Antoinette Spaak est décédée ce vendredi soir à l'âge de 92 ans. Née le 27 juin 1928 à Bruxelles dans un milieu laïque, elle était une figure du FDF, le Front démocratique des francophones, renommé DéFI en 2015. "Antoinette Spaak vient de nous quitter. DéFI, mais surtout l'histoire politique de notre pays, perdent une très grande dame. Elle incarnait au plus haut point la politique dans le sens noble du terme, entre fermeté des convictions et élégance dans le combat", a déclaré François De Smet, président de DéFI.
Olivier Maingain, député fédéral DéFI, a réagi à cette disparition au micro de RTL INFO.
Diplômée en philosophie et lettres de l'ULB, elle se lance en politique après la mort de son père Paul-Henri Spaak en 1972, sous la bannière du FDF qu'il avait rejoint à la fin de sa vie. En 1974, elle est élue à la Chambre. Trois ans plus tard, elle prend la direction du FDF et devient ainsi la première femme à présider un parti politique en Belgique. Elle participe à la négociation du Pacte d'Egmont, vaste projet d'accord institutionnel que fera capoter le premier ministre de l'époque, Leo Tindemans.
Antoinette Spaak en 1979 lors d'un meeting du FDF
La lente pacification communautaire et l'affirmation progressive de Bruxelles comme une Région font décliner le FDF qui ne parvient plus à renouer avec ses succès des années 1970. En 1995, les amarantes décident de s'unir aux libéraux dirigés alors par Jean Gol. Antoinette Spaak est l'une des chevilles ouvrières de ce qui deviendra la fédération PRL-FDF, précurseur du MR. Le "projet francophone" porté par les deux formations se fracassera en 2011 sur l'accord trouvé pour scinder l'arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde.
Antoinette Spaak et Jean Gol en 1994
La figure politique a également été députée bruxelloise, députée européenne et a présidé le Parlement de la Communauté française de 1988 à 1992.
En 2007, alors que s'amorce une longue crise communautaire, Antoinette Spaak préside avec l'ex-président du PS, Philippe Busquin, le groupe Wallonie-Bruxelles chargé de réfléchir à l'avenir de l'espace francophone et la façon d'articuler la Communauté française avec les Régions wallonne et bruxelloise. En 2009, elle est élue au parlement bruxellois. Il lui revient de présider la séance d'installation en tant que doyenne de l'assemblée. L'image restera célèbre: la féministe convaincue est flanquée de l'une des benjamines de l'assemblée, la députée Mahinur Ozdemir, musulmane portant le voile. Antoinette Spaak cède sa place quelques mois plus tard.
Antoinette Spaak et Mahinur Ozdemir en 2009
Le temps passant, ses apparitions se font plus rares. Elle accordera encore l'un ou l'autre entretien, commentera parfois l'actualité. En 2016, elle s'émeut ainsi d'un gouvernement fédéral où seulement 23% des francophones sont représentés, exprime son opposition aux partisans d'un enseignement régionalisé ou s'affirme en faveur de la république.
Antoinette Spaak est la fille de Paul-Henri Spaak, ancien Premier ministre belge, président de l'Assemblée générale des Nations Unies, secrétaire général de l'OTAN et l'un des pères de l'Union européenne.
Paul Henri Spaak en 1957 durant son mandat de secrétaire général de l'OTAN
Petite-fille du dramaturge Paul Spaak, directeur du théâtre royal de la Monnaie, nièce de l'écrivain Claude Spaak, et du scénariste Charles Spaak, cousine de la comédienne Catherine Spaak, Antoinette Spaak était également passionnée par la culture.
Elle a formé dans la vie un couple à la fois discret et célèbre avec le vicomte Etienne Davignon, qui fut le jeune chef de cabinet de son père. Malgré une histoire longue de quelques décennies, les deux amants ne se sont jamais mariés.
Elle a marqué les esprits de ceux qui l'ont croisée par une détermination teintée d'élégance, et sa loyauté y compris à l'égard de ses adversaires politiques. Celle-ci s'est muée en amitié à l'égard de certains d'entre eux, parmi lesquels l'ex-Premier ministre CVP Wilfried Martens. Antoinette Spaak a reçu le titre de ministre d'Etat en 1983.
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