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Une septuagénaire a été condamnée vendredi à huit ans de prison ferme avec mandat de dépôt par la cour d'assises de Charente-Maritime pour avoir tenté, il y a quatre ans, de tuer son mari qui s'apprêtait à la quitter.
"Vous aviez l'intention de tuer votre mari", a expliqué le président Franck Wastl-Deligne lors du prononcé du verdict. "La cour a rendu la peine la plus juste, en tenant compte de l'absence d'antécédent judiciaire et des difficultés dans votre vie. Mais la cour estime que vous n'avez pas encore pris conscience des faits en totalité", a-t-il dit.
La nuit du 6 au 7 mars 2018, après 47 ans de vie commune, Nicole avait porté deux coups de couteau à Bernard, 73 ans aujourd'hui, à leur domicile de Saint-For-Sur-Gironde, près de Saintes où le procès se tenait depuis jeudi. Depuis quelques mois, il fréquentait une maîtresse, pour laquelle il devait quitter sa femme le lendemain.
Le soir des faits, le couple avait eu une dernière relation intime. L'épouse aurait ensuite quitté le lit pour aller prendre un gros couteau dans la cuisine et revenir frapper son mari au thorax.
L'accusée a affirmé qu'elle voulait au départ se suicider, puis que son époux "parte avec elle": elle s'est entaillé les poignets après que ce dernier, blessé, eut échappé à ses coups. A la barre jeudi, elle a évoqué "un geste de désespoir".
Pour l'avocate générale Cécile Diard, l'accusée "n'a pas cessé d'être fluctuante tout au long de la procédure". Ecartant la préméditation, elle a retenu la "détermination" de l'épouse par rapport à la "trahison" de son mari qui la trompe.
"Elle se rend chez le notaire pour supprimer la donation au dernier vivant, elle annule les procurations bancaires. C'est la peur de l'abandon qui lui fait dire: +Non, il partira avec moi+", a considéré la magistrate.
"Elle porte deux coups. Elle va dans la chambre de sa fille (handicapée, qui vit alors chez eux, NDLR) et lui arrache le téléphone des mains pour l'empêcher d'appeler sa sœur. Elle savait très bien ce qu'elle faisait. Elle a visé le cœur", a poursuivi l'avocate générale.
"C'est une femme mais la parité doit être le maître-mot. Ça ne doit pas entrer en ligne de compte", a ajouté la magistrate, enjoignant les jurés à ne pas être "influencés" par l'âge de la mise en cause, 70 ans.
Pour le conseil de cette dernière, l'affaire est "atypique". "Mais les réquisitions sont prises comme s'il s'agissait d'un dossier ordinaire", a regretté Me Francesca Satta. "C'est une victime qui veut pas que sa femme aille en prison. Quatre ans plus tard il proclame son amour, c'est rarissime", a-t-elle souligné.
A la barre, son mari a estimé que s'il "n'étai(t) pas parti, rien de tout ça serait arrivé" et a affirmé vouloir "retourner chez (lui) avec (s)a famille et (s)a femme".
"Elle est le pilier central de la famille mais avant tout c'est un être humain et elle a craqué. On a le droit de s'effondrer", a poursuivi Me Satta.
"On a le droit de commettre une erreur même aussi catastrophique. Est-ce que ça fait de la personne une criminelle? Est-ce qui ne serait pas normal de lui donner une troisième chance? Celle de se dire qu'elle peut continuer à vivre dehors sans être un danger pour son conjoint?", a-t-elle interrogé, précisant que Nicole avait écrit "une lettre de pardon, de repentance" envers Bernard.