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Dans une campagne électorale marquée par des thèmes clivants tels que l'immigration et l'avortement, les électeurs américains se trouvent à un carrefour. Entre les partisans fervents de Donald Trump, qui prônent un renforcement des frontières, et ceux de Kamala Harris, déterminés à défendre le droit à l'avortement, chaque bulletin de vote pourrait s'avérer décisif dans un climat politique de plus en plus tendu.
Donald Trump ou Kamala Harris, certains ont déjà fait leur choix. Parmi les sujets majeurs de cette campagne : l'immigration et l'avortement, deux thèmes qui divisent plus que jamais les électeurs. "Trump doit reprendre les choses en mains et faire ce qui est juste pour notre pays", déclare une supportrice du candidat républicain. "Il est important que le pays entier voie que les habitants d'Arizona vont se battre pour le droit à l'avortement", indique un soutien de Kamala Harris. Avec plus de 15 % d'indécis, tout peut basculer, même la démocratie.
L'immigration vue comme un danger, ou une opportunité
John, 68 ans, est propriétaire d'un ranch dont le domaine touche la frontière entre l'Arizona et le Mexique. Lorsqu'il longe le mur construit par Donald Trump, décrit comme infranchissable, il se sent trahi. "Tout le monde peut rentrer aux États-Unis. On ne sait pas qui sont ces gens. Et le gouvernement s'en fiche", explique John. Sur le mur, les dates auxquelles les barrières ont été cassées sont inscrites. Pour John, ce fameux mur n'est qu'une passoire. "À l'intérieur de la barrière, il y a du ciment. Donc, une fois qu'ils ont scié, ils cassent le béton avec une masse." Cet éleveur explique qu'à chaque fois que les migrants passent, ils font peur à ses vaches, qui perdent du poids. Et lui, perd de l'argent.
Dans cet État, le flux de migrants est passé de 16 % en 2020 à 35 % en 2024. "Quand Donald Trump était président, la frontière était surveillée. Mais avec Biden, c'est complètement hors de contrôle", poursuit l'éleveur.
À 160 km de là, Tray et son fils Kyle sont fiers de leur mode de vie. Pour eux, ceux qui franchissent la frontière sont des menaces potentielles, voire des criminels. "Avec le mur, Trump a montré qu'il avait la solution. Ce n'est pas pour autant qu'il est anti-humanitaire. Il essaie de protéger le pays."
Sans cette main-d'œuvre, nous devrions arrêter
Cette fois, c'est à Lincoln, dans le Nebraska, que nous nous rendons, à 1600 km au nord de l'Arizona. Dans cet État, se trouve une usine Kawasaki. Environ 30 % de la main-d'œuvre est constituée de travailleurs immigrés. "Si nous n'avons pas cette main-d'œuvre, nous devrions arrêter le travail, refuser des commandes ou fabriquer ailleurs, dans un autre pays", déclare le chef d'usine. Ces travailleurs viennent du Mexique, du Nicaragua ou encore du Guatemala. Le Nebraska est leur nouvel El Dorado. "Nous aimons le calme, l'absence de bouchons, le coût de la vie et le faible taux de criminalité", explique un travailleur immigré. Une autre ajoute : "Je suis partie de zéro à faire des câbles, j'ai eu des difficultés avec l'anglais. Mais avec le temps, on apprend au fur et à mesure."
À Lincoln et dans les villes aux alentours, il y a plus de 80 000 postes à pourvoir. Cours d'anglais, logements, tout est fait pour attirer les étrangers. "Que vous soyez républicain ou démocrate, je pense que nous sommes tous d'accord sur le fait que le système de visa est défaillant. Il faut mettre en place un processus permettant aux gens de venir dans ce pays, d'être contrôlés, d'avoir des papiers et de bénéficier de la même qualité de vie que nos grands-parents lorsqu'ils sont arrivés."
L'avortement, une thématique qui divise
Direction Atlanta en Géorgie, un État très chrétien. Depuis 2023, l'avortement est limité à 6 semaines. De quoi satisfaire les évangélistes, dont 75 % d'entre eux votent pour Donald Trump, mais ne sont pas dupes. "Je pense que les candidats disent qu'ils font partie de notre mouvement pour obtenir nos votes, mais ils ne regardent pas ce qu'il se passe vraiment dans leur vie", indique une électrice.
Dans la famille Thomson, composée de 8 enfants, la Bible est leur guide. Pour eux, la fin de la protection fédérale de l'avortement est une victoire de Trump. "J'apprécie l'annulation par la Cour suprême de l'arrêt Roe v. Wade qui protège l'avortement. Et ça, c'est Trump, et je le remercie pour ça", indique le chef de famille. "J'ai toujours voté républicain parce que je ne suis pas d'accord avec l'avortement", ajoute la mère de famille.
Nous ne sommes plus en 1800
Pour Lise, cette campagne électorale est une question de survie. Elle parcourt inlassablement ce quartier résidentiel de Phoenix, en Arizona. "On fait signer une pétition pour voir si les gens sont prêts à signer pour l'avortement." En effet, l'Arizona vient d'interdire l'avortement, revenant à une législation vieille de 160 ans. "Nous ne sommes plus en 1800", "Je ne pense pas que la rhétorique incendiaire soit aussi répandue qu'on le dit", déclarent ces défenseuses du droit à l'avortement.
Le risque des émeutes
Mais à un mois des élections, les États-Unis ne risquent-ils pas de revivre les émeutes d'il y a trois ans ? Adrian, qui est en charge d'organiser le scrutin en Arizona, se méfie des faux contenus générés par l'intelligence artificielle. "Ce qui me préoccupe avec cela, c'est la capacité et la rapidité à laquelle ces faux messages se propagent."
Les rumeurs sont un véritable fléau. Même les candidats républicains subissent des pressions. C'est le cas de Stephen. Il a été menacé de mort pour le simple fait de réfuter des mensonges. "On a eu la police devant chez nous. On vous hurle dessus, on vous crache dessus", déclare l'élu de 39 ans. Il est chargé de s'occuper des bulletins et des machines à voter. Il reçoit des membres d'un club de femmes républicaines pour les convaincre que l'élection est sous contrôle. "On ne sait plus ce qui est exact ou non. C'est pour cela que je suis ici, car les règles n'ont pas été respectées la dernière fois."
Tout va donc se jouer à quelques bulletins de vote.