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J'ai toujours eu une très bonne impression avec les produits Fitbit, une entreprise pionnière dans le domaine du suivi de l'activité physique (elle a été fondée en 2007, soit la préhistoire des appareils connectés). L'évolution de ses bracelets et montres a toujours été linéaire, Fitbit améliorant les aspects hardware (batterie, capteurs, écran) et software (application de plus en plus riche dans l'analyse des données récoltées).
Le rachat de Google, finalisé début 2021, a quelque peu changé la donne. J'y voyais plutôt des bons côtés: grâce aux finances infinies du géant américain du web, Fitbit pourrait améliorer son logiciel et son matériel. Mais comme dans tout rachat, il y a des enjeux stratégiques importants. Les deux entreprises n'ont jamais vraiment communiqué sur les synergies envisagées, et il faut lire entre les lignes. La Fitbit Sense 2, nouveau fleuron de la gamme, est un excellent décodeur. J'ai pu tester durant quelques semaines cet appareil vendu 299€ en Belgique.
Un look pratiquement identique
Avant les conclusions, les constats. La Sense 2 ressemble assez bien à la Sense sortie en 2020. Ce fut un pas important pour Fitbit à l'époque, car ce nouveau modèle alliait modernité et fonctionnalités avancées, tout en gardant un gabarit réduit. C'était à mes yeux, à l'époque (voir mon test), la première montre santé. Deux ans plus tard, on garde un format similaire bien qu'ayant perdu 1 mm d'épaisseur (ça se voit sur un poignet) et mêmes quelques grammes. L'écran OLED de 1,58" affiche 336 x 336 pixels bien visibles, sa qualité demeure. A noter: l'arrivée d'un bouton physique sur la gauche, plutôt que la version 'tactile' de la première Sense (c'est une bonne évolution, selon moi) ; et un léger cerclage argenté autour de l'écran. Le petit socle de charge aimanté est parfaitement identique à celui de la version précédente.
Toujours un bon compromis
Bel effort sur l'autonomie, qui selon mes propres mesures durant deux semaines, fut de 7 jours puis de 6 jours, avec quelques activités sportives (mais pas de grosses sorties jogging ou vélo qui sollicitent longtemps le GPS) ; sans l'écran always on (il faut une légère rotation du poignet pour réveiller la montre). Quant aux fonctionnalités d'analyse de la santé et des activités physiques, Fitbit capitalise sur une belle expérience et s'il y a mieux (Garmin notamment) au niveau précision du GPS et suivi sportif avancé, on est face à un compromis intelligent entre performances, autonomie et… encombrement. Car oui, j'ai un poignet relativement étroit, la Sense 2 est donc le format parfait à mes yeux au niveau de la taille, de l'élégance et de la discrétion. Au niveau du suivi du sommeil et du stress, Fitbit est sans doute le plus avancé, même s'il faut un abonnement Premium (9€/mois) pour débloquer les analyses les plus poussées et les "coaching" plus personnalisés, ainsi que la fonction 'score d'aptitude quotidien', qui vous indique si vous êtes prêt pour une grosse séance de sport, ou si ça n'est pas trop le moment.
Rythme cardiaque, taux d'oxygène dans le sang: c'est assez complet (même si l'ECG a disparu, voir plus bas), comme toujours avec Fitbit. Des points d'interrogation demeurent concernant la mesure de l'activité électrodermale (AED) et de la température cutanée. J'ai fouillé tous les menus de l'application avant et après mesure, et je n'ai toujours pas compris à quoi servaient clairement ces mesures (il est question de santé du cœur et de stress, mais rien d'assez précis à mes yeux). Plus de détails dans mon test de la Fitbit Sense 1, car les choses n'ont pas tellement changé en 2 ans… Notez tout de même qu'il y a toujours des approximations dans les traductions françaises, et quelques bugs d'affichage (dont celui, assez étonnant, du nombre de pas quotidien - il manque un chiffre pour faire 3.266):
D'étranges reculs
J'étais donc assez optimiste en ajustant le bracelet confortable en silicone de la Sense 2, pensant voir des améliorations de la Sense 1. J'ai vite déchanté. Certes, FitbitOS a légèrement évolué : on passe de trois écrans de grandes icônes d'applications à un menu vertical avec de petites icônes, tandis que le défilement des écrans rassemblant les données du jour (cœur, stress, sommeil, activité, etc) change un peu. Mais j'ai vite remarqué trois choses:
Le nombre d'applications disponibles sur FitbitOS a drastiquement chuté: il n'y a plus que celles proposées nativement par Fitbit (au revoir Spotify, par exemple) ; et je n'ai même pas réussi à télécharger ECG, l'application "électrocardiogramme" de Fitbit, assez essentielle pour la santé cardiaque, pourtant disponible depuis 2 ans sur la première Sense. Je la vois dans la liste des applications, mais impossible d'appuyer sur le bouton Installer:
Il y a une puce Wi-Fi mais elle n'est plus activée. Impossible de connecter directement la Sense 2 à votre réseau et donc à internet, tout passe par le téléphone. Or il y avait quelques utilités à cette connexion.
