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Comment la culture sud-coréenne a conquis la planète

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Giuseppe CACACE

Ses films remportent des Oscars, ses séries et stars de la K-pop font le tour du monde et l'une de ses romancières vient de remporter le Nobel de littérature... Comment la Corée du Sud s'est-elle imposée comme une puissance culturelle?

- A l'origine de la "Hallyu"

A partir de la fin des années 1990, les films coréens et les stars de la K-pop gagnent en popularité dans les pays asiatiques voisins comme le Japon et la Chine: la "Hallyu" ou, vague culturelle, est née. Elle déferle sur les pays occidentaux avec l'entêtant "Gangnam Style" de Psy, sorti en 2012.

Lors de la décennie suivante, "Babyshark", la chanson virale pour enfants, bat des records de vues sur YouTube, les superstars de la K-pop BTS se hissent en tête des charts dans le monde entier, le film "Parasite" de Bong Joon-ho est distingué à Hollywood avec un Oscar et "Squid Game" devient la série non anglophone la plus visionnée sur Netflix.

Les exportations sud-coréennes de biens culturels représentaient près de 12 milliards d'euros en 2022, plus que les appareils électroménagers ou les voitures électriques. Il s'agissait essentiellement de jeux vidéo comme Battlegrounds Mobile, immensément populaire en Inde et au Pakistan. L'objectif du gouvernement est d'atteindre environ 23 milliards d'euros d'ici à 2027.

-Un passé troublé

Le réalisateur oscarisé Bong Joon-ho explique le succès culturel de la Corée du Sud par les "périodes dramatiques" traversées par les habitants du pays asiatique qui a connu, depuis la guerre de Corée (1950-1953), dictature militaire, transformation économique radicale et transition démocratique.

Ces "événements extrêmes" participent à apporter "une abondance d'inspiration et de stimulation" pour les créateurs, a-t-il jugé: "C'est un endroit tellement dynamique et turbulent".

-La "K-littérature" primée

Han Kang, récompensée jeudi par le Nobel de littérature, s'est justement illustrée par des oeuvres qui s'inspirent de l'histoire contemporaine de son pays.

La romancière de 53 ans, dont le jury du Nobel a salué la "prose poétique intense qui affronte les traumatismes historiques et expose la fragilité de la vie humaine", a elle-même raconté avoir été profondément marquée par ce qu'elle avait appris du massacre qui a eu lieu en 1980 dans sa ville natale de Gwangju. La dictature militaire avait alors violemment réprimé un soulèvement contre le coup d'Etat qui venait de se produire.

Han Kang a raconté que son père lui avait montré des photos des corps des victimes et de la population qui se mobilisait pour donner son sang pour les blessés. Ces scènes ont inspiré son livre "Celui qui revient".

Si bien des auteurs sud-coréens ont abordé dans leurs oeuvres le passé traumatisant de leur pays, Han Kang a créé "sa propre esthétique littéraire saisissante", estime Oh Hyung-yup, professeur de littérature à l'Université de Corée.

-Des pionnières

La Corée du Sud est l'un des pays riches où le moins de femmes travaillent mais elles sont en pointe du succès culturel du pays.

"La végétarienne" de Han Kang est considéré comme un texte pionnier de l'écoféminisme. Et "Kim Jiyoung, née en 1982" de Cho Nam-Joo qui raconte l'histoire d'une femme mariée qui arrête de travailler pour élever son enfant, a rencontré un fort succès international.

-Soutien public et "beuveries"

Si le gouvernement a investi des sommes conséquentes pour soutenir le secteur culturel, des experts soulignent que l'Etat a parfois entravé sa réussite.

Sous le président Park Geun-hye (2013-2017), Han Kang a ainsi fait partie d'une liste de 9.000 artistes "blacklistés" pour avoir critiqué le gouvernement.

Certaines initiatives ont malgré tout payé, comme la création en 1996 d'un organisme public qui promeut la littérature coréenne à l'étranger et forme des traducteurs (LTI Korea).

La littérature coréenne a bénéficié aussi du phénomène de la K-pop. Quand un membre du boys band BTS a été vu en train de lire un ouvrage de développement personnel, des centaines de milliers de copies du livre ont été vendues.

Le réalisateur de "Parasite", Bong Joon-ho, explique la créativité sud-coréenne d'une manière plus inattendue: "Nous sommes dans un pays accro au travail. Les gens travaillent trop. Et dans le même temps, nous buvons trop. Alors tous les soirs, il y a d'intenses séances de beuveries et tout devient très extrême".

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