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La célèbre marque d'eau gazeuse Perrier, filiale de Nestlé, a dû cesser d'exploiter un de ses forages à la demande de l’État et détruire "par précaution" deux millions de bouteilles, après la découverte de bactéries "d'origine fécale".
Le préfet du Gard a mis en demeure l'entreprise de "suspendre sans délai" l'exploitation d'un de ses captages d'eau sur le site produisant Perrier, à Vergèze, près de Nîmes, dans un arrêté du 19 avril consulté mercredi par l'AFP.
Il y est indiqué que ce captage "a présenté un épisode de contamination à partir du 10 mars 2024 et sur plusieurs jours par des germes témoins d'une contamination d'origine fécale", type E. coli.
Il est aussi souligné "qu'une contamination des eaux conditionnées (produits finis) à partir de ce forage (...) ne peut être exclue (...) et peut faire courir un risque pour la santé des consommateurs".
Mercredi, Nestlé Waters France, filiale du leader mondial de l'agroalimentaire, a annoncé à l'AFP avoir, "par précaution", détruit "plusieurs lots" de marque Perrrier. Elle a précisé en fin de journée que cela représentait deux millions de bouteilles, moins qu'un chiffre initialement évoqué par un représentant CGT de la source de Vergèze.
A ce jour "il n'y a pas de conséquence sur l'activité ni sur l'emploi selon notre direction", a déclaré à l'AFP ce représentant, Olivier Almeras.
Les bouteilles disponibles sur le marché "peuvent être consommées en toute sécurité", assure la direction.
Nestlé Waters s'est borné à évoquer une "déviation microbiologique ponctuelle" apparue à la suite "des très fortes pluies liées à un événement de type méditerranéen récent dans le Gard". La tempête Monica a frappé le sud-est de la France pendant le week-end du 10 mars.
L'exploitation du puits concerné ne pourra reprendre qu'en remplissant une série de conditions, selon l'arrêté préfectoral, notamment la recherche et la "suppression" des sources de contamination.
- Des contaminations pouvant se répéter -
C'est une nouvelle entaille dans la réputation du producteur d'eau en bouteille, qui a admis publiquement, en début d'année, avoir eu recours en France et en Suisse à des traitements interdits sur les eaux minérales (désinfection par lampe UV, filtration sur charbon actif), pour garantir une consommation sans risque.
Outre Perrier, Nestlé est propriétaire en France des marques Vittel, Contrex et Hépar. Leurs sources se situent dans les Vosges, où certains puits ne sont plus exploités depuis l'an dernier.
Concernant le site de Vergèze, un courrier de l'agence régionale de santé Occitanie de juin 2023, consulté par l'AFP, relevait que l'exploitant était confronté à une "contamination bactériologique régulière (...) notamment après des épisodes pluvieux, sur au moins cinq des sept forages autorisés". Ces bactéries signalent une contamination par des matières fécales, qui ont pénétré jusque dans la nappe.
Selon l'arrêté du préfet du Gard, le puits où Nestlé ne peut plus pomper jusqu'à nouvel ordre avait "déjà fait l'objet de contaminations bactériologiques antérieures à la suite d'épisodes pluvieux de type méditerranéen". De tels événements "sont amenés à se reproduire aussi bien en fréquence qu'en intensité", est-il noté.
En cas de fortes pluies, "vous avez de l'eau qui s'infiltre très rapidement dans le sol et passe dans les nappes sans effet de filtre, surtout s'il y a la moindre fissure dans le sol. Or, elle est auparavant passée un peu partout en embarquant tout sur son passage, ça peut toucher notamment les fosses septiques", a décrit à l'AFP Robert Durand, hydrologue et membre de l'association Environnement Méditerranée. Ces fosses recueillent les eaux des toilettes des particuliers non raccordées au réseau d'assainissement.
Pour continuer à exploiter les forages à la qualité dégradée, Nestlé Waters a créé une nouvelle marque, "Maison Perrier", qui produit des boissons ayant reçu un traitement de potabilisation, donc sanitairement sûres, mais vendues sans la mention eau minérale.
Racheté par Nestlé en 1992, Perrier avait alors du mal à se relever d'une crise: la marque, connue pour ses petites bouteilles vertes bombées, avait retiré du marché en 1990 la totalité de ses produits à la suite de la découverte de traces de benzène dans quelques bouteilles aux États-Unis.