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"De la colère et de la peur": militaires, pompiers, ou encore enseignants se sont mobilisés contre le gouvernement, que revendiquent-ils?

Une marée humaine a défilé ce jeudi dans la capitale belge pour dénoncer les mesures du gouvernement dirigé par Bart De Wever. La suppression des départs anticipés à la retraite cristallise la colère des manifestants, parmi lesquels de nombreux militaires, cheminots et agents des services publics.

Première grande mobilisation syndicale depuis l’entrée en fonction du nouveau gouvernement fédéral le 3 février, cette manifestation a rassemblé 60.000 personnes selon la police, 100.000 selon les syndicats. Le centre de Bruxelles a été animé par les coups de sifflet et les pétards accompagnant les manifestants partis de la gare du Nord pour rejoindre la gare du Midi.

Le projet de repousser l’âge de départ à la retraite est au cœur des revendications. Alors que la Belgique est sous surveillance de l’Union européenne pour déficit excessif, le gouvernement prévoit de réduire les dépenses publiques, une politique dénoncée par les syndicats comme une attaque contre les acquis sociaux.

Sur le terrain, nos équipes ont recueilli les témoignages de plusieurs manifestants entre la gare du Nord, point de départ du cortège, et la gare du Midi, où la mobilisation s'est achevée.

"On est en train de tout détruire"

Stéphane, enseignant, ne cache pas sa colère : "La démolition a commencé avec les pensions à 67 ans. Maintenant, on veut continuer en assassinant la démocratie. On est en train de tout détruire."

Il dénonce également les réformes du chômage : "Mettre 500.000 personnes en dehors du chômage, c’est les forcer à accepter des salaires plus bas que ceux déjà en poste. Le gars de l'usine, on va le garder ou on va le mettre dehors ? C'est ça le problème."

Pour Luca, accompagnateur de train, la réforme touche directement les services publics : "C'est un gouvernement antisocial. Le prochain gouvernement veut détruire le service ferroviaire belge. On parle de trains sans personnel de bord, c’est dangereux."

Les militaires étaient également nombreux à manifester contre le relèvement de l’âge de la retraite. "Nous sommes venus en force, plus de 2.000 militaires, pour exprimer notre mécontentement", explique Philippe Sion, délégué permanent du syndicat militaire ACMP-CGPM. "On ne peut pas passer jusqu'à 67 ans, prendre 11 ans dans la figure, c’est inacceptable. Beaucoup vont quitter l’armée, et on n’aura plus personne pour former les jeunes."

Il s’interroge sur la logique économique de cette réforme : "Faire travailler les militaires plus longtemps coûtera 300 millions d’euros par an, pour récupérer seulement 170 millions dans la caisse des pensions. C’est incompréhensible."

Une inquiétude grandissante

La manifestation a aussi été marquée par une forte émotion, notamment chez une artiste militante brandissant une pancarte "Du pain et des roses", en référence à un poème du début du XXe siècle prônant à la fois le droit à l’essentiel et à la beauté.

"Aujourd’hui, je ressens de la colère et de la peur", confie-t-elle. "Peur pour mon fils, mes amis, pour l’avenir. Les logements deviennent inaccessibles, les femmes auront des retraites encore plus faibles… Tout ce qu’on a construit est en train d’être détricoté."

"Les services publics sont le patrimoine de tous"

Un électricien de la commune de Quaregnon, syndiqué à la CGSP, rappelle l’impact global des mesures d’austérité : "Les services publics, c’est le patrimoine de tous, citoyens comme travailleurs. Ce sera une double peine : en tant que travailleur, mais aussi en tant que citoyen, car les taxes vont augmenter, les pouvoirs locaux ne pourront pas assumer tout ce que le gouvernement va leur faire subir."

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