Partager:
Les universités belges font face à un afflux d'étudiants français en psychologie déboutés aux portes du master, faisant craindre pour la qualité de l'enseignement au sein de la filière, dénonçaient cette semaine la Fédération des Étudiants francophones (FEF) et la Fédération belge des Psychologues (FBP).
"Je vous écris depuis la fac de psychologie de l'ULB (Université Libre de Bruxelles, NDLR) où la situation est désastreuse : cours annulés, pas de place dans les auditoires, pas assez de profs/stages/mémoires, secrétariats débordés, etc.. ! Bref, depuis l'arrivée massive de Français en Master 1, la faculté (enseignants et étudiants compris) se noie et la qualité de l'enseignement n'est plus là. On aimerait un peu comprendre ce qui a poussé l'université à accepter plus d'étudiants qu'elle ne peut encadrer, et faire réagir les autorités compétentes pour trouver des solutions. Please, help", nous avait écrit dernièrement une étudiante souhaitant rester anonyme.
Si cette rentrée a été particulièrement spectaculaire, le phénomène français se couple à un attrait de la filière en Belgique francophone, nuancent toutefois plusieurs doyens.
218 demandes cette année au lieu de 27 en 2016…
"Les universités françaises ont l'obligation d'offrir une place en master après un bachelier (licence, en France), mais pas nécessairement dans la filière choisie par l'étudiant", explique Laurent Lefebvre, doyen de la Faculté de psychologie de l'Université de Mons.
Ainsi, "certaines universités françaises n'acceptent en master que 10% de leur population de Bac 3", poursuit Arnaud Destrebecqz, doyen de la Faculté de psychologie à l'ULB. Au lieu d'accepter une réorientation après trois ans d'études, certains étudiants français se tournent donc vers la Belgique.
L'UMons a ainsi reçu 218 demandes d'inscription pour son master en psychologie de la part d'étudiants français, contre 27 en 2016. "Environ 30 à 40% des dossiers déposés sont suivis d'une inscription", précise M. Lefebvre, qui explique que les candidats postulent généralement auprès de plusieurs universités.
L'ULiège n'est pas en reste avec 213 demandes reçues et 64 inscriptions effectives cette année, contre une soixantaine en 2016.
Mais c'est l'ULB qui draine le plus de candidats français: sur près de 600 dossiers déposés, "six fois plus qu'il y a deux ans", pointe Arnaud Destrebecqz, environ 450 ont été suivis d'une inscription. Si les critères d'admission dépendent d'une université à l'autre, l'attractivité de la capitale et la bonne connexion des transports avec la France peuvent expliquer ce succès.
Renforcement du personnel, mais...
Face à cet afflux, les doyens des trois facultés ont sollicité l'aide de leur université, qui s'est traduite par la possibilité d'un renforcement du personnel enseignant par quatre équivalents temps plein à l'UMons, deux à l'ULB. Les auditoires n'ont pas dû être dédoublés mais bien certains travaux pratiques.
"Le problème", pointe Etienne Quertement, doyen de la Faculté à l'ULiège, "c'est que nous travaillons à enveloppe fermée. Or, depuis 2011, on observe une croissance constante d'étudiants en psychologie", soit bien avant le boom français.
"Les enseignants sont également chercheurs et, s'ils dispensent plus d'heures de cours, ils disposent en conséquence de moins de temps pour la recherche", poursuit le doyen de l'ULiège, qui pointe un risque à long terme pour le classement mondial des universités belges francophones.