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Les banques et assurances sont sommées de "faire plus" malgré leurs annonces pour lutter contre la crise économique du coronavirus. Ces semonces répétées relèvent parfois plus du "double discours" politique pour ces professionnels qui soulignent leur travail constant avec les pouvoirs publics.
En appelant lundi les banques à "décaler toutes les échéances (de prêts, NDLR) beaucoup plus massivement qu'elles ne l'ont fait" et les assureurs à être "au rendez-vous de cette mobilisation économique", le président de la République a remis une pression sur ces professionnels.
Sur le moratoire bancaire, "on essaie encore d'avoir un décryptage sur ce qu'attend l'Elysée", explique à l'AFP un spécialiste du secteur. D'autant que les banques ont enclenché depuis un mois la suspension de paiement des échéances de crédit pour les entreprises pouvant aller jusqu'à six mois.
Ces reports, généralement sans frais de dossier, concernent jusqu'ici 300.000 crédits au Crédit Mutuel Alliance Fédérale, 500.000 crédits chez BPCE représentant 4,4 milliards d'euros d'échéances et 390.000 crédits pour 3,3 milliards chez Crédit Agricole.
Reste des pratiques à revoir comme la facturation de report d'échéances réalisées par des "experts du chiffre (...) qui vont parfois facturer ce que l'Etat fait gratuitement", a dénoncé mardi le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin.
Toutefois, le ton est moins impératif à Bercy qu'à l'Elysée. Les banques "peuvent évidemment faire mieux" mais "jouent le jeu" avec les prêts garantis par l'Etat (PGE) accordés aux entreprises, a déclaré le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.
Selon la Banque de France, 230.000 entreprises, en très grande majorité des très petites entreprises, avaient demandé un PGE pour un total d'environ 45 milliards d'euros à la date de mardi soir.
Mais de nombreuses entreprises ne sont pas éligibles en raison de leur fragilité financière ou de difficultés antérieures à la crise.
"On va trouver des solutions pour chacun", a assuré M. Le Maire. Les entreprises en redressement judiciaire non éligibles au PGE "seront éligibles au fonds de solidarité" selon lui.
- Pression "dure" sur les assureurs -
Les assureurs, eux, sont au centre des critiques. La semaine dernière, "nous leur avons dit très clairement: vous ne faites pas assez", a relaté M. Le Maire.
"La pression sur les assureurs est passée d'amicale à vraiment dure. En soulignant qu'ils avaient une sinistralité moindre et qu'il était bien normal qu'ils participent davantage à l'effort national", a confirmé une source gouvernementale à l'AFP.
Au début du mois, Jean-Laurent Granier, vice-président de la Fédération française de l'assurance (FFA) rappelait "l'effort considérable" des assureurs, évalué à 3,2 milliards d'euros.
Las, la polémique ne s'éteint pas, nourrie par la non-indemnisation des pertes d'exploitation des entreprises. Sans dommage matériel, les pertes de revenus ne sont pas remboursées, le risque d'épidémie étant d'ailleurs exclu de la quasi-totalité des contrats.
Indemniser ces pertes "reviendrait à mettre le secteur de l'assurance à terre", répétait lundi au Figaro Florence Lustman, présidente de la FFA, précisant qu'elles représentaient près de 60 milliards d'euros en France.
Elle a toutefois annoncé mercredi devant la commission des Finances de l'Assemblée nationale une "deuxième série de mesures" de soutien à l'économie, dont l'augmentation de la contribution des assureurs à hauteur de 400 millions d'euros, contre 200 initialement prévus, au Fonds national de solidarité en faveur des très petites entreprises et indépendants.
Les assureurs ont aussi "choisi d'aider à la relance de notre pays, dès la sortie de crise" en finançant "à hauteur de 1,5 milliard les ETI (établissements de taille intermédiaire), les PME et plus globalement le secteur de la santé", a aussi déclaré Mme Lustman.
Ce financement se fera au travers d'un fonds d'investissement coordonné par la Caisse des dépôts.
Sur l'élaboration d'un régime de catastrophe sanitaire, "la FFA a d'ores et déjà lancé les travaux qui vont nous permettre de faire des propositions", a indiqué la dirigeante de la fédération.
"Toute l'ire est concentrée à notre endroit, ce qui est un peu surprenant alors même, comme le soulignait notre autorité de contrôle, que nous sommes gravement touchés par cette crise" et que "nous sommes le seul secteur économique à contribuer" au fond de solidarité, a-t-elle souligné lors de cette audition.