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Débat houleux sur le plan travail de Frank Vandenbroucke: faut-il sanctionner certains malades de longue durée?

 
 

En Belgique, le nombre de malades de longue durée ne cesse d’augmenter. Ils sont désormais plus nombreux que les chômeurs. Lors de la présentation du budget cette semaine, le gouvernement a laissé entendre qu’ils souhaitaient remettre au travail ceux qui le peuvent, notamment grâce à des coachs. Le but : atteindre un taux d’emploi à 80 % des personnes en âge de travailler d’ici 2030. Un projet ambitieux. Et pour ceux qui seraient de mauvaise volonté, de légères sanctions financières pourraient être appliquées.

En Belgique, il y a plus de malades longue durée que de chômeurs. Et pour y remédier, lors de la présentation du budget fédéral, le gouvernement a annoncé prévoir des sanctions financières pour les malades de mauvaise volonté qui boycottent la procédure censée les ramener au travail. Ainsi, avec le nouveau plan travail proposé par Frank Vandenbroucke, les malades qui refusent de répondre à un questionnaire ou de se rendre à un rendez-vous pourront perdre 2.5% de leur indemnité. C'est le point le plus polémique de ce nouveau plan travail.

Pour en débattre, Frank Vandenbroucke, Vice-Premier ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, Sophie Merckx, députée fédérale PTB, et Marina, une malade de longue durée depuis 3 ans après avoir été tombée gravement malade, étaient sur le plateau de "C'est pas tous les jours dimanche". 

"On va donner des sanctions aux malades (...) une ligne rouge est franchie"

Aujourd'hui, en Belgique, il y a plus de personnes qui souffrent de maladies de longue durée que de personnes au chômage, c'est un constat: 471.000 malades de longue durée contre 366.000 chômeurs complets indemnisés. Pour Sofie Merckx, le nouveau plan travail a franchi "une ligne rouge" en ne s'attaquant pas au réel problème: "S'attaquer aux victimes plutôt qu'aux causes, c'est une ligne rouge qui est franchie", a-t-elle débuté sur le plateau de "C'est pas tous les jours dimanche". 

"Il faut d'abord comprendre pourquoi il y a une augmentation des malades de longue durée. Il y a deux causes: d'un côté, les gens ne peuvent plus prendre la prépension. Sur les dernières années, il y a plus de 73.000 personnes qui n'ont pas pu prendre la prépension, et on a, sur les mêmes années, 55.000 personnes qui sont tombés malades. Et d'un autre côté, on a la charge de travail qui est de plus en plus élevée. Regardez ce qu'il se passe à Lidl, le personnel est en grève, des gens là-bas tombent malades. Au bout d'un moment, on a des gens qui sont mentalement et physiquement épuisés par le travail. C'est à ces causes là qu'il faut s'en prendre", a martelé la députée fédérale. 

"Là, on va donner des sanctions aux malades. Sur le terrain, je constate que certaines personnes veulent reprendre le travail mais on ne leur propose pas de travail adapté", ce qui les empêche de retourner travailler, explique-t-elle. "On s'y attendait pas, la vraie solidarité c'est d'avoir du respect pour les gens qui tombent malades, de les aider et de ne pas les pourchasser en les faisant passer pour des profiteurs", a-t-elle terminé avant que Frank Vandenbroucke ne lui réponde. 

Un formulaire sera envoyé aux malades pour tenter de vérifier s'ils fraudent ou non, mais ce formulaire existe-t-il déjà ? 

"Tout à fait d'accord qu'il faut s'attaquer aux causes, mais aussi à un niveau individuel. C'est pour ça qu'on va demander à certains malades de longues durées de fournir des informations qui vont au-delà de l'aspect médical, des informations sur leur lieu de travail, pour mieux pouvoir les aider. C'est ça qu'il manque, il n'y a pas d'aides concrètes", a répondu le Vice-premier ministre, défendant son plan travail. 

