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Sous le choc après le coup de tonnerre de la dissolution, élus et collaborateurs parlementaires commencent à faire leurs cartons dans une Assemblée nationale à moitié déserte, tandis que de nombreux députés sont déjà sur le terrain pour une campagne éclair.
"Je repars tout de suite en campagne" avant le premier tour des législatives anticipées le 30 juin, raconte le socialiste Philippe Brun, député de l'Eure, de passage au Palais Bourbon pour préparer "les lettres de licenciement" de collaborateurs parlementaires et "fermer des comptes liés à l'Assemblée nationale".
"Mon sujet principal, c'est mes collabs", abonde l'insoumis Eric Coquerel.
Tout le programme est annulé à l'Assemblée nationale, où l'ambiance est comme suspendue. Fini, le projet de loi consacré à la fin de vie ou le travail des commissions, y compris les enquêtes parlementaires, à l'instar de celles sur l'aide sociale à l'enfance et sur les violences dont sont victimes les mineurs dans l'industrie du cinéma.
"Il n'y a plus aucun texte, plus de questions au gouvernement, plus d'activité. On assure les affaires courantes et le texte sur la fin de vie devra être redéposé par un nouveau gouvernement", a énuméré la présidente sortante de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet sur France 2.
Comme d'autres parlementaires du camp présidentiel, la titulaire du perchoir semble sonnée. Elle aurait préféré un "autre chemin" que la dissolution, celui d'une "coalition", et affirme ne pas savoir si elle rempilera pour une nouvelle campagne.
"Je pense que presque tout le monde va repartir, avec plus ou moins d'enthousiasme", nuance Éléonore Caroit, députée Renaissance des Français d'Amérique centrale et du Sud.
La dissolution "est un choc, très brutal", mais "on s'y remet", confie la députée, "combative et sereine" à l'aube de sa troisième campagne... en deux ans. Son élection en 2022 avait été invalidée par le Conseil constitutionnel pour des dysfonctionnements lors du vote électronique.
- 2.000 collaborateurs au chômage -
Hasard du calendrier, le député Horizons Xavier Albertini avait prévu de travailler sur un "crash-test autour de scénarios de dissolution" lundi avec ses équipes, mais il voyait plutôt le couperet tomber "en octobre". Et il repart déjà en campagne: "Si je ne me représente pas, la circonscription ira au RN", assure l'élu de la Marne.
A l'inverse, la carrière politique de Joël Giraud, ancien ministre et député Renaissance, "s'arrête". A ses yeux, "cette dissolution (...) annonce un gouvernement de cohabitation entre le président et l'extrême droite", loin de son "ADN politique".
A "un âge conséquent" de 77 ans, sourit-il, le centriste Jean-Louis Bourlanges (MoDem), président sortant de la commission des Affaires étrangères, assure renoncer à se représenter dans les Hauts-de-Seine, tout comme le député Renaissance de Vaucluse Jean-François Lovisolo.
Environ 2.000 collaborateurs parlementaires vont se retrouver au chômage, en espérant une réélection de leurs députés. "On va devoir faire nos cartons. On a droit à un licenciement économique", explique Astrid Ribardière, collaboratrice d'un député PS et représentante syndicale UNSA.
"L'ironie de l'histoire, c'est qu'on devait recevoir des stagiaires de seconde à partir du 17 juin. Plein de lycéens vont se retrouver dans la panade", glisse-t-elle au passage.
L'annonce a pris de court tous les députés, comme le personnel de l'Assemblée. En 1997, il y avait eu des signes avant-coureurs de la dissolution, raconte une source parlementaire. "Là c'est différent, personne n'a vu le coup venir".
"Me voilà dissous", commentait laconiquement le socialiste Jérôme Guedj dimanche en marge de la soirée électorale de son parti.
La cheffe des députés écologistes, Cyrielle Chatelain, est restée en circonscription. "Je ne quitte plus l'Isère pendant vingt jours, nous sommes en campagne", insiste-t-elle. "On a jeté l'agenda à la poubelle et on a besoin de tout réorganiser". La dissolution? "Une réaction d'ego de Macron, je ne sais pas ce qu'il en espère", ajoute la parlementaire.
Au RN, la députée Alexandra Masson était encore quelques heures à Paris lundi matin avant de décoller pour sa circonscription des Alpes-Maritimes. Côté administratif, "il faut tout faire dans l'urgence", relate-t-elle, mais "mes équipes sont à fond".
Et d'assurer que le résultat va être "très positif" pour le Rassemblement national le 30 juin puis le 7 juillet, au soir du second tour.