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Tennis: Tsonga, comme un goût d'inachevé

Longtemps considéré comme l'héritier de Yannick Noah, Jo-Wilfried Tsonga a définitivement rangé ses raquettes après un ultime match à Roland-Garros, à 37 ans, à l'issue d'une carrière faite de coups d'éclats et de blessures à répétition.

Son palmarès est l'un des plus riches du tennis français: 18 titres, dont deux Masters 1000, une Coupe Davis avec les Nouveaux Mousquetaires (Monfils, Gasquet, Simon) et des victoires de prestige contre les plus grands.

Il est l'un des rares à avoir tenu la dragée haute aux trois monstres dominateurs sur le circuit de son époque, Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic, qu'il a tous les trois battus en Grand Chelem et lorsqu'ils étaient N.1 mondiaux.

Mais contrairement à Noah, il n'a jamais réussi à décrocher le titre du Grand Chelem, la marque des plus grands. La faute au "Big 3" (voire "Big 4" avec Murray), à un certain manque d'endurance qui l'empêchait d'enchaîner les exploits et à un jeu reposant trop sur sa première balle de service et sur son gros coup droit. Après sa finale à l'Open d'Australie, en 2008, il n'est jamais allé plus loin que les demies.

Tout a commencé à Melbourne où ce jeune inconnu de 22 ans renverse tout sur son passage pour atteindre la finale de l'Open d'Australie.

"Je n’étais pas dans mon monde. Je passais du mec qui est 300e mondial, à qui on donnerait presque un petit morceau de pain pour manger, au gars qui est là, devant 15.000 personnes qui crient son nom? !", se remémorera des années plus tard le Français, comparé par la presse australienne au boxeur Mohammed Ali pour sa gestuelle, sa manière de s'encourager et une certaine ressemblance physique.

N'empêche que le petit Frenchy, fils d'un ancien handballeur d'origine congolaise et d'une mère enseignante, marque les esprits en éliminant Andy Murray (9e) mais surtout Rafael Nadal, N.2 mondial et alors triple vainqueur de Roland-Garros, balayé en trois sets dans une demi-finale d'anthologie.

Seul Novak Djokovic l'arrête. Mais qu'importe cette finale perdue: le tennis français tient son nouveau héros !

Armé de son service et de son coup droit ravageurs, Tsonga enchaîne en remportant son premier titre à Bangkok, puis son premier Masters 1000, à Bercy. Fin 2008, il est 6e mondial.

- Colosse aux pieds d'argile -

Mais l'ombre des blessures rôde. Ce printemps-là, le colosse (1,88 m, 91 kg) s'est fait opérer du genou et a dû rester éloigné des courts plusieurs mois.

Un scénario qui le poursuivra pendant toute sa carrière. Une carrière qui avait d'ailleurs failli ne jamais débuter, à cause de multiples pépins physiques dès ses années de juniors.

En 2010, une déchirure abdominale le prive de Roland-Garros et un genou douloureux de la finale de la Coupe Davis perdue en Serbie. Suivront des blessures au tendon rotulien (2013), à l'avant-bras (2015), aux adducteurs (2016) ou encore aux ischios (2018). Même dans le dernier simple de sa carrière, contre le Norvégien Casper Ruud, il est gêné par une douleur à l'épaule.

- "Danse des pouces" -

À chaque fois Tsonga revient. En 2011, il est demi-finaliste à Wimbledon, après un quart spectaculaire remporté face à Federer. Suivent une finale à Bercy et au Masters.

L'année suivante, c'est le retour de la "danse des pouces" avec laquelle il célèbre ses victoires: il se hisse jusqu'en quarts à Roland-Garros, devenant le premier Français de l'ère Open à atteindre ce niveau dans les quatre "Majeurs". Il accède ensuite au dernier carré à Wimbledon et termine l'année 5e mondial, son meilleur classement. En tout, Tsonga a passé 260 semaines dans le Top 10.

Son grand regret restera sans doute la demi-finale perdue à Roland-Garros 2013. Trente ans après Noah, l'histoire lui tend les bras. Après avoir maîtrisé Federer, alors 3e mondial, en quarts, David Ferrer semble à sa portée. Mais, paralysé par l'enjeu, Tsonga manque son grand rendez-vous. Après le match, "j'avais envie de tout casser, de me mutiler", déclarera-t-il.

Grâce à son jeu spectaculaire - "Je joue, bien ou pas, je râle, je crie, je hurle de joie. Mon tennis, c’est la vie", disait-il - Tsonga a été avec Gaël Monfils l'un des chouchous des fans tricolores.

"En France, le public a toujours été extrêmement bienveillant à mon égard (...) C’est une source de motivation très puissante. La moindre des choses, c’est de lui rendre ce soutien, de l’honorer en mouillant le maillot".

Membre fondateur de la All In Tennis Academy, une nouvelle structure française de formation, Tsonga, marié et père de deux enfants, souhaite désormais "aider le tennis français".

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