Accueil Actu

"Il ne faut pas donner de pain aux canards car à la longue ça déforme leurs ailes", prévient Anne: des spécialistes lui donnent raison

"Pendant cette vague de froid, il ne faut pas donner de pain aux canards, car à la longue, ça déforme leurs ailes et ils ne savent plus voler", nous envoyait Anne, via le bouton orange Alertez-nous, il y a quelques semaines. En faisant quelques recherches, elle a pris connaissance du phénomène d'"ailes d'ange" chez les oiseaux, et s'est ravisée: "J'allais acheter exprès un pain pour eux, en croyant bien faire, maintenant, je m'abstiens!".

De manière générale, le pain est une alimentation non adaptée, non seulement pour les canards, mais pour tous les oiseaux, explique Pauline Legrand de la LRBPO (Ligue royale belge pour la protection des oiseaux), et ce pour plusieurs raisons: "Quand il n’est pas ingéré par les animaux, le pain va moisir dans l’eau: cela peut induire une prolifération des algues, et causer une maladie qui s’appelle l’aspergillose. Cela va aussi dérégler l’écosystème aquatique: c’est donc mauvais pour toute la faune aquatique, également les poissons".


Des carences...

En termes d'apports nutritifs, le pain, c'est aussi loin d'être idéal pour l'oiseau en lui-même: "Le pain, c’est très salé, donc pour un animal qui n’a pas l’habitude de manger du sel, ça va l’inciter à boire. Or, le pain a tendance à gonfler avec l’eau, et peut ainsi encombrer le tube digestif et entraîner des maladies. Une fois que ce pain est gonflé, cela cause une fausse sensation de satiété. Il ne va plus manger autre chose… et développer des carences. Car le pain est très pauvre en nutriments importants, notamment en phosphore, calcium, vitamine D, qui sont essentiels dans le processus de formation osseuse".


...et des apports inadaptés

Cette carence, couplée à un apport plus élevé en protéines et glucides (le pain en contient beaucoup), va provoquer le fameux phénomène d'"ailes d'ange" évoqué par Anne: "La masse corporelle va croître plus vite que la croissance osseuse (de par l'apport en protéines et glucides). Le poids des plumes va devenir trop important, elles vont grandir beaucoup trop vite par rapport à l’articulation, et cela va générer une contrainte importante sur l’articulation des ailes, qui se tournent vers l’extérieur. Les plumes ne peuvent plus être maintenues contre le corps de l’animal, et cela le prive de sa capacité à voler, alors que c’est sa défense en cas de danger, son espérance de vie est donc limitée", précise Pauline Legrand, qui précise que seulement quelques jours de comportement alimentaire inadapté peuvent avoir de grosses répercussions sur le bien-être de l'animal. "S'il est jeune et pris à temps, on peut arriver à le soigner. Mais si c'est un adulte qui a fini sa croissance, c'est incurable".


Photo: Wikipedia Cengland0 


"La nourriture pour les humains n’est pas adaptée pour des animaux"

Comme nous l'avions déjà écrit dans un précédent article, de nombreux règlements communaux interdisent de nourrir les animaux sauvages dans les espaces publics, et ce, essentiellement pour éviter de perturber l'équilibre naturel, mais aussi pour des raisons sanitaires. De façon générale, pour la santé des oiseaux, la ligue préconise de ne pas leur refiler nos restes: "La nourriture pour les humains n’est pas adaptée pour des animaux sauvages. Le riz aussi, il va gonfler s’il n’est pas cuit, ou collant s’il est cuit. Il peut aussi encombrer le tube digestif".

Cependant lorsqu'il gèle ou qu'il neige, les oiseaux ont un apport très limité en nourriture et une petite aide, réfléchie, peut être la bienvenue. La ligue pour la protection des oiseaux préconise les végétaux verts, comme les salades ou les restes de petits pois. Pour ce qui est des graines, il faut privilégier les mélanges: "Il faut éviter de donner une seule nourriture qui risque de ne pas combler des besoins nutritionnels, donner des choses qui sont variées".


"Il faut éviter de les rendre dépendants de l’homme"

Mais attention, il n'est utile de nourrir des oiseaux que pendant les périodes de gel où la nourriture se raréfie fortement: "Il faut éviter de les rendre dépendants de l’homme, parce que ça reste des animaux sauvages qui sont autonomes", dit Pauline Legrand. Au lieu de donner de la nourriture, quand c'est possible, mieux vaut plutôt favoriser des habitats naturels favorables aux oiseaux, si vous en avez la possibilité: "Le meilleur moyen, c'est de planter des arbres et des haies dans les jardins : le houx, la symphorine, le sureau. Le chêne est aussi intéressant, car il y aura toutes sortes d'espèces d’insectes dans l’arbre qui serviront de nourriture à l'oiseau. C'est plutôt conseillé d'adopter un bon comportement en matière de gestion de son environnement, et les oiseaux viendront se servir par eux-mêmes". 

À lire aussi

Sélectionné pour vous