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Un plan d'économiesde 2 milliards d'euros sur trois ans: Renault a annoncé la suppression de 15.000 emplois dans le monde, dont 4.600 en France où le constructeur automobile va fermer un site.
"Nous ne fermerons qu'un seul site à l'horizon 2022, sur nos 14 sites industriels en France", celui de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) dont l'activité de recyclage sera transférée à Flins (Yvelines), a précisé le président du groupe, Jean-Dominique Senard, lors d'une conférence de presse vendredi.
A Flins (2.600 salariés), l'arrêt de la production automobile est programmé vers 2024, après la fin du modèle électrique Zoe.
"Ce projet est vital", a déclaré la directrice générale Clotilde Delbos. Renault, qui souffre de surcapacités de production, avait annoncé en février ses premières pertes en dix ans, entrant affaibli dans la crise provoquée par l'épidémie de Covid-19.
"Aujourd'hui nous payons le prix d'une stratégie (...) qui pariait sur une croissance record du marché", a expliqué Mme Delbos, dans une critique implicite à Carlos Ghosn, l'ancien patron déchu, accusé de malversations financières et réfugié au Liban.
- Casse sociale -
La CFDT a dénoncé un "projet de casse sociale et de désindustrialisation",affirmant qu'elle "se fera entendre par tous les moyens possibles".
La CGT a déploré une "stratégie assez suicidaire" tandis que la CFE-CGC a dit "son incompréhension et son désaccord", regrettant un "manque de dialogue social".
Le constructeur aux cinq marques (avec Alpine, Dacia, Lada et Samsung Motors) compte supprimer 8% de ses effectifs mondiaux (180.000), avec des départs volontaires et des départs à la retraite non remplacés, sans aucun licenciement.
Une centaine de personnes, dont des élus locaux, se sont rassemblées vendredi matin devant l'usine de Choisy. "Pour nous c'est un double choc. Déjà on apprend la nouvelle des difficultés de Renault dans les médias, puis, là on dit qu'on va fermer pour aller à Flins", a témoigné Antonio Perez, 52 ans, un des 260 salariés du site.
L'avenir de Fonderie de Bretagne (près de 400 salariés) à Caudan (Morbihan), est soumis à une "revue stratégique". Même chose pour l'usine de Dieppe (400 salariés également), en Seine-Maritime, pour laquelle Renault réfléchit à "une reconversion, à la fin de la production de l'Alpine A110".
La direction de la Fonderie de Bretagne et la CGT ont annoncé vendredi à Lorient que l'usine de Caudan ne fermerait pas, face à des employés parfois en pleurs.
Dans le Nord, la production des utilitaires électriques Kangoo devrait être transférée de Maubeuge à Douai qui héritera d'une nouvelle plateforme. L'usine de Maubeuge est a l'arrêt depuis vendredi matin, a indiqué à l'AFP l'intersyndicale (CGT, CFDT, CFTC, CFE-CGC, Sud) qui a appelé à la grève.
A l'international, Renault prévoit la "suspension des projets d’augmentation de capacités prévus au Maroc et en Roumanie". Il étudie "l'adaptation des capacités de production en Russie et la rationalisation de la fabrication de boîtes de vitesses dans le monde".
La réduction de l'outil industriel représente environ un tiers des économies prévues. Le reste proviendra de la rationalisation des activités d'ingénierie, avec notamment une réorganisation du technocentre de Guyancourt (Yvelines) et des coupes dans les frais généraux et marketing.
Vendredi, l'action Renault accusait la plus forte baisse de la Bourse de Paris en dévissant de 7,74%.
- Pression politique -
Le plan coûtera 1,2 milliard d'euros pour environ 2,15 milliards d'économie annuelle.
Le président de la République Emmanuel Macron avait réclamé mardi "des garanties" pour l'avenir des salariés, menaçant de ne pas valider un prêt garanti par l'Etat de 5 milliards d'euros en faveur du groupe au losange. Des discussions sont prévues mardi à Bercy.
L'Etat français est le premier actionnaire du groupe avec 15% du capital.
"Notre intention est de faire de la France un centre d'excellence pour les voitures électriques et les utilitaires", a assuré Mme Delbos, promettant "un dialogue exemplaire avec les partenaires sociaux et les collectivités locales".
L'émotion suscitée par le plan d'austérité de Renault reflète les liens étroits entre le pays et le constructeur automobile, au cœur de son histoire industrielle depuis le début du XXe siècle, avec des modèles emblématiques et un ancien statut d'entreprise nationale.
Jeudi, Nissan, le partenaire japonais de Renault, avait annoncé la fermeture de son usine espagnole de Barcelone et la suppression d'environ 20% de ses capacités mondiales de production d'ici à 2023.