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Reine des paparazzi, proche des Sarkozy puis gardienne de l'image des Macron, Michèle Marchand, alias "Mimi", mise en examen samedi, s'est hissée jusqu'aux ors élyséens au terme d'un parcours étonnant, passant par les milieux interlopes et la prison.
Conseillère informelle, mais également patronne de presse, les contours de son action au palais présidentiel sont toujours restés flous, entre communication et photojournalisme.
Femme de l'ombre, avant ses péripéties judiciaires liées à l'affaire Takieddine, elle avait été mise en pleine lumière par une biographie non autorisée publiée en 2019.
"La Raspoutine de l'Elysée" pour le journal espagnol El Pais, "Balzac dans les coulisses du pouvoir" pour le quotidien belge Le Soir ou encore "Le loup dans la bergerie Macron" pour le français Le Monde: son parcours relaté dans ce livre est tellement étonnant, son profil tellement atypique, que la presse file les métaphores.
"Elle a tout fait", écrivent les journalistes Jean-Michel Décugis (Le Parisien), Marc Leplongeon (Le Point) et la romancière Pauline Guéna, auteurs de "Mimi", publié chez Grasset.
Garagiste, tenancière de nightclubs, amie de policiers, de voyous, du monde de la nuit parisienne, elle a tissé au cours des années des amitiés qu'elle a parfaitement exploitées.
Agée de 74 ans, Mimi est née en banlieue parisienne dans une famille modeste. Mère avant vingt ans, elle va faire réparer un jour des années 1970 sa voiture dans un garage parisien. Au final, elle s'associe dans l'affaire et se met en couple avec le patron. Le garage est ouvert 24H/24H et voit défiler les milieux interlopes de la nuit parisienne.
Dans les années 1980, c'est un autre "Garage" qu'elle reprend, du nom d'une boîte parisienne aux dames très déshabillées. Elle montera d'autres nightclubs dont Le Cirque, une boîte gay où défilent les stars.
"Elle a réussi à se constituer de réelles amitiés parmi les stars", se souvient un communicant qui l'a côtoyée.
Ces contacts, elle va les mettre au service d'une carrière dans la presse people. En 1995, elle entre au magazine Voici où elle se rend immédiatement indispensable. "99,9% des sujets people viennent d'elle", assure un expert du secteur.
"J'ai collaboré avec Voici à l'époque où elle y était (...) Elle travaillait beaucoup sur la famille de Monaco et tous les people, Depardieu, Hallyday...", assure une autre source.
- "Fausse paparazzade" -
"Les histoires sont parfois vraies, souvent fausses. Une seule règle: rester, à peu près, vraisemblable", assurent les auteurs de la biographie.
Aventureuse et madrée, Mimi Marchand trébuche parfois, rappellent-ils. Dans les années 1980, elle fait de la détention provisoire pour ses liaisons dangereuses avec son compagnon "Hafed le rouge", accusé du plus gros braquage de France. En 1998, elle est condamnée à trois ans de sursis pour un trafic de cannabis qu'aurait monté un ancien compagnon.
Mais elle rebondit à chaque fois. Elle rachète l'agence de photographie du "roi des paparazzi" Daniel Angeli, qu'elle rebaptise Bestimage. Le succès est foudroyant: la photo en maillot de bain de Ségolène Royal, candidate socialiste à la présidentielle, les amours de Nicolas Sarkozy et Carla Bruni qu'elle connait bien. "Michèle Marchand a longtemps été une fidèle de son +Nicolas+. Elle détenait sa carte de grand donateur de l'UMP", rappelle une enquête parue dans Vanity Fair en 2017.
"Elle est responsable de la peopolisation de la vie politique", assure François Hollande dans "Mimi".
Plutôt que de publier des photos "volées", Mimi "monte" un sujet, en connivence avec la "cible". "Elle arrive à angler les sujets comme elle veut. Elle a un pouvoir de contrôle", explique un membre de la presse people.
Brigitte Macron l'a bien compris. Par l'entremise de l'entrepreneur milliardaire Xavier Niel, Mimi la rencontre au printemps 2016 pendant un moment difficile de la campagne présidentielle: la solidité de son couple avec Emmanuel Macron, de 25 ans son cadet, est mise en doute, et des rumeurs bruissent sur la prétendue homosexualité du futur président.
Brigitte Macron est convaincue par Mimi et, en août 2016, le couple fait la une de Paris Match en amoureux à la plage.
Après l'élection d'Emmanuel Macron, son agence intègre le comité de liaison de la presse présidentielle. Sans apparaître dans aucun organigramme, elle agit en coulisses pour protéger l'image des Macron. "Mon job est de mettre la poussière sous le tapis", lui font dire les auteurs du livre.