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Une niche de chien à louer: à près de 200 ans d'intervalle, les dessinateurs Honoré Daumier et Plantu ont eu la même idée pour croquer la crise du logement. Une exposition aux Baux-de-Provence met en parallèle leurs oeuvres.
Pour Cyril Dumas, commissaire de cette exposition organisée au musée Yves Brayer jusqu'au 30 octobre, "Daumier-Plantu, la récurrence du dessein politique" témoigne "des similitudes de l'histoire et du génie du journalisme humoristique".
Mais aussi de travers persistants de la société mis à nu aussi bien par Daumier que par Plantu à des époques différentes: logements décents inaccessibles à une partie de la population, racisme envers les Africains ou les Turcs, désintérêt des députés pour certaines séances de l'assemblée.
Au total, 60 lithographies de Daumier sont mises en parallèle avec autant de dessins de Plantu, ainsi que des bronzes et des statuettes des deux artistes.
Interrogé sur les similitudes avec Daumier, Plantu évoque "les rouages et la machinerie" utilisés par les caricaturistes.
"Nous essayons toujours de trouver une image pour illustrer un fait de société ou une idée. Il faut regarder l'image d'ensemble, observer les gestes, les attitudes même ceux qui semblent insignifiants au premier abord", ajoute-t-il.
Outre la similitude des thèmes, Daumier et Plantu se rejoignent aussi comme résistants à différentes formes de pression.
En 1832, Daumier avait été condamné à six mois de prison pour la publication d'une caricature représentant Louis-Philippe en Gargantua avant d'être bridé par la censure.
Si les dessinateurs politiques ne sont plus menacés de prison aujourd'hui en France, ils font parfois l'objet de pressions et de récriminations.
Lors de la campagne présidentielle 2007, Nicolas Sarkozy s'est plaint auprès de la rédaction du Monde de la manière dont il était dessiné par Plantu.
"Sarkozy impressionne tellement que s'il y a un pétochard dans la rédaction en chef, la liberté du dessinateur est fichue", écrivait Plantu à l'époque en se félicitant d'avoir été soutenu par sa rédaction en chef.
Lors du vernissage aux Baux-de-Provence, Plantu a surtout déploré la montée en puissance du "politiquement correct" et la frilosité croissante des rédacteurs en chef.
"Aujourd'hui, il n'y a pas de censure comme à l'époque mais c'est plus hypocrite. Les rédacteurs en chef, pour ne pas avoir de coup de fil de plainte, vont préférer faire passer une image édulcorée", remarque le dessinateur.
Pour Plantu, la vitalité ou l'inexistence de caricatures politiques constitue pourtant un des meilleurs baromètres de l'état de la démocratie dans un pays.