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C'est aujourd'hui qu'aura lieu aux Etats-Unis le dernier débat télévisé entre les deux candidats à la Maison-Blanche ce sera à Nashville dans le Tennessee. Ce duel s'annonce très tendu entre Donald Trump et Joe Biden à 12 jours de l'élection présidentielle. Notre invité Régis Dandoy, politologue spécialiste des élections à l'ULB (Université Libre de Bruxelles) nous offrait son expertise avant cette rencontre qui sera énormément suivie.
Luc Gilson: Leur premier débat, on s'en souvient avait eu lieu fin septembre. Il avait tourné au pugilat. Cela risque d' être encore le cas aujourd'hui?
Régis Dandoy: On apprend de ses erreurs et effectivement les journalistes et les personnes qui organisent le débat ont décidé de changer les règles du jeu. Et donc, il y aura des temps de parole qui seront limités mais surtout il y aura des micros qui seront éteints pendant que l'autre candidat est en train de s'exprimer. Au bout de quelques mots, le micro sera rouvert donc on peut encore avoir des dialogues un petit peu chauds, comme on a observé il y a quelques semaines mais on essaye, on espère enfin avoir un débat sur le fond qui va nous permettre de voir les candidats s'exprimer sur leurs propositions, leurs promesses électorales et de voir un affrontement en termes d' idées et non pas un affrontement en termes d'insultes. C'est important de ne pas avoir un affrontement en terme de positionnement un peu comme des coqs dans un poulailler. C'est important non seulement pour aiguiller certains électeurs qui hésitent peut-être entre les deux candidats et pour rassurer aussi la population sur les capacités de deux candidats à pouvoir gérer le pays.
Luc Gilson: Justement le démocrate Joe Biden est toujours en tête dans les sondages mais rien n'est encore joué dans cette élection?
Régis Dandoy: Alors on l'a vu en 2016 que les sondages ne ne font pas tout dans une élection et qu'ils peuvent se tromper. On s'attendait à une victoire d'Hillary Clinton assez facilement et on s'est rendu compte le lendemain des élections que Trump avait remporté certains États clés qu' on n'aurait pas imaginé qu' il aurait pu remporter. Aujourd'hui, on est beaucoup plus prudent par rapport à cela. Alors effectivement les sondages indiquent tous que le Biden gagnerait les élections face à Trump avec parfois, une marge d'erreur très confortable mais on apprend également de ses erreurs au niveau des sondages... Beaucoup d'observateurs sont donc assez circonspects en se disant: "On va attendre les premières indications, les sondages sortis des urnes. On va attendre d'avoir véritablement un panorama avec plus d'informations avant de pouvoir crier victoire ou défaite pour l'un ou l'autre camp.
Luc Gilson: C'est vrai qu'en ce moment Donald Trump enchaîne les meetings quant à Joe Biden, lui, il est resté pendant trois jours chez lui. C'est une différence de stratégie. Est-ce que ça peut jouer dans la campagne?
Régis Dandoy: Alors effectivement Trump est dans la négation de la sévérité de la crise de la pandémie du Covid-19 et donc il doit faire en fonction: c'est à dire qu'il n'a pas de barrières physiques pour visiter certains Etats, rencontrer les électeurs tandis que Biden, lui, est plus dans le discours qui se veut rassurant mais qui met aussi, en matière de gestion, l'accent sur la question de la santé et du Covid 19. Donc, il doit aussi montrer l'exemple. Il doit se présenter avec des masques. Il doit tout faire à distance, éviter les grands rassemblements. Donc on a vraiment deux styles différents parce qu'on a l'habitude avec Trump: il adore aller dans l'arène, galvaniser les foules, être au milieu de ces supporters. Il l' a dit il y a quelques semaines qu'il allait tous les embrasser s'ils le pouvaient.
Effectivement Biden est plus dans la retenue: c'est son style. Mais au-delà du du style il y a un enjeu clair en termes de positionnement par rapport à la santé publique et par rapport à la gestion de la pandémie.
Luc Gilson: Hier, l' ancien président Barack Obama a estimé que la démocratie ne pouvait pas fonctionner avec un président qui ment tous les jours. C' est vrai que Trump a très mauvaise presse chez nous. Comment expliquer qu'il ait autant de fans de supporters dans ce qu' on appelle l' Amérique profonde?
Régis Dandoy: Alors Trump correspond à beaucoup de standards de toute une série d'électeurs aux Etats-Unis. Il leur promet ce qu'ils veulent entendre à la fois au niveau de la sécurité, à la fois au niveau des migrations, à la fois au niveau économique. Il fait beaucoup de choses effectivement pour certaines catégories de la population. Sa stratégie est de se focaliser sur certains types d'électeurs qui pourraient potentiellement voter pour lui et de laisser toute une partie d' autres électeurs de côté. Biden a un profil beaucoup plus rassembleur. Il essaie de s'attirer les voix qui proviennent des hommes, des femmes, des Blancs, des Latinos, des Afro-Américains, etc... Tandis que Trump lui se focalise sur son électorat et essayent de lui promettre tout ce qu'il veulent entendre.
Luc Gilson: Dernière question même en cas de victoire de Joe Biden, il faut s'attendre à ce que Donald Trump conteste le résultat de l'élection ça veut dire qu'on ne connaîtrait pas début novembre le nom du nouveau président américain?
Régis Dandoy: Alors il l'a effectivement dit. On doit être prêt à cela si les élections et la situation le permettent, il va contester les élections. Alors effectivement, il faudra voir les résultats électoraux. Si on a une situation où Biden est donné clairement vainqueur avec une marge peut-être de 10% pourcent des Etats c'est incontestable. Néanmoins si dans certains états, la marge de victoire de Biden est de moins de un ou deux pourcent, il est possible à ce moment-là qu'il fasse appel à sa Légion d'avocats et mettre en oeuvre toute une série de plaintes et de recours dans les tribunaux pour contester le résultat des élections.