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"Tirailleurs" raconte l'histoire du jeune Thierno, recruté de force dans un petit village sénégalais par l'armée française en 1917, et de son père qui s'enrôle volontairement pour veiller sur lui dans ce saut vers l'inconnu, la découverte de la France plongée dans l'enfer de la Grande Guerre.
Créé par Napoléon III en 1857 au Sénégal, d'où son nom, le corps d'infanterie des tirailleurs s'est ensuite élargi dans son recrutement à des hommes d'autres régions d'Afrique occidentale et centrale conquises par la France à la fin du XIXe siècle. Les tirailleurs furent plus de 200.000 à se battre lors de la Première guerre mondiale, 150.000 pour la Seconde, 60.000 en Indochine. C'est l'une des premières fois que leur histoire est portée à l'écran.
Ça m'a questionné sur la notion de sacrifice
Pourquoi avez-vous eu envie de faire ce film ?
Il y a plein de raisons. J'avais envie de travailler avec Mathieu Vadepied, qui était le chef opérateur dans Intouchables. On était à la cantine d'Intouchables et il m'a parlé de ses envies d'être réalisateur et de cette idée qu'il avait sur les tirailleurs et il m'a accroché avec une question: "Et si le Soldat inconnu était un tirailleur sénégalais?"
Et là, effectivement, cette question a soulevé énormément de questions et pour répondre à toutes ces questions, j'ai eu envie de faire le film.
Selon vous, l'histoire des tirailleurs est trop peu connue ?
Oui, parce que justement, il y avait très peu de réponses à toutes ces questions que j'avais et pour répondre, parfois, le film peut aider. C'est très peu connu, en tout cas même quand on en sait quelque chose, c'est assez flou, ce n'est pas très précis.
Est-ce qu'il y a une dimension pédagogique à travers ce film ?
Oui, déjà pour moi. C'est pour que je puisse élargir ma propre culture. Et je partage le peu de choses que j'ai pu apprendre.
Le film parle aussi d'une relation entre un père et son fils, est-ce un rôle que vous aimez incarner ?
Oui, j'aime bien. C'est le genre de relations qui m'intéresse, car c'est une relation que je vis deux fois en fait. Je suis père, je suis fils. Donc ça m'intéresse toujours ce lien-là. Il est assez fort et je trouve qu'il n'y a pas meilleur endroit pour raconter une histoire, c'est de raconter des liens en fait. Surtout quand on a un sujet aussi grand que ça, c'est-à-dire la Première Guerre mondiale.
Pour faire découvrir les tirailleurs, je trouve que c'est bien de passer par l'intime. Donc cette histoire de père-fils sert aussi pour tout ça. Et c'est vrai que j'ai souvent joué des pères et je pense que je continuerai.
Est-ce qu'il y a des points communs entre votre rôle de père dans ce film et celui que vous êtes dans la vie ?
Forcément, je ne pourrais pas vous dire lesquels mais j'imagine que mécaniquement, il doit y en avoir. Je pense qu'il y a des choses instinctives, qui viennent se mettre en place, qui sont déjà là.
Je pense aussi que le fait d'avoir joué en peul, il y a aussi des choses de mon père qui sont venues se greffer sur Bakary (NDLR: son personnage). Je pense qu'il y a un peu de tout ça.
Mais vous dire quoi précisément, je ne sais pas. Ce qui est sûr, c'est l'amour qu'il a pour son fils. Je pense, je n'ai pas beaucoup réfléchi... mais je crois que j'aime mes enfants (rires).
Est-ce que tourner ce film a eu un impact dans votre vie ?
Toujours... Mais encore une fois, dire quoi, c'est compliqué. Mais à chaque fois qu'on traverse un personnage, qu'on l'a pendant quelques mois même des fois et qu'on traverse sa vie, on en tire toujours quelque chose. Mais c'est compliqué de le dire, surtout aussi fraichement.
En tout cas ce qui est sûr, c'est que ça m'a questionné sur la notion de sacrifice en fait. Dans ce qu'on se raconte, ce qu'on est prêt à faire pour son enfant et ce qu'on est "vraiment" prêt à faire.
Quelle est la différence? Je ne suis pas sûr qu'on soit tous égaux face à ça.