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Le roi Philippe s'est adressé mardi matin aux autorités du pays, au Château de Laeken, dans un discours de Nouvel An soulignant l'importance de la démocratie, face aux rendez-vous électoraux à venir. "Notre démocratie, quoique complexe, reste notre bien le plus précieux", a souligné le Roi, exprimant l'espoir d'"ambitions renouvelées et de projets communs" pour la Belgique.
Le souverain a d'abord abordé le rôle de l'Europe face aux conflits et tensions géopolitiques. "L'Europe reste un socle solide, construit sur les principes d'intégration et de coopération, et non de domination", a-t-il rappelé. Il a mis en exergue le rôle que peut jouer la Belgique en tant que présidente actuelle du Conseil de l'UE: "Nous avons développé (...) un savoir-faire basé sur le pragmatisme et la recherche de solutions. À nous maintenant (...) de montrer que l'Union européenne s'attaque aux problèmes des citoyens et obtient des résultats". La société belge a elle aussi "besoin d'un Etat qui est à son écoute et qui la soutient", poursuit le Roi. Un Etat "qui demeure, en toutes circonstances, le meilleur garant de l'intérêt général". "Je nourris l'espoir que nous puissions nous fédérer autour d'ambitions renouvelées et de projets communs où toutes les autorités de notre pays jouent leur rôle dans un esprit de consensus."
Le roi Philippe a illustré certaines des ambitions possibles pour les prochaines années. Il a pointé quatre domaines: l'enseignement ("investir dans l'éducation reste le meilleur pari pour l'avenir"), l'économie, dans laquelle il plaide pour plus de circulaire, la cohésion sociale ("la précarité subsiste, voire augmente, en partie à cause du changement climatique et de la crise énergétique") et l'intelligence artificielle. "Il est aussi de la responsabilité des autorités, aidées en cela par l'Europe, de bien encadrer ces évolutions", a-t-il mis en garde au sujet de l'IA.
Voici le discours du Roi
Mesdames et Messieurs,
Face aux conflits géopolitiques qui se multiplient et aux tensions grandissantes dans le monde, l’Europe reste un socle solide, construit sur les principes d’intégration et de coopération, et non de domination.
J’ai pu observer combien les dirigeants européens se réjouissaient que notre pays prenne, ce semestre, les rênes du Conseil de l’Union Européenne. Ils nous font confiance. Sans doute parce que nous comptons parmi les Etats Membres où l’adhésion au projet européen reste vive. Mais aussi parce que nous avons développé chez nous un savoir-faire basé sur le pragmatisme et la recherche de solutions. A nous maintenant, à l’occasion de la présidence belge, de montrer que l’Union européenne s’attaque aux problèmes des citoyens et obtient des résultats.
Mesdames et Messieurs,
En Belgique, cette année sera marquée par deux importants rendez-vous démocratiques. Nous serons invités à nous prononcer sur l’avenir que nous souhaitons pour nous-mêmes.
Ces échéances nous rappellent que chacun, au sein de nos sociétés, peut saisir la chance de s’engager, que ce soit dans sa vie quotidienne, dans des organisations bénévoles ou même en politique.
Vous qui représentez les autorités du pays et dont je connais l’engagement pour la chose publique, vous créez et renforcez chaque jour le cadre dans lequel s’épanouit cette société. Afin de pouvoir fonctionner et évoluer, elle a besoin d’un Etat qui est à son écoute et qui la soutient. Chacun et chacune, vous incarnez cet Etat qui demeure, en toutes circonstances, le meilleur garant de l’intérêt général.
Je nourris l’espoir que nous puissions nous fédérer autour d’ambitions renouvelées et de projets communs où toutes les autorités de notre pays jouent leur rôle dans un esprit de consensus.
Mesdames et Messieurs,
Une première ambition pourrait être de continuer au rapprochement des secteurs public et privé dans le domaine de l’éducation. Les Communautés ont déjà initié des réformes importantes de nos systèmes éducatifs. Même si cela exige du temps et des moyens, investir dans l’éducation reste le meilleur pari pour l’avenir. Des champs d’action comme la formation en alternance et la formation continue restent à développer. La prochaine législature offre de belles perspectives dans ce domaine. Je continuerai à les suivre avec intérêt et à les encourager.
Une autre ambition devrait être de soutenir notre économie à faire face aux changements qui caractérisent notre époque. De nouveaux modes de production et de consommation bousculent nos habitudes. Voyons ces changements comme de réelles opportunités et mobilisons nos forces pour transformer notre économie. Certaines de ces forces sont bien connues, à commencer par notre niveau élevé de recherche et développement. D’autres sont encore trop méconnues. Parmi elles, l’économie circulaire dans laquelle nous sommes particulièrement performants, cette démarche multiple qui crée un cercle vertueux entre l’utilisation optimale des matières premières, le recyclage et la réutilisation. En augmentant encore la part d’économie circulaire dans notre PIB, nous rencontrons trois objectifs très actuels : favoriser la production locale, réduire notre impact environnemental et créer de l’emploi, y compris pour les personnes moins qualifiées. Il me semble donc qu’il y a là une énorme marge de croissance, qui servirait en même temps notre prospérité et notre contribution à la lutte contre le changement climatique.
Une troisième ambition devrait être de renforcer encore notre cohésion sociale. Notre pays obtient de bons résultats au niveau international en termes d’égalité des chances. Mais la précarité subsiste, voire augmente, en partie à cause du changement climatique et de la crise énergétique. Trop de familles vivent encore dans des logements insalubres, qui consomment trop d’énergie et manquent d’équipements de base, parfois même d’eau courante. Nous devons mettre fin à ces situations au plus vite. Avec mon soutien actif, la Reine continuera à s’investir pleinement dans la réalisation des objectifs du Développement durable des Nations Unies, dont la lutte contre la précarité fait intimement partie.
Et enfin, Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons ignorer ce défi de taille que représente les progrès de l’intelligence artificielle, avec ses avantages mais aussi avec ses risques. Elle influencera en profondeur tous nos domaines d’activité : l’éducation et la formation, le travail, les soins de santé, l’innovation. A très court terme, il s’agit d’une part de sensibiliser les utilisateurs de cette intelligence – ce que nous sommes tous, en fin de compte. Mais il est aussi de la responsabilité des autorités, aidé en cela par l’Europe, de bien encadrer ces évolutions.
Mesdames et messieurs,
Nous savons que notre démocratie, quoique complexe, reste notre bien le plus précieux. Celui sur lequel l’Etat peut et doit se reposer pour offrir aux citoyens un cadre dans lequel ils peuvent s’épanouir et aborder l’avenir avec confiance.
La Reine et moi, ainsi que toute notre famille, vous adressons nos voeux les plus sincères. Que cette année nouvelle soit une année de paix et de bonheur.