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La pression internationale s'intensifie sur Israël pour renoncer à une offensive à Rafah ou la différer

Israël restait mardi sous une forte pression internationale pour renoncer ou au moins reporter une offensive sur Rafah, dernier refuge pour plus d'un million de Palestiniens dans la bande de Gaza.

Israël a libéré lundi deux de ses otages détenus par le Hamas à Rafah, à la frontière avec l'Egypte, lors d'une opération commando nocturne accompagnée de bombardements qui ont fait une centaine de morts, selon les autorités du mouvement islamiste palestinien, au pouvoir à Gaza depuis 2007.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a récemment ordonné à son armée de préparer une offensive sur Rafah, où sont massés 1,4 million de Palestiniens selon l'ONU, soit plus de la moitié de la population totale du territoire, la plupart ayant fui la guerre qui fait rage depuis quatre mois entre Israël et le Hamas.

Il a répété lundi sa détermination à poursuivre "la pression militaire jusqu'à la victoire complète" sur le mouvement islamiste palestinien, dont Rafah est le "dernier bastion", pour libérer "tous nos otages".

Les Etats-Unis, principal allié d'Israël, insistent sur leur opposition à une opération à grande échelle sans solution pour les civils coincés à la frontière fermée avec l'Egypte à l'extrême sud du territoire.

Le président américain Joe Biden a réclamé, de la part des forces israéliennes, un plan "crédible" pour épargner la population palestinienne, en préalable à toute offensive, lors d'une rencontre lundi à la Maison Blanche avec le roi de Jordanie Abdallah II.

Le monarque, dont le pays est le deuxième Etat arabe à avoir signé un traité de paix avec Israël, en 1994, est allé plus loin.

"Nous ne pouvons pas nous permettre une attaque israélienne sur Rafah", où la situation humanitaire est déjà "insupportable", a dit Abdallah II, qui a également appelé à "un cessez-le-feu durable immédiatement" dans la bande de Gaza.

"Les Etats-Unis travaillent à un accord de libération des otages entre Israël et le Hamas, qui amènerait immédiatement une période de calme d'au moins six semaines à Gaza", a pour sa part indiqué le président américain, dont l'administration rejette toujours une trêve inconditionnelle et à durée indéterminée.

Cette période pourrait déboucher sur "quelque chose de plus durable", a ajouté Joe Biden.

- 128 jours de captivité -

La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent de commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d'Israël, qui a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils tués ce jour-là, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.

En représailles, Israël a juré de "détruire" le mouvement islamiste qu'il considère comme une organisation "terroriste", de même que les Etats-Unis et l'Union européenne.

L'offensive israélienne a fait 28.340 morts dans la bande de Gaza, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas.

Le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant a qualifié de "tournant" dans la guerre l'opération qui a permis la libération de Fernando Marman, 60 ans, et Luis Har, 70 ans, deux Israélo-Argentins enlevés le 7 octobre dans le kibboutz Nir Yitzhak, y voyant la preuve que le Hamas était "vulnérable".

L'état des deux ex-otages est stable mais après 128 jours de captivité, ils montrent des "signes évidents" de "manque de soins médicaux", selon une porte-parole de l'hôpital proche de Tel-Aviv où ils ont été admis et ont retrouvé leurs proches.

"Nous sommes heureux aujourd'hui mais nous n'avons pas gagné. Ce n'est qu'une étape de plus vers le retour à la maison" des otages détenus à Gaza, a confié Idan Bejerano, le gendre de Luis Har, faisant écho aux familles qui pressent le gouvernement d'accepter un nouvel accord de trêve avec le Hamas.

Selon Israël, 130 otages sont toujours détenus à Gaza, dont 29 seraient morts, sur environ 250 personnes enlevées le 7 octobre. Une trêve d'une semaine en novembre avait permis la libération de 105 otages en échange de 240 Palestiniens détenus par Israël.

- "Déplacement forcé" -

Face aux craintes internationales d'une offensive militaire majeure, M. Netanyahu a affirmé dimanche qu'Israël assurerait "un passage sécurisé" à la population pour quitter Rafah, sans préciser où elle pourrait aller.

"Ils vont évacuer" les Palestiniens. "Où ? Sur la Lune ?", s'est interrogé à Bruxelles le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell.

L'ONU ne s'associera pas à "un déplacement forcé de population" à Rafah, a pour sa part prévenu le porte-parole du secrétaire général de l'organisation.

La perspective d'une offensive est "terrifiante", s'est alarmé de son côté le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Volker Türk, tandis que le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) Karim Khan s'est dit "profondément inquiet" du sort des civils.

Le Hamas a prévenu dimanche qu'une offensive sur Rafah "torpillerait" tout accord sur les otages, alors que des pourparlers sur une nouvelle trêve sont menés par l'Egypte et le Qatar. Le directeur de la CIA, Richard Burns, est attendu mardi au Caire pour poursuivre les discussions, selon des sources proches du dossier.

Le département d'Etat américain a fait miroiter les bénéfices "énormes" d'un tel accord, à la fois en termes de libérations d'otages, mais aussi d'accès de l'aide humanitaire à Gaza.

Environ 1,7 million de personnes, d'après l'ONU, sur un total de 2,4 millions d'habitants, ont fui leur foyer depuis le 7 octobre dans le territoire palestinien assiégé par Israël et plongé dans une crise humanitaire majeure.

Rafah, devenue un gigantesque campement, est le principal point d'entrée de l'aide humanitaire, insuffisante pour répondre aux besoins de la population qui vit, selon le Programme alimentaire mondial (PAM) dans des "conditions proches de la famine".

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