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"J’ai perdu mon sang-froid, le coup est parti": en Belgique, une vingtaine de féminicides sont recensés chaque année

Le procès de David Piton s'est ouvert cette semaine à la cour d'assises de Liège. Il est accusé d'avoir tué son ex-compagne, Madisson Hamoir, mère de leurs deux enfants, d'une balle dans la tête. 

David Piton, un Sprimontois âgé de 34 ans, est accusé d'avoir tué son ex-compagne. Lors de l’ouverture de son procès, il a tenté d’expliquer son geste : "J’ai perdu mon sang-froid. Le coup est parti", a déclaré l'homme devant les jurés.

Mais pour l’avocat des parties civiles, Me Renaud Molders-Pierre, ce crime ne peut se résumer à un simple "accident". "Il y a effectivement une jalousie qui s’est installée", explique-t-il. Avant d'ajouter: "Une jalousie et une possessivité qui ont engendré le fait que l’accusé surveillait sa future victime".

Selon lui, l’un des enjeux du procès sera de comprendre comment David Piton en est arrivé à tuer son ex-compagne.

Le féminicide, un phénomène encore mal identifié

Le féminicide est défini comme le meurtre d'une femme en raison de son appartenance au sexe féminin. En Belgique, plus d’une vingtaine de cas sont recensés chaque année, mais les spécialistes estiment que ce chiffre est largement sous-estimé.

“Il y a des féminicides non-intimes, comme ceux liés à l’exploitation sexuelle ou au trafic d’êtres humains, mais aussi des féminicides indirects, comme les suicides résultant de violences conjugales”, précise l’avocate spécialisée en droits humains, Sibylle Gioe.

En 2023, elle a contribué à la rédaction de la loi "STOP Féminicide", qui a été adoptée en Belgique. Ce texte est une première en Europe, car il intègre officiellement le féminicide dans un cadre légal. Son objectif principal est préventif.

Une loi symbolique, mais peu contraignante

La loi "STOP Féminicide" définit plusieurs formes de violences de genre :

  • Physiques
  • Psychologiques
  • Sexuelles
  • Économiques
  • Liées au contrôle coercitif, notamment dans le cadre familial ou conjugal.

Toutefois, cette législation n'a pas été intégrée au Code pénal belge. Une décision justifiée par certains avocats pénalistes : "La peine qui est déjà prévue est la plus lourde. D’un point de vue purement juridique, il n’y a donc pas de nécessité à ajouter des circonstances aggravantes", estime Me Nathan Mallants.

Me Adrien Croisier partage cet avis : "Au moment de la répression, c’est de toute façon trop tard. Et en l’état actuel de la législation, on peut déjà aller jusqu’à la peine maximale".

Une mise en application encore incertaine

Si cette loi ne vise pas à renforcer les sanctions pénales, elle a pour but d’améliorer l’identification des féminicides et de mieux adapter les politiques publiques. Mais encore faut-il que ces mesures soient mises en œuvre...

“Cette loi a été votée à l’unanimité, sauf l’abstention de la N-VA, qui est aujourd’hui au gouvernement fédéral”, rappelle Sibylle Gioe.

L'accord du gouvernement fédéral prévoit une dizaine de mesures pour lutter contre les féminicides. Leur mise en place dépendra toutefois des moyens alloués à la Justice belge. Pour l’instant, les associations et les familles de victimes attendent encore des actions concrètes 
 

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