Et que se passera-t-il si ces personnes ne répondent pas? "Ils seront contactés par téléphone et on leur dira qu'on n'a pas reçu le formulaire, et on leur demandera s'ils ont besoin d'aide pour le remplir. Puis, s'il n'y a pas de réponses, ils vont être invités pour en parler. Et s'il n'y a aucune réponse, je trouve cela absolument normal qu'il y ait une certaine sanction", a expliqué Frank Vandenbroucke. 

Une explication que Sofie Merckx n'a pas jugée suffisante: "Le fameux questionnaire existe déjà et il est déjà envoyé aux gens ! Et donc, aujourd'hui, il faut quand même se rendre compte qu'un tiers des malades de longues durées sont des malades psychologiques. Et le questionnaire qui est actuellement envoyé aux malades, pose ce genre de question : 'vous sentez vous coupable par rapport à votre maladie?'"

La députée fédérale n'a même pas le temps de finir son idée que Frank Vandenbroucke l'interrompt: "Non, non ! C'est des fantaisies! Des mensonges!", a-t-il répété tout en haussant le ton de la voix. 

Et pourtant, il semblerait que ce formulaire soit déjà envoyé aux malades de longue durée, avec des questions pour le moins culpabilisantes, remettant ainsi en question leur bonne volonté. Pour rappel, 37% des malades de longues durées souffrent de dépression ou de burn-out. Sofie Merckx peut donc enfin finir son propos après une intervention de Christophe Deborsu: "Hier, j'ai eu un psychologue qui m'a expliqué qu'il soignait un patient qui souffre de burn-out. Et suite à ce questionnaire, cette personne a fait un pas en arrière et s'est sentie davantage coupable", explique-t-elle. 

Une situation déjà vécue par le passé lorsque le gouvernement a voulu réduire le nombre de chômeurs, explique la députée fédérale PTB: "Quand on a commencé la chasse aux chômeurs, on a dit aussi 'on va uniquement supprimer ceux du chômage qui fraudent et ne veulent pas collaborer'. Mais ensuite, on a vu les résultats: 55.000 exclusions de personnes qui étaient totalement en ordre", met-elle en garde.  

"Je ne peux pas reprendre le travail en raison de ma santé, que vais-je devenir?", s'interroge Marina, une malade longue durée 

Marina a 54 ans, elle est en congés maladie depuis maintenant 3 ans. Par le passé, elle travaillait dans une société qui donnait des cours de secourisme en entreprise. Mais en 2018, son quotidien bascule: Marina apprend qu'elle souffre d'un cancer du sein. Puis comme si le sort s'acharnait sur elle, quelques mois plus tard, on lui diagnostique un cancer de la peau. Depuis, Marina ne peut retourner au travail à cause de son état de santé. Une situation difficile.

"Si je le pouvais, j'aimerais retourner travailler", dit Marina d'une petite voix, avec presque les larmes aux yeux. "J'ai énormément de mal qu'on mette tous les malades dans le même sac, il faut faire attention aux gens qui sont réellement malades, comme moi, on ne profite pas tous du système", a-t-elle dit en s'adressant a Frank Vandenbroucke. 

Marina craint de perdre des aides, alors qu'elle peine déjà à joindre les deux bouts: "Le problème aujourd'hui, c'est que je vois qu'on aide tout le monde. Et nous les malades, j'entends jamais qu'on va nous aider. Je vis seule, je dois payer mon loyer seule à 650 euros, la garde d'électricité, etc alors que je reçois de la mutuelle entre 1200 et 1300 euros".

Depuis 3 ans, le quotidien de Marina, c'est sa maladie. Et même lorsqu'elle essaie de penser à autre chose, la réalité la rattrape: "Mon oncologue m'a dit de penser à me soigner et de ne plus penser à ma maladie, mais je suis obligée d'y penser, je dois toujours me justifier. Au niveau des assurances, il faut toujours se justifier pour pouvoir toucher 1 franc donc c'est très difficile et fatiguant", a-t-elle terminé. 


 

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