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L’enseignement catholique est en colère. Depuis quelques semaines, le réseau libre ne cache pas son désarroi face aux choix actuels du gouvernement de la Fédération Wallonnie-Bruxelles (FWB) pour la rénovation (énergétique) des écoles.
Pour financer ces travaux, les autorités publiques ont décidé de notamment dégager un budget de 300 millions d’euros qu’elles toucheront du plan de relance européen (en savoir plus en cliquant sur ce lien). La répartition prévue ne plaît pas à tout le monde.
Comment cette manne de 300 millions d’euros va-t-elle être répartie ? Pour le moment, le gouvernement de la FWB envisage le plan suivant:
- 176 millions d’euros pour le réseau Wallonie-Bruxelles Enseignement (15% des élèves)
- 69 millions pour les écoles communales et provinciales (35% des élèves)
- 56 millions pour les écoles du libre (50% des élèves)
58,5% du montant irait donc au réseau Wallonie-Bruxelles Enseignement. Le reste, soit 41,5%, serait partagé entre le réseau officiel subventionné (écoles communales et provinciales) et l’enseignement libre, confessionnel (catholiques, protestantes, israélites, islamiques, orthodoxes) et non confessionnel.
Chaque enfant doit être considéré de manière égalitaire et avec cette répartition, ça n’est pas le cas
L'enseignement catholique n’est pas du tout d’accord avec cette répartition et l’a fait savoir. C’est le cas notamment de Vincent Adyns, le directeur de l’école fondamentale Sainte-Marie à Jambes, qui a ces derniers jours décidé d’avertir les parents d’élèves de son établissement.
"La proposition du Ministre Daerden qui est en charge de ce volet, ne nous convient pas du tout car elle n’est pas équitable. Nous considérons que le budget doit être réparti de manière équitable par rapport au nombre d’enfants qui sont scolarisés. Pour le moment ce n’est pas le cas. La proposition est faite sur une autre base de calcul et on estime que cette politique du gouvernement doit être revue. L’ensemble des réseaux, enseignement libre, communal ou provincial, sont particulièrement lésés par rapport à la clé de répartition avancée", regrette Vincent Adyns.
Le directeur a décidé de contacter les parents d'élèves de son établissement pour leurs donner les informations actuelles dans ce dossier. Il explique son choix. "Nous voulions tenir les parents au courant. Au final, si les bâtiments ne sont pas bien entretenus dans l’école où leur enfant se trouve, ce n’est quand même pas confortable pour eux."
Et d'ajouter: "On dit que chaque enfant doit être considéré de manière égalitaire et dans la clé de répartition, ça n’est pas le cas, alors que les parents paient aussi des contributions pour faire fonctionner le système."
On ne pourra pas relever le défi énergétique
Directeur depuis 21 ans à Jambes, Vincent Adyns souligne qu'avec le "déséquilibre" dans la répartition des fonds, son école ne pourra pas relever le défi énergétique lancé par les autorités.
"Les subventions ne suffisent déjà pas actuellement pour entretenir le bâtiment quand il a besoin de rénovations plus profondes (isolation de toiture, changement de châssis, de chaudière,…). On peut introduire des dossiers pour financer les travaux, mais on est toujours limité. Ici, il y a une enveloppe supplémentaire qui apparaît pour notamment améliorer les performances énergétiques des bâtiments pour être plus dans les normes de respect de l’environnement en termes d’émissions, etc… Mais si on n’a pas une répartition plus équitable, on ne pourra pas relever le défi énergétique à ce niveau-là. Les budgets sont déjà assez serrés pour d’autres chantiers. Cela ne nous donnerait pas de marge de manœuvre. Il n’y a pour le moment pas de plan b. De manière générale, la répartition des subsides entre les écoles n’est pas équitable mais ici, c’est particulièrement flagrant."
L’incompréhension est très grande entre l’enseignement catholique et l’autorité publique
Etienne Michel, directeur du réseau de l'enseignement catholique (SeGEC), réclame de son côté un rééquilibrage tenant davantage compte du nombre d'élèves scolarisés dans chaque réseau.
"A ce stade, il y a un processus d’interpellation des parlementaires qui a été organisé. Il y a des contacts qui se poursuivent avec l’autorité publique. Mais je ne suis pas encore en mesure de dire s’il y a des avancées sur le fond du dossier", indique-t-il. "Le plus important est de dire que l’incompréhension est très grande entre l’enseignement catholique et l’autorité publique. Bien sûr, le SeGeC espère qu’on pourra négocier ces montants dans de bonnes conditions."
Etienne Michel attend une répartition des budgets qui puissent permettre à tous les bâtiments scolaires de pouvoir relever le défi énergétique. "Toutes les écoles, officielles ou libres, vont devoir atteindre des objectifs de neutralité carbone en 2035-2040."
"Toutes les écoles vont devoir se conformer à des règles très strictes en la matière. Nous ne sommes pas du tout opposés à l’idée de relever ce défi énergétique et climatique, mais il faut qu’on puisse le faire dans les mêmes conditions que les autres pouvoirs organisateurs, qu’ils soient officiels, subventionnés ou organisés par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Le MR s’est en tout cas déjà prononcé en exprimant son souci qu’il y ait un équilibre qui soit respecté entre les différents réseaux."
Je ne suis pas pour la guerre mais pour l'amour entre les réseaux
Que répond Frédéric Daerden?
Sur le plateau de l'émission "C'est pas tous les jours dimanche" sur RTL TVI, Frédéric Daerden (PS), le ministre en charge des Bâtiments scolaires en Fédération Wallonie-Bruxelles avait voulu jouer la carte de l'apaisement (revoir le débat en vidéo en cliquant sur ce lien).
Face à Etienne Michel, Frédéric Daerden avait confirmé ses intentions. "Un enfant est enfant! Mais 1 euro n'est pas 1 euro: mon grand chantier des bâtiments scolaires s'intéresse à tous les réseaux, même privés. Mais être équitable, c'est donner en fonction des besoins de chacun et des spécificités."
Le ministre a ajouté inciter au "rapprochement entre les réseaux pour une utilisation optimale des surfaces." "Il faut que les moyens budgétaires européens inespérés incitent au rapprochement des réseaux scolaires. Je ne suis pas pour la guerre mais pour l'amour entre les réseaux", a-t-il conclu. Il a également souligné que le budget complémentaire provenant de l'Union européenne était "quand même une bonne nouvelle."
Etienne Michel conclut que "s'il n’y a pas encore de proposition sur la table" quant à un éventuel rééquilibrage, "il y a des signes d’ouverture qui ont été donnés."