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Blanchie par un jury international de soupçons de tricherie lors du dernier Vendée Globe, la navigatrice Clarisse Crémer a confié lundi à l'AFP son "grand soulagement" après avoir vécu un "cauchemar", et souhaité pouvoir "recommencer à se consacrer" à son projet sportif.
Crémer, qui avait terminé 12e de ce tour du monde en solitaire, a également dénoncé une "intention malveillante" chez la personne qui avait envoyé anonymement, à plusieurs médias et à la Fédération français de voile, des captures d'écran de conversations WhatsApp qu'elle avait eues pendant la course avec son mari, le skipper Tanguy Le Turquais: "La décision du jury est salvatrice mais la personne qui a fait ça savait qu'elle nous ferait du mal."
Question : Quel est votre état d'esprit après la décision du jury ?
Réponse : "C'est un grand soulagement. Avec Tanguy on n'a pas vraiment douté de nous, mais c'était vraiment un cauchemar ces dernières semaines. On a la sensation que la page va enfin pouvoir se tourner".
Q: Comment s'est déroulée l'audition samedi ?
R: "C'était apaisant de pouvoir s'exprimer sur la question et d'être reçue de façon humaine. Cela fait quinze jours qu'on nous traite de tricheurs avec Tanguy, mais nous avions décidé de patienter pour réserver nos explications à ce jury. Ils nous ont écoutés, sans a priori quelconque. On s'est concentré sur les éléments factuels qu'on pouvait apporter aux captures d'écran livrées anonymement à certains médias. Le contexte n'était pas de notre ressort".
Q: Savez-vous qui est à l'origine de cette dénonciation anonyme et quelles sont ses raisons ?
R: "Face au jury, ne nous ne sommes pas concentrés là-dessus et je n'ai pas envie de m'épancher sur la question. On est des êtres humains... Cela a été une période violente et douloureuse pour nous. Dans notre milieu, il y a des procédures: si on pense que quelqu'un a triché on peut aller voir le comité de course, lui donner des éléments et cela donne une chance à l'accusé de s'expliquer. Ce n'est pas comme ça que cela a été fait, l'intention malveillante était là. La décision du jury est salvatrice mais la personne qui a fait ça savait qu'elle nous ferait du mal. Maintenant, on ne souhaite pas dépenser davantage d'énergie sur ce sujet, (pour mieux) recommencer à se consacrer au sportif".
Q: Qu'est-ce que vous pouvez dire du contexte des échanges avec votre mari ?
R: "Il faut avoir conscience que les échanges donnés à la presse représentent une infime partie de nos conversations de couple. Ces captures d'écran, il y en a quatorze et elles ont été soigneusement choisies pour donner l'impression d'une tricherie. Une bonne partie par exemple concerne la fin du tour du monde et les échanges ont eu lieu en même temps qu'une discussion avec la direction de course pour préparer mon arrivée. Nous y évoquons des questions de logistique et de sécurité dans le cadre d'une situation météo exceptionnelle à l'approche des Sables-d'Olonne.
Q: Qu'en est-il de l'envoi de cartes météo par votre mari ?
R: "Le jury a reconnu que Tanguy n'avait pas fait d'aide à la performance. Au sens des règles du Vendée Globe, ce qu'il m'a envoyé ne correspondait pas à un routage. Tanguy est un skipper, mais c'est aussi mon conjoint. Il me pose des questions, car il est sollicité par mes proches et il souhaite les rassurer. D'ailleurs c'est toujours lui qui me pose des questions et cela correspond à une période où lui est en vacances dans le sud de l'Espagne avec des copains, il s'inquiète pour moi et il veut renseigner les gens".
Q: Les moyens de communication ont beaucoup évolué depuis dix ans, pensez-vous que cela a participé à la confusion autour de votre situation ?
R: "A partir du moment où les applications de messagerie comme Whatsapp sont rentrées dans l'équation, cela a changé beaucoup de choses à bord. Ce n'était pas forcément le cas avant l'édition 2020/2021. Désormais, on a encore plus régulièrement qu'avant des échanges avec des journalistes et des proches pendant le périple. On participe à des lives sur le web, c'est nécessaire de communiquer, y compris pour la médiatisation de la course et nos sponsors. Dans le cadre de ces échanges-là, il y a forcément des phrases qui entrent dans une espèce de zone grise. Il faut peut-être réfléchir à affiner un peu le règlement pour s'adapter à ces moyens de communication".
Propos recueillis par François d'Astier.