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Dans l'effervescence d'un quartier branché de Beyrouth, les éclats des rires d'Elie et son ami, attablés pour dîner, se mêlent au brouhaha des bars voisins, loin des violences à la frontière avec Israël, qui font craindre une "guerre totale".
"J'ai quarante ans, et chaque année, on nous dit que la guerre éclatera cet été", déclare à l'AFP ce conseiller financier à la barbe poivre et sel, devant un bar de la capitale libanaise.
"Ce que l'on voit dans la rue est différent de ce que l'on entend dans les médias", confie-t-il. "Ce que rapporte la presse à l'étranger laisse penser que le Liban est en état de guerre."
Depuis le début de la guerre le 7 octobre entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza, le Hezbollah libanais qui soutient le mouvement islamiste palestinien, échange quotidiennement des tirs à la frontière entre le Liban et Israël.
Les tensions exacerbées à la frontière israélo-libanaise ces derniers jours font craindre une extension du conflit.
Le chef de la diplomatie israélienne Israël Katz a menacé le Hezbollah de destruction à l'issue d'une "guerre totale" et l'armée israélienne a approuvé des "plans opérationnels pour une offensive au Liban".
Le lendemain, le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah a averti qu'"aucun lieu" en Israël ne serait épargné par les missiles de son mouvement en cas d'attaque contre le Liban.
Mais si le risque d'une escalade revient parfois dans les discussions, il ne semble pas inquiéter pour autant les fêtards de Mar Mikhaël.
Dans ce quartier chrétien connu pour ses cafés et ses bars qui s'animent de lumières colorées, les verres s'entrechoquent et les clients dansent au rythme des derniers hits arabes et occidentaux remixés à plein volume par les DJ.
"C'est le Liban et c'est notre histoire. Rien ne change. On a bien survécu à la guerre de juillet", dit Elie, en référence à une guerre dévastatrice qui a opposé le Hezbollah à Israël à l'été 2006.
Selon lui, "durant toutes les crises passées, les gens ont continué à veiller tard, que ce soit pendant la pandémie de Covid-19 ou l'explosion au port de Beyrouth" à l'été 2020, qui a accéléré l'effondrement d'une économie libanaise déjà exsangue depuis 2019.
- "On s'en remet à Dieu" -
A quelques kilomètres de là, des Libanais ont emmené leurs enfants à un festival organisé dans le centre de Beyrouth, jusque tard dans la nuit.
"Malgré toutes les menaces, on est un peuple qui aime la vie", confie à l'AFP Abir Atallah, au milieu des rires des enfants devant l'estrade.
Bien que, selon l'ONU, 95.000 Libanais ont été déplacés par le conflit à la frontière avec Israël, le spectre de la guerre n'empêche pas les Libanais des autres régions de poursuivre leur vie normalement.
"On vit au jour le jour. Certes, les gens ont peur, mais on s'en remet à Dieu", avoue Mira Makhlouf, qui vend des jouets pour enfants.
"Les Libanais aiment faire la fête", déclare-elle, soulignant qu'elle n'a pas l'intention de quitter le Liban en cas de guerre à grande échelle.
Si des grands festivals qui se tiennent chaque été au Liban ont été annulés cette année en raison de la situation dans le sud du pays, certains organisateurs ont choisi de maintenir leur programmation.
Et les chanteurs arabes affluent au Liban pour se produire, comme en atteste récemment le concert à Beyrouth de la star égyptienne Amr Diab, qui a réuni plus de 20.000 personnes mi-juin.
Les expatriés continuent d'affluer pour la saison estivale, même si plusieurs pays ont à nouveau déconseiller à leurs ressortissants de se rendre au Liban.
"Je ne pense pas qu'une guerre puisse éclater, et on n'a pas peur. Autrement, on ne verrait pas toute cette foule", déclare Nayla Haddad, en marge du festival.
"Toutes les deux semaines, on organise un festival dans un endroit différent", confie-t-elle, tout sourire.