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Cindy traverse une période particulièrement angoissante : dans quelques jours, elle devra quitter sa maison de Gilly alors qu’elle n’a, pour le moment, pas trouvé de nouveau logement. Elle a déjà effectué une dizaine de visites de maisons dans le Hainaut, qui se sont toutes soldées par un refus du propriétaire. Motif ? Trop de chiens. En effet, la jeune femme de 36 ans et son mari vivent actuellement en compagnie de 13 canidés. Se séparer d’eux, même en partie, est tout à fait exclu pour le couple. Via le bouton orange Alertez-nous, Cindy pousse un cri du cœur : "C’est nos bébés, on les aime. Aidez-nous ! Si on est expulsés, on sera tous séparés et on ne le supportera pas".
Le couple a déjà confié une cinquantaine de chiots à un refuge, les mâles stérilisés depuis lors
Il y a trois ans Cindy, son mari Anthony et leur dizaine de chiens ont emménagé dans une grande maison avec jardin à Gilly. "Donc tout le monde y a été joyeusement et ils se sont retrouvés avec… 80 chiens", raconte la vétérinaire Marie-Laurence Zadlo en charge des chiens. Le nombre de chiens était tel qu’on ne le connait pas avec exactitude. Cindy parle pour sa part de "plus de 60".
À la maison, la situation était forcément devenue ingérable. Mais Cindy et Anthony ne parvenaient pas à se détacher de leurs animaux. Un jour, ils ont contacté Marie-Laurence Zadlo pour qu’elle vienne soigner un chiot qui s’était fait attaquer par plusieurs autres. Constatant la situation, la vétérinaire a stérilisé les mâles. Puis, elle a mis le couple en contact avec Isabelle Dastrois, responsable du refuge Beaussart. Celle-ci s’est également rendue sur place à l’époque.
"C’était un truc de fou", dit-elle. Mais Isabelle a tissé des liens avec Cindy et Anthony et est parvenue à gagner leur confiance. Le refuge Beaussart a pris en charge "des dizaines et des dizaines de chiots". "Ils ont tous fini par trouver une chouette famille", raconte la responsable. "Le refuge Beaussart est venu nous prendre nos bébés", dit Cindy. Un mal nécessaire, admet-elle. "On ne pouvait pas nourrir 60 chiens, c’était impossible", note-t-elle.
En effet, financièrement, il y a trois ans, les ressources du couple étaient très limitées. Cindy a arrêté de travailler en 2016 et touche depuis un revenu de sa mutuelle parce qu’elle est atteinte de fibromyalgie. Outre le coût de l’alimentation, un tel nombre de chiens posait un problème d’hygiène. "Même pour nettoyer, c’était pas possible", reconnait Cindy.
La vie quotidienne avec 13 chiens, une routine bien huilée pour Cindy
Actuellement, Cindy et Anthony vivent avec 13 chiens : Angels, Pep's, Pimkie, Bella, Brutus, Adriane, Bouboule, Junior, Tcheuky, Mini moy, Duc, Pretty et Papillon. Leur alimentation coûte "maximum 300 euros par mois", indique-t-elle. "Ils ne sont pas difficiles", estime-t-elle. Et la situation financière du couple s’est améliorée depuis qu’Anthony s’est lancé en tant qu’indépendant dans le bâtiment, le ramassage des encombrants et divers travaux.
Un tel cheptel exige beaucoup d’attention, raconte Cindy. Mais il s’agit d’un "rituel" auquel elle s’est habituée depuis trois ans. À 6h30, elle leur donne des "Kelogg’s". Un peu plus tard, elle les fait sortir dans le jardin, puis ramasse leurs crottes. Une fois rentrés, ils se voient offrir "leurs couques". A l’intérieur, ils jouent tandis que Cindy passe l’aspirateur pour garder la maison propre. Le soir, une dernière sortie a lieu, "jamais plus tard que 20h30", pour ne pas déranger le voisinage. Les chiens ne restent jamais seuls, quitte à payer les services d’un "dog sitter", souligne Cindy.
