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Bruno-Henri Vincent était l'invité du RTL info 13h pour évoquer la situation chez Audi Brussels avec son regard d'avocat spécialisé en droit du travail.
Olivier Schoonejans : La direction d'Audi Brussels a décidé de fermer l'usine de Forest et a refusé de payer ses ouvriers. D'abord, est-ce que c'est autorisé ?
Bruno-Henri Vincent : Ça s'appelle un lock-out, c'est une voie de fait, c'est l'employeur qui décide de fermer temporairement l'entreprise dans le cas d'un conflit social. Ça n'est pas autorisé, je veux dire, il n'y a rien qui est autorisé explicitement sauf le droit de grève dans un conflit social. Mais quand c'est un conflit, il se passe des choses désagréables et un peu à la limite de la légalité, oui.
O.S. : Les travailleurs, de leur côté, disent : on ne fait pas grève, mais on ne reprend pas le travail non plus. Là aussi, ils sont un petit peu entre les deux ?
B.H.V. : Bien sûr qu'ils sont entre les deux. Un travailleur qui fait grève n'est pas payé par l'employeur, un travailleur qui rend le travail impossible sans faire grève est payé par l'employeur. Et donc, c'est une manière d'affaiblir l'employeur, d'augmenter sa position de négociation et de ne pas toucher aux caisses syndicales.
O.S. : On est donc dans une guerre d'usure ?
B.H.V. : C'est pour le moment un petit jeu de musculation, je pense. Il ne se passe fondamentalement rien d'anormal que de signaler qu'il y a un arrêt de la production et qu'on va devoir procéder à des licenciements collectifs. Je sais que des gens vont bondir, mais un contrat à durée indéterminée ce n'est pas un contrat à vie, c'est à durée indéterminée. Quand on est dans une procédure collective, on demande de prévenir de la situation bien avant. Pourquoi ? Pour pouvoir prévoir des trajets de reclassement professionnel et que les gens qui arrivent en masse sur le marché de l'emploi ne soient pas victimes du chômage. Donc, c'est dans un but de formation des gens. Ce n'est pas dans un but de faire monter la pression et de faire la surenchère à l'indemnité de rupture.
O.S. : Vous pensez qu'on en est là ? À la surenchère dans l'indemnité de rupture ? Est-ce cela qui se joue pour l'instant ?
B.H.V. : Vous savez, j'ai vu comment ça s'est passé au même endroit il y a quelques années avec Volkswagen. Tout ça s'est réglé en termes d'indemnité de rupture majorée. Et donc je pense que oui, qu'il y a quelque part un discours qui est de dire : si vous n'allongez pas des propositions financières pour nos travailleurs, nous allons exercer un pouvoir de nuisance qui vous coûtera plus cher.