Google Assistant a disparu, tandis qu'Alexa, l'assistant d'Amazon, est préinstallé et simple à configurer. Sur la première Sense, on pouvait utiliser facilement l'assistant Google, qui rappelons-le, est la société mère de Fitbit !
La possibilité de répondre au téléphone en main libre, grâce au micro et haut-parleur intégré (qui sont pourtant toujours présents et visibles, voir photos ci-dessous) n'est pas activable !
Que faut-il comprendre ?
A première vue, on n'y comprend pas grand-chose. Certes, des mises à jour futures pourraient faire évoluer les choses ; mais force est de constater que la stratégie de Fitbit (et/ou Google) est assez illisible, avec une Sense 2 qui fait moins bien que le Sense 1. Tandis qu'elles ont chacune un OS différent ; la première du nom étant mieux lotie que la seconde, c'est un comble. Même au niveau du prix de départ, on est perdu: 329€ pour la Sense 1 en 2020, 299€ pour la Sense 2 en 2022.
C'est entre les lignes qu'il faut décrypter la (potentielle) stratégie de Google/Fitbit. Car il y a quelques jours est sortie (pas en Belgique, mais bien en France) la Pixel Watch, la première smartwatch fabriquée par Google, qui tourne sous WearOS (le logiciel de Google que tous les constructeurs peuvent customiser et utiliser). Une première montre intelligente nettement plus complète au niveau logiciel (il y a un vrai 'store' pour télécharger ce qu'on veut), avec une autonomie nettement plus réduite (24h environ, comme Apple), mais qui tente – assez maladroitement d'après ce que j'ai lu – de fusionner le meilleur de Fitbit et de WearOS. Pour résumer: la partie 'santé' et 'sport' reprend toute l'expertise de Fitbit ; Google gère l'interface générale (dont toutes les applis et services Google, dont Assistant et Maps) et le magasin d'applications tierces.
Suite logique: il ne fallait pas que la Sense 2 de Fitbit, sans doute dans les plans avant la finalisation du rachat par Google, fasse trop d'ombre à la Pixel Watch. On l'a donc amputée, selon moi, des fonctions 'smartwatch' pour un faire un bracelet d'activité, de sport et de bien-être très avancé au niveau mesure des données physiologiques, analyse et conseils (le tout allant même plus loin via le fameux abonnement Fitbit Premium à 9€/mois).
Résultat: on se retrouve donc, à mes yeux, avec une Fitbit Sense au rabais, qui n'est pas plus performante que le premier modèle et qui perd même des fonctionnalités importantes. A 299€, c'est cher payé l'incertitude de mises à jour qui pourraient améliorer cette montre qui reste, ceci dit, un des meilleurs outils de mesures et d'analyse de votre santé et de votre activité (grâce à la longue expérience de Fitbit dans le domaine. Mais on a le droit, à tout le moins, de se demander si Google et Fitbit (pour autant que ce dernier ait encore droit au chapitre) savent ce qu'ils sont en train de faire, et si les patrons de Google ont une vision claire du futur des wearbables. A l'heure actuelle, en tout cas, on a l'impression qu'ils se prennent les pieds dans le tapis (ou plutôt dans la robe de mariée qui a scellé le rachat l'an dernier).
Reste à espérer que (1) Google finisse par lancer la Pixel Watch en Belgique, et que (2) celle-ci tienne toutes ses promesses, la première étant de combler l'autonomie faiblarde par plusieurs de fonctionnalités et applications pertinentes sur une smartwatch (ce qu'Apple parvient à faire).
Peu d'applications disponibles (et que des "Fitbit") dans le magasin intégré à l'application
J'ai essayé dans toutes les langues: impossible d'ajouter une ville pour la météo...