Ils viennent tous sur le lit, près de nous, en dessous des draps
Puis c’est l’heure du coucher. Un moment qui témoigne de la relation fusionnelle du couple avec ses animaux domestiques : comme certains dorment avec leur(s) chat(s), Cindy et Anthony dorment avec leurs chiens. "Moi et mon mari, on se couche et puis ils viennent tous sur le lit, près de nous, en dessous des draps. Ils sont collés", raconte-t-elle.
Un lien affectif très fort avec ses chiens, pour combler une carence ?
Cindy nous l’a répété à maintes reprises : pour elle, ses chiens sont "ses bébés". "Mon psychiatre m’a dit que j’avais reporté l’amour de mes enfants sur mes chiens", confie-t-elle. En effet, Cindy est la mère de deux enfants qu’elle a eus avec son ancien compagnon et qu’elle ne voit plus. "C’était d’abord mon ex qui a récupéré la garde des enfants, il y a six ans. Maintenant, mon ex-mari a frappé sur ma fille et ils se sont repliés chez mon père", raconte-t-elle.
La vétérinaire Marie-Laurence Zadlo estime pour sa part que Cindy et son mari sont atteints du syndrome de Noé : "Ils adorent leurs animaux et ils n’arrivent pas à les donner, à les placer quelque part". La jeune femme explique ainsi sa tendresse pour ses chiens : "On est fort attachés parce qu'à chaque fois qu'on a eu des soucis, eh bien eux sont là, ils ne nous ont pas tourné le dos".
Le propriétaire en colère: l'appartement fortement dégradé, 15 mois de loyer impayés
Cet attachement met Cindy et son mari en grande difficulté. Leur propriétaire a mis fin à leur bail, avançant qu'il voulait vendre son bien. En fait, des litiges avec le couple pourraient expliquer sa décision. Par voie d'huissier, le propriétaire les a informés que leur expulsion est prévue pour le 20 juillet. Selon lui, le couple et ses chiens ont fortement dégradé l'appartement, notamment une nouvelle cuisine équipée installée à peine un an avant leur arrivée. Il estime à 30.000 euros les dégâts occasionnés par Cindy et son mari. Il affirme également que le couple avait 15 mois d'arriérés de loyer. "Ils sont arrivés en 2017, ils suppliaient sur Facebook de les aider. Avec ma femme, on a eu pitié, on s'est fait avoir", regrette le propriétaire qui affirme que Cindy et son mari ont été expulsés d'autres logements auparavant.
Leurs offres de location systématiquement refusées à cause de leurs chiens
Le couple cherche actuellement une maison dans le Hainaut, dans laquelle ils pourraient vivre avec tous leurs chiens. "J'attends de voir les personnes pour leur parler des chiens. Et puis quand on leur dit, c'est 'oh non, non, non, c’est trop'", raconte Cindy. Un seul propriétaire a fait mine d’accepter, mais à condition d'augmenter le prix de 750 à 1200 euros. Dissuasif.
Cindy a conscience d’être dans une impasse. "Je sais très bien qu’avec un nombre de chiens comme ça, on ne peut pas trouver une maison", souffle-t-elle. Néanmoins, la perspective de se séparer d’eux lui est tout à fait insupportable. "C'est des enfants. C'est comme si on me disait ‘maintenant, abandonne tes enfants'", confie-t-elle. "S’il le faut, je me prends une bête caravane, je mets mes chiens dedans, je m’en fous mais mes chiens on ne me les enlève pas", tonne-t-elle.
La vétérinaire Marie-Laurence Zadlo souligne que Cindy et son mari sont "des gens de bonne volonté et honnêtes". Isabelle Dastrois, du refuge Beaussart, évoque aussi leur gentillesse mais tient à rappeler qu'ils ont la possibilité de lui confier ses animaux. "Elle devrait réduire... elle aurait beaucoup plus facile à louer", remarque-t-elle. Actuellement, Cindy et Anthony visitent toujours des maisons avec un loyer mensuel maximum de 750 euros par mois. Ils espèrent trouver un propriétaire plus compréhensif que ceux qu'ils ont rencontrés jusqu'à présent.