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Panama: le conservateur José Raul Mulino largement vainqueur de la présidentielle

Le candidat conservateur José Raul Mulino, favori des sondages et remplaçant de l'ex-président Ricardo Martinelli (2009-2014) condamné pour blanchiment et réfugié à l'ambassade du Nicaragua, a largement remporté dimanche la présidentielle au Panama.

L'avocat de 64 ans a obtenu plus de 34% des suffrages, neuf points devant son principal adversaire, le candidat de centre droit, l'ancien consul Ricardo Lombana, qui a reconnu sa défaite.

"J'ai le plaisir, au nom du Tribunal électoral, de vous informer que (...) vous avez remporté la présidence de la République" du Panama, a déclaré le président du tribunal électoral Alfredo Junca lors d'un appel téléphonique à M. Mulino retransmis en direct à la télévision.

Plus tôt, M. Lombana avait dit à ses partisans: "Je reconnais le président-élu de la République du Panama, M. José Raul Mulino" et "je lui souhaite le meilleur".

M. Mulino a lui dit recevoir ces résultats avec "responsabilité et humilité". "Je ne suis la marionnette de personne", a-t-il tenu à souligner lors d'un discours devant ses partisans.

Ne pouvant se présenter, M. Martinelli, réfugié depuis le 7 février à l'ambassade du Nicaragua avec son chien Bruno, avait désigné José Raul Mulino, son colistier pour la vice-présidence, comme son successeur.

Trois millions de Panaméens étaient appelés à élire leur président, renouveler les 71 députés du parlement monocaméral et les gouvernements régionaux dans cette élection à un tour et à la majorité simple. La participation a été élevée, à plus de 77%.

Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a adressé lundi ses félicitations à M. Mulino, citant notamment des objectifs partagés de "croissance économique durable et inclusive" et "de lutte contre l'immigration irrégulière".

L'élection intervient alors que le Panama souffre d'une corruption endémique, vient de traverser une grave sécheresse qui a réduit le trafic maritime dans son célèbre canal, moteur de son économie, et que la question migratoire est omniprésente avec l'entrée dans le pays en 2023 d'un demi-million de migrants en route vers les États-Unis à travers la redoutable jungle du Darién à la frontière colombienne.

- "Mon frère" -

L'ombre de l'ex-président Martinelli, un temps candidat à un nouveau mandat mais rattrapé par la justice qui l'a condamné à 11 ans de prison pour blanchiment, a plané sur ce scrutin.

Le milliardaire de 72 ans, est également poursuivi pour écoutes téléphoniques illégales et corruption dans le méga-scandale de l'entreprise de construction brésilienne Odebrecht.

M. Mulino a lui été ministre de la Sécurité sous le mandat Martinelli, puis ministre des Affaires étrangères et ministre de la Justice. Entre 2015 et 2016, il a été placé en détention provisoire pour corruption, avant d'être libéré pour des erreurs de procédure.

D'ailleurs, après avoir voté, M. Mulino s'est rendu à l'ambassade du Nicaragua où il a retrouvé M. Martinelli. Les deux hommes se sont salués d'une accolade chaleureuse, et échangé des "mon frère", "nous allons gagner", selon une vidéo publiée par l'équipe de campagne du parti Realizando Metas (RM), fondé par M. Martinelli.

"Préférer comme président le représentant direct d'un fugitif condamné pour corruption, c'est se prononcer en faveur de la tricherie comme mode de vie et embrasser publiquement la corruption", a déclaré le célèbre chanteur de salsa panaméen Rubén Blades, qui s'est personnellement impliqué dans la campagne.

"Le Panama doit changer, il y a trop de corruption. Nous sommes fatigués", a déclaré Jennifer Navarro, une enseignante de 50 ans, dans un bureau de vote de la capitale.

De plus, "la situation économique est très complexe", estime l'économiste Felipe Chapman. Le bilan du président sortant social-démocrate Laurentino Cortizo est miné par un déficit de 7,2% et une dette publique de 50 milliards de dollars.

Le futur président et son gouvernement devront faire face à des prévisions économiques en berne avec une croissance chutant de 7,3% en 2023 à 2,5% en 2024, selon le Fonds monétaire international (FMI). Des milliers d'emplois ont été perdus avec la fermeture de la plus grande mine de cuivre à ciel ouvert d'Amérique centrale sur fond de manifestations environnementales et de polémique autour du contrat de concession.

Et le canal de Panama, par lequel transite environ 6% du commerce maritime mondial, a dû limiter son trafic en raison d'une sécheresse qui a vidé les lacs d'alimentation en eau douce des écluses et remet en question sa pérennité.

Et dans un pays dont le PIB par habitant est l'un des plus élevés d'Amérique latine, le Panama "reste l'un des pays les plus inégalitaires au monde", selon un rapport de la Banque mondiale.

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