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La maison de prestige à Godinne, qui était à gagner pour 10 euros, a-t-elle réellement appartenu à Paul-Henri Spaak?

Une superbe demeure à Godinne était mise en lumière cette semaine. Le propriétaire avait en effet décidé de la vendre via une tombola, avant d'annuler ce jeu concours peu de temps après. Mais une information concernant ce bien étonne surtout un membre de la famille de Paul-Henri Spaak. Il doute de l’affirmation selon laquelle l’ancien ministre aurait possédé cette maison. Qu’en est-il exactement ? Nous avons mené l’enquête. 

C’est une superbe maison en bord de Meuse. Un espace de vie exceptionnel de 900 mètres carré dans un écrin de verdure. La demeure de 1710 appelée "Le Richmond" se trouve à Godinne, en région namuroise. Elle est composée de douze chambres, huit salles de bain et possède une piscine sur un terrain de 67 ares.

Le propriétaire actuel de cette villa de prestige a décidé de la vendre de façon inhabituelle, par le biais d’une tombola. Comme de nombreux médias, nous avons évoqué cette initiative insolite qui suscite l’étonnement et la convoitise. Les personnes intéressées devaient acheter un ticket à 10 euros et répondre à trois questions pour espérer gagner le gros lot, cette maison de rêve.

Cependant, le concours a finalement été annulé, alors que de nombreuses personnes ont tenté leur chance. "Nous nous sommes rendu compte rapidement que les frais d'enregistrement et de notaire étaient un frein pour beaucoup de participants", explique l'organisateur dans un mail. "Voilà pourquoi, début de semaine, j'ai décidé de les supporter. Mais voilà, trop tard, l'information de départ avait pris le dessus. Aujourd'hui, je fais malheureusement le triste compte, je ne vais pas obtenir le montant nécessaire pour couvrir l'ensemble des frais. J'ai donc décidé d'arrêter le jeu-concours et de rembourser l'ensemble des tickets", déclare-t-il.

Après l’avoir rénovée pour y habiter avec son épouse, Valère Duchenne, le propriétaire, l’a ensuite transformée en "gîte de charme". Sur le site internet de cette maison d’hôtes, il est indiqué que la prestigieuse villa était la propriété de villégiature de Paul-Henri Spaak. Une information reprise abondamment qui a visiblement surpris un descendant de l’ancien ministre. Il a contacté notre rédaction pour révéler son étonnement. 

Paul-Henri Spaak est-il réellement l’un des anciens propriétaires de cette maison ? Cette affirmation est-elle correcte ou erronée ? Un doute s’installe. 

Il y a même une fresque dans la maison à ce propos

"En réalité, quand j’ai acheté le bien il y a 27 ans, toutes les personnes de la commune et les gens du village me l’ont expliqué. C’est écrit dans des lettres communales et des vieux livres", justifie Valère Duchenne. "C’est ce qui se dit dans la vallée. Il y a même une fresque dans la maison à ce propos", assure le propriétaire, en révélant avoir été contacté également ce jour-là par quelqu’un de la famille Spaak.  

Peut-il nous confirmer que le nom de l’ancien ministre figure bien sur l’acte d'achat de sa maison ? Ce document notarié en sa possession devrait le mentionner. "Je ne sais rien dire de plus. Je suis le premier étonné par cette information. Moi, je ne suis pas de la région. Très sincèrement, les infos viennent de la commune", conclut-il, mettant un terme à la conversation. 

Nous posons dès lors la question aux autorités communales. Tout d’abord, le bourgmestre d’Yvoir Patrick Evrard reste plutôt évasif.  "Je pense que c’est le cas, qu’elle a appartenu à la famille de Paul-Henri Spaak", répond le maïeur.  

Quelqu’un de la famille Spaak a bien possédé une maison à Godinne

L’échevin en charge de l’état civil et de la population apporte, lui, plus d’éléments concernant cette incertitude. Etienne Defresne assure que Paul-Henri Spaak avait l’habitude de venir à Godinne. "Il y a en tout cas passé de fréquents séjours. C’est une certitude. Et quelqu’un de la famille Spaak a bien possédé une maison à Godinne. Mais il faudrait vérifier si c’est celle-là exactement. En-tout-cas, c’est dans le coin", révèle l’échevin. "J’avoue ne pas avoir vérifié cette info", admet Etienne Defresne. 

Les deux élus proposent de contacter un historien amoureux de la région qui pourrait détenir plus de précisions. Jacques Latour réalise des recherches sur l’évolution de l’histoire de Godinne. Il commence par confirmer la présence de la famille de l’ancien ministre dans cette partie de la commune d’Yvoir. "La famille Spaak a passé du temps à Godinne avant la seconde guerre mondiale. C’est certain. Comme dans beaucoup de villages de la vallée de la Meuse, les personnes aisées s’installaient à la campagne et les bords de Meuse étaient fort prisés. Et comme la famille Spaak était une famille aisée, qu’ils se soient installés à Godinne, ce n’est pas étonnant", estime l’historien.

Je n’ai aucune source valable pour confirmer cette rumeur

Jacques Latour relate ensuite une "rumeur" : la famille Spaak aurait jeté son dévolu sur cette "magnifique propriété unique en son genre". "On sait dans Godinne que la famille, je ne dis pas Paul-Henri, était en possession de cette maison. De notoriété publique, elle appartenait donc à une personne de la famille. Par après, je sais qu’elle est devenue une maison de repos pour personnes âgées qui s’appelait "Le Richmond". Mais je n’ai jamais consulté les archives du cadastre concernant cette propriété. Je n’ai donc aucune source valable pour confirmer cette rumeur", avoue l’historien.  

Alors, comment confirmer cette information et dissiper le doute ? Il ne reste plus qu’à se tourner vers le SPF Finances qui gère les archives cadastrales. D’après l'échevin Etienne Defresne, les actes notariés remontent jusqu’à 100 ans en arrière. Le nom de Paul-Henri Spaak devrait donc apparaître, s’il a été un jour propriétaire de cette maison...

Et la rumeur se confirme : le grand-père de Paul-Henri Spaak, prénomé Charles, a bel et bien acquis la maison en 1898 ! Selon les Archives de l'Etat à Namur, ce dernier décède en 1911 et transmet un an plus tard la maison en indivision à ses enfants. Paul Spaak, père de Paul-Henri, vent finalement le bien en 1923.

 

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