou de la sécheresse. Chez nous, la plupart des projets d’agrivoltaïsme comptent s’implanter sur des prairies où paissent moutons ou bovins. "Ici, ça convient très bien sous nos latitudes. Et en plus, il y a un 2e avantage : c'est que la filière mouton est en difficulté pour le moment, et donc toute une série d'agriculteurs qui voulaient faire du mouton et qui n'étaient pas capables d'en faire financièrement retrouvent la possibilité de réintroduire du mouton grâce à l'agrivoltaïsme", poursuit le promoteur du projet.
Le développement de l’agrivoltaïsme ne fait pas que des heureux. Selon la Fédération wallonne de l’Agriculture, de nombreux projets sont en fait des centrales électriques accompagnées d’une petite activité agricole plutôt cosmétique. Pour Lucie Darms, la production solaire sur champs fait aussi grimper le prix des terres agricoles. "En mettant des panneaux photovoltaïques sur une terre agricole, le prix de l'hectare va augmenter considérablement alors que ce prix est déjà en train de grimper de toute part par l'accaparement, aussi pour les projets résidentiels", dénonce-t-elle.
La Région wallonne décourage l’installation de panneaux photovoltaïques sur des terres agricoles. Dans une circulaire, le ministre de l’Économie assure que la région dispose de kilomètres carrés de friches industrielles ou de toitures qui peuvent facilement accueillir une production d’électricité solaire.