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Emmanuel Macron cherche un Premier ministre, les macronistes se cherchent un chef: Élisabeth Borne a tiré la première en déclarant mercredi sa candidature à la tête du parti Renaissance que pourrait également convoiter Gabriel Attal, qui s'est déjà emparé du groupe à l'Assemblée.
L'ancienne Première ministre, redevenue députée du Calvados en janvier après son remplacement à Matignon par M. Attal, puis réélue après la dissolution, a estimé dans un entretien au Parisien que le parti n'avait "pas vocation à être une chapelle ou une écurie présidentielle".
"Avec cette Assemblée, personne ne va appliquer son programme. Cette instabilité politique redonne un rôle différent aux partis politiques: on a besoin qu'ils redonnent de l'espoir aux Français, qu'ils élaborent une vision, un projet pour le pays. Je veux mettre mon expérience au service de ce travail, avec humilité et beaucoup de collégialité", a-t-elle expliqué.
Quid du Premier ministre démissionnaire, à qui l'on prête également l'intention de briguer le secrétariat général du parti ? "Gabriel Attal est président de notre groupe à l'Assemblée nationale et c'est très important, car on a besoin de son énergie et de son talent. Il l'a dit lui-même, son objectif c'est le groupe. Je pense donc qu'il souhaite continuer à le diriger, plutôt que de devenir secrétaire général du parti, ce qui l'amènerait à quitter le groupe", a répondu Mme Borne.
Les deux fonctions sont donc incompatibles ? "Traditionnellement, il n'est pas d'usage d'être président de groupe en même temps que l'on dirige le parti", a-t-elle insisté.
Jusqu'ici, Gabriel Attal n'a pas dévoilé ses intentions. Mais le cumul de ces deux fonctions, "rien ne l'empêche", a-t-il récemment glissé en privé.
"Attal veut refaire le parti à son profit parce qu'il a des sous et des militants. Il l'+attalisera+. Borne, elle, ne va pas le +borniser+", expliquait récemment un député favorable à l'ancienne préfète.
Mais "je ne vois pas comment elle peut battre Attal auprès des militants", modère un autre parlementaire.
L'avenir de Renaissance, maillon faible du dispositif présidentiel depuis 2017, est un enjeu fort du camp macroniste, alors qu'Emmanuel Macron ne pourra se représenter en 2027.
- "Même vision" avec Darmanin -
Le parti jouera-t-il un rôle, alors que le mieux placé dans les sondages au sein du camp présidentiel, Édouard Philippe, a préféré fonder sa propre formation, Horizons ?
La candidature de Mme Borne intervient alors que le parti, d'abord baptisé En Marche, puis La République en marche et enfin Renaissance, doit tenir un Congrès avant le 30 novembre.
Ce congrès doit élire 150 membres du Conseil national qui éliront le secrétaire général du parti. Autrefois occupé par Christophe Castaner et Stanislas Guerini, le poste est détenu depuis 2022 par Stéphane Séjourné, actuel ministre des Affaires étrangères et proche de Gabriel Attal.
Le Premier ministre, particulièrement populaire au sein du parti mais dont les relations avec Emmanuel Macron sont notoirement dégradées depuis la dissolution, s'est déjà emparé du groupe Renaissance à l'Assemblée, immédiatement rebaptisé "Ensemble pour la République".
Un temps donnés candidats, voire partants pour aller fonder leur propre groupe, ni Mme Borne, ni M. Darmanin ne s'étaient présentés contre lui.
Avec Emmanuel Macron, ils avaient finalement plaidé pour une direction collégiale provisoire à l'Assemblée. Peine perdue. Ils ont en revanche obtenu, selon plusieurs sources, de ne pas avancer dès la rentrée le congrès de Renaissance, une option défendue par MM. Attal et Séjourné.
"Tout a été gelé par la fronde interne des cadres, avec le soutien du président", explique un participant.
Dans son entretien, Élisabeth Borne cite Gérald Darmanin dont elle dit partager la "même vision" pour une "approche collégiale". Elle assistera à sa rentrée politique le 15 septembre à Tourcoing. Là où, ironie du sort, elle était venue l'an passé en tant que Première ministre éteindre les ambitions trop bruyantes de son ministre de l'Intérieur.
L'ancienne préfète, porteuse de la réforme des retraites et de budgets adoptés au 49.3, a également semblé prendre quelque distance avec le président après la dissolution, froissée par l'argument d'une Assemblée bloquée, alors qu'elle s'était échinée à y faire adopter plus d'une soixantaine de textes sans majorité absolue.