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Chiffres à l'appui, le juge d'instruction Michel Claise accuse les autorités de ne pas assez lutter contre la fraude fiscale

Michel Claise était l'invité de Pascal Vrebos ce dimanche sur RTL-TVI. Juge d'instruction spécialisé dans la criminalité financière, il est parfois surnommé le "shérif".

Pascal Vrebos: Si la lutte contre la fraude fiscale était efficace, combien de millions ou de milliards pourrait-on récupérer?

Michel Claise: Excellente question, mais il faudrait d'abord connaître le montant précis de la fraude, qui est par définition dans la clandestinité. Mais nous avons quand même des chiffres alarmants. On parle de 4% à 6% du PIB belge, soit environ 24 milliards.

P. V.: C'est énorme! Donc vous dites que c'est une escroquerie intellectuelle de dire que le combat contre la fraude fiscale est une priorité?

M. C.: Oui, c'est gigantesque. Et la lutte, encore une fois, ça peut rapporter, encore faut-il qu'on se donne les moyens qui y correspondent. Éradiquer complètement? Il ne faut pas rêver. Mais dire qu'on fait tout actuellement pour le faire, c'est un mensonge.

P. V.: Donc on pourrait facilement récupérer 12 ou 13 milliards par an?

M. C.: Facilement? Ça impliquerait peut-être de multiplier par 100 les moyens actuels.

P. V.: Au final, plus vous êtes riche, moins vous payez?

M. C.: Plus vous êtes riche, plus vous avez la possibilité de faire appel à ce qu'on appelle l'ingénierie fiscale, le choix de la voie la moins imposée. La délocalisation fiscale… en toute légalité! Mais alors, la criminalité, c'est autre chose.

P. V.: Il y a des dossiers qui sont classés, combien à peu près par an?

M. C.: Je prendrais une autre approche. La cellule de traitement des informations financières qui communique les soupçons de blanchiment d'argent au parquet de Bruxelles, on constate quand même que 90% des dossiers ne sont pas examinés. Un chiffre qui vient de la cellule elle-même.

P. V.: C'est soufflant.

M. C.: Oui, alors que nous cherchons à boucler des budgets. Quand on voit la distance entre le budget qui nous manque et le montant de la fraude estimée de l'évasion fiscale, comment cela se fait-il qu'on n'en fasse pas de ce combat une priorité absolue? Et ça ne date pas de ce gouvernement-ci, ça fait quand même depuis la nuit des temps.

P. V.: Pourquoi les gouvernements qui se suivent n'ont pas efficacement lutté contre cette fraude?

M. C.: J'aimerais que cette question leur soit posée. Mais je me demande s'il n'y a pas un problème de compréhension, car c'est difficile et complexe. Peut-être y a-t-il un côté… "C'est trop complexe". Peut-être y a-t-il aussi, de la part des gouvernements, cette idée que ce n'est pas si mauvais que ça que de l'argent sale se mélange à de l'argent propre.

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