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Philippe Ledent, chief economist chez ING, était l’invité de 7h50 au micro de Fabrice Grosfilley. Les inquiétudes actuelles pour l’économie mondiale ont ainsi été abordées avec une guerre en Ukraine qui dure. Est-on à la veille d'une grande crise économique?
"On est dans une période difficile. Il ne faut pas oublier que la covid a été un énorme choc sur le plan économique. On sortait la tête hors de l'eau et maintenant, la guerre en Ukraine impacte assez fortement les économies européennes par les prix des matières premières, de l'énergie et l'inflation. Cela va durer probablement. Il y a également des chocs plus structurels sur l'économie, toute la lutte contre les changements climatique, le vieillissement de la population... On est dans une période qui n'est pas la plus sereine sur le plan économique. Est-ce que ça veut dire que cela va devenir un cocktail détonnant ? Pas nécessairement."
D'autres spécialistes parlent d'une crise à venir d'une ampleur qu'on ne soupçonne pas encore. "Si on laisse aller les choses, qu'on ne fait rien, et qu'on continue de tirer la couverture vers soi, dans une période dans laquelle chacun veut sortir gagnant au détriment des autres, avec des tensions sociales et politiques, ça peut devenir une période compliquée."
Face à un choc énergétique, avec l'Union européenne qui cherche à se passer du gaz et du pétrole russe, quelle sera la répercussion sur notre économie et le pouvoir d'achat ?
"Il faut le comprendre très simplement. Quand on paie notre énergie plus chère, cela correspondant à un appauvrissement généralisé. La seule porte de sortie, c'est si nous exportions également quelque chose dont le prix augmenterait aussi vite que nos importations, ce qui n'est pas le cas."
Et d'ajouter: "Donc on génère de l'activité économique pour payer ces importations plus chères, donc on ne sait pas faire autre chose avec ces moyens. Nous nous sommes donc appauvris. Et actuellement, on est encore dans cette période durant laquelle on pense qu'on va pouvoir reporter la facture sur les autres (les entreprises sur les particuliers, et les particuliers qui comptent sur l'Etat). Dans les prochains mois, on va se rendre compte que cette vague d'inflation liée aux prix de l'énergie va effectivement demander des efforts à tout le monde. Car cela correspond en macro économie à un appauvrissement de nos économies."
Philippe Ledent annonce que l'inflation va rester dans les prochains mois et que la croissance va diminuer et s'approcher de zéro. "Durant le deuxième trimestre, on va être avec une croissance probablement négative. Le reste de l'année, ça ne sera pas grand-chose. Attention, l'inflation est la dynamique des prix, pas le niveau des prix. Que les prix de l'énergie restent élevés, ça paraît clair. Vont-ils augmenter comme ils l'ont fait, ça peut être pas. Cela veut dire que l'inflation pourrait refluer. Mais fondamentalement, on va rester avec des prix élevés dans les mois qui viennent."