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Plusieurs milliers de personnes ont défilé en silence mercredi à Romans-sud-Isère derrière de grandes banderoles "Thomas, on t'aime", "Justice pour Thomas", en hommage au lycéen de 16 ans décédé dimanche de blessures reçues en marge d'un bal dans le petit village de Crépol.
En tête de cortège, une quinzaine de jeunes du club de rugby du RC Romans Péage ont marché avec les maillots bleus du club barré d'un "Thomas repose en paix", en mémoire de leur jeune capitaine. Les sportifs ont formé une haie d'honneur à l'arrivée du cortège dans le stade, environ trente minutes plus tard.
"Votre présence en nombre témoigne de l'attachement extraordinaire que procurait Thomas quand on croisait son chemin", a salué dans le stade un représentant des organisateurs de la marche qui s'est terminé par un lâcher de ballons accompagné d'une minute d'applaudissement, suivi d'un temps de recueillement.
Dans la foule réunissant quelque 6.000 personnes selon les gendarmes, on pouvait voir beaucoup de T-Shirts blancs, certains ornés d'un portrait de l'adolescent. Elles ont défilé derrière une grande banderole en tissu blanc où était inscrit "Thomas on t'aime", avec un grand coeur.
Alors que l'extrême droite et une partie de la droite se sont emparées du drame en associant insécurité et immigration, les organisateurs de la marche ont appelé sur Facebook à un rassemblement "apolitique par respect pour la famille".
La mère de l'adolescent qui se préparait à fêter ses 17 ans début décembre souhaitait "un bel hommage", avec beaucoup de monde et "dans le calme", comme elle l'a confié à l'hebdomadaire Paris Match.
Elle a décrit Thomas comme "un jeune homme plein de vie, très aimé de ses amis". Le jeune capitaine de son équipe de rugby disait souvent "on ne se bagarre jamais sur le terrain", a-t-elle rappelé.
Depuis cet été, il avait été "autorisé à aller dans quelques bals de village", a expliqué sa mère. "Pour celui de Crépol, il avait hâte. C'est juste à côté de chez nous", a-t-elle dit, soulignant qu'il "devait connaître 80% des jeunes" présents.
Un de ses frères, âgé de 23 ans, l'a accompagné à la soirée, c'est lui qui a prévenu ses parents alors que les secours l'évacuaient vers l'hôpital de Lyon. Thomas est décédé lors du transport.
"Tous Thomas"
Les violences ont aussi fait huit blessés, dont deux jeunes de 28 et 23 ans hospitalisés en urgence absolue, dans un état en voie d'amélioration, sans pronostic vital engagé.
Selon le parquet, tout a commencé dans la nuit de samedi à dimanche quand une dizaine de jeunes ont tenté de s'introduire dans la salle communale de Crépol où se tenait un bal sur invitation. L'un d'eux a blessé d'un coup de couteau un vigile qui tentait de le bloquer. Des participants inscrits à la soirée sont intervenus, s'en est suivie une rixe à l'extérieur du bâtiment, selon le parquet.
Neuf suspects ont été interpellés mardi et placés en garde à vue dans le cadre de l'enquête pour "meurtre" et "tentatives de meurtres en bande organisée" menée par les gendarmes.
Parmi eux, le principal suspect, âgé de 20 ans, "formellement désigné comme auteur du coup de couteau mortel". Il habite "le centre" de Romans-sur-Isère et "non le quartier de la Monnaie", une des cités de la ville pointée par certains depuis le drame, a précisé le procureur de Valence, Laurent de Caigny dans un communiqué.
Le meurtrier présumé a été arrêté mardi après-midi dans la région de Toulouse, en même temps que six autres suspects, identifiés comme lui grâce à l'enquête de terrain et "étroitement surveillés" depuis quelques jours. Deux autres suspects ont été interpellés dans le secteur de Romans-sur-Isère.
Le procureur de Valence a prévu de faire un nouveau point par communiqué après 16H.
Mercredi matin, l'émotion régnait dans le village de Crépol, presque désert.
"Que de jeunesses bafouées, volées, détruites par l'inconscience de la violence sous toutes ses formes au fil des générations", a écrit une main anonyme dans le livre blanc ouvert par la mairie.
"On est tous Thomas, c'est une horreur", confie Alexis, un jeune venu de Romans-sur-Isère avec deux amies, pour qui "ça aurait pu être ma soeur, mon frère".
La municipalité a mis ses drapeaux en berne, quelques roses et bougies ont été déposées devant les portes d'entrée de la salle des fêtes, sous scellés. Sur le sol gisent des débris de verres en plastique où on peut lire "fête" et "Crépol", des taches de sang maculent encore le goudron.
Les obsèques de Thomas sont prévues vendredi dans le village de Saint-Donat-sur-l'Herbasse, voisin de Crépol, selon le quotidien Le Dauphiné Libéré.