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Le coronavirus en Belgique a affecté la santé de nombreux citoyens. Plus de 9.000 morts, 55.000 cas confirmés et près de 17.000 hospitalisations. Mais on le répète depuis le début de cette épidémie, les conséquences sont également économiques et sociales. Dans un monde à l'arrêt, on estime à environ 1,250 million le nombre de travailleurs placés en chômage temporaire, touchant théoriquement 70% de leur salaire mais avec un plafond à 2.754€ bruts par mois.
Inévitablement, ceux qui avaient du mal à joindre les deux bouts avec un salaire complet se retrouvent dans des situations très compliquées avec un salaire amputé. Les propriétaires ayant un crédit hypothécaire ont pu le mettre en pause, mais ceux qui ont un loyer n'ont pas la possibilité de baisser leurs frais fixes mensuels. Ils doivent donc continuer à vivre, avec moins.
C'est le cas de Nathanaël, qui a contacté la rédaction de RTL info via le bouton orange Alertez-nous. "Je travaillais à mi-temps. Mon salaire normal est de 1.100 euros, et au chômage temporaire, je ne reçois que 590 euros. Mon loyer ? 580 euros…", ironise-t-il.
Educateur spécialisé dans un internat
Nathanaël a 31 ans et habite à Moustier-sur-Sambre (Namur). "Je travaille en tant qu'éducateur spécialisé au Séminaire de Floreffe, à mi-temps depuis le mois de septembre. Je suis éducateur de nuit dans leur section d'internat. J'encadre les jeunes, et je fais les surveillances".
Un métier qu'il adore. "J'ai commencé sans être formé, dans des écoles. Puis j'ai fait toutes les formations qui se rapprochaient du métier, jusqu'à devenir éducateur spécialisé classe A".
Une journée de travail typique ? "Je prends mon service à 20 heures, mais j'arrive plus tôt comme ça je mange avec les jeunes (11-18 ans), c'est important pour entretenir le lien puisque les nuits, on ne les voit pas forcément beaucoup. Après, c'est surtout de l'encadrement, du contact, de la surveillance pendant les études, des aides scolaires. Et puis forcément, les nuits". Et ça représente plus de travail qu'on pense car "ce sont des ados, il y a les chamailleries du soir ou les jeux dans le couloir, donc il faut souvent intervenir". Heureusement, "ça va, ils sont sympas, on a de la chance".
Au lieu de mon salaire d'environ 1.100 euros, je me retrouve avec 590 euros
En chômage temporaire depuis le 1er avril
Un travail à mi-temps, donc (réparti sur 14 jours par mois) qui lui rapporte en temps normal environ 1.100 euros par mois. "Ce n'est pas énorme, ce n'est jamais évident mais je me débrouille, je fais mes calculs par mois, et je gère mon argent comme ça". Hélas, l'épidémie de coronavirus a mis à mal ce fragile équilibre.
"Depuis le premier avril, je suis en chômage temporaire". Rapidement, Nathanaël a compris qu'il n'aurait pas grand-chose. "Je pensais que j'allais passer en chômage forcé, avec une allocation journalière. Mais en fait, ils se basent sur les heures de travail. Et moi j'ai un 19 heures/semaine, donc à la fin du mois, ça fait 14,5 jours de chômage. Au final, au lieu de mon salaire d'environ 1.100 euros, je me retrouve avec 590 euros".
10 euros par mois pour vivre et payer les factures
Nathanaël habite seul dans un appartement. "Et mon loyer est de 580 euros… Euh, je fais comment alors ?", ironise-t-il. Il lui reste donc 10 euros pour vivre et payer les factures. Il n'a pas d'autres rentrées d'argent, assure-t-il. Il ajoute ne pas pouvoir compter sur une réduction de son loyer, ni sur de l'aide de proches ou de sa famille. "Je ne peux compter que sur moi-même", résume-t-il.
Dès lors, durant le mois d'avril, "j'ai vécu au-dessus de mes moyens". Il avait "environ 300 euros de côté" mais ils sont partis "pour les courses, pour la voiture, pour des choses essentielles".
Pour s'en sortir, Nathanaël compte désormais sur le CPAS. "J'ai fait une demande pour avoir un complément, et le dossier va être étudié. Le but, c'est d'arriver au 'minimex' de survie, environ 900€".
Sombres perspectives pour les internats
Une aide qui sera essentielle car "au niveau de l'internat, je sais déjà que c'est fini jusqu'en septembre. J'ai un CDD qui courait jusqu'au 31 août, et qui devait être prolongé en septembre, donc je ne peux pas tout quitter pour trouver un autre travail maintenant".
Hélas, rien ne dit que l'internat du Séminaire de Floreffe aura une rentrée de septembre comme les autres. "On table sur une rentrée normale, peut-être avec des mesures de distanciation, mais d'ici-là, beaucoup de choses peuvent changer", nous a expliqué Olivier Francaux, le directeur qui emploie habituellement "8 éducateurs, tous au chômage temporaire actuellement".
Sans surprise, il y a "beaucoup d'inquiétudes, de craintes" du côté des parents qui pensent déjà à la rentrée de septembre. "La journée portes ouvertes a dû être annulée. Les parents se demandent comment ça va se passer, mais on ne peut rien leur promettre, on ne saura sans doute rien avec certitude avant la mi-août".
Certains évoquent le fait de mettre les élèves à l'école un jour sur deux à la rentrée. "Dans un internat, c'est pratiquement impossible à mettre en place". Si une telle règle est appliquée, "ça va tuer tous les internats", craint ce directeur qui rappelle "le rôle social important" de ces établissements, "notamment au niveau des SAJ et SPJ" (Service d'Aide ou de Protection de la Jeunesse).
Nathanaël, lui, est assez pessimiste. "Il n'y aura surement pas dès septembre la totalité des élèves, l'internat ne sera pas forcément rempli, donc (la direction) n'aura pas besoin de son quota habituel d'éducateurs". Et comme il est l'un des derniers arrivés…
Notre témoin de Moustier-sur-Sambre "comprend qu'il s'agit d'une situation exceptionnelle", mais il trouve "injuste d'avoir calculé le chômage temporaire par rapport aux heures, on aurait du donner l'allocation complète à tous les chômeurs". Il conclut par cette question: "Les gens d'au-dessus comprennent-ils les travailleurs et les travailleuses?".