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La première route solaire au monde a été inaugurée jeudi en Normandie par la ministre de l'Environnement Ségolène Royal, une technologie qu'elle espère étendre largement en France et à l'étranger, malgré des critiques sur son coût et son efficacité.
Ce prototype en phase test promeut le concept de routes "à énergie positive", des surfaces routières ayant la particularité de transformer le rayonnement solaire en énergie.
La ministre a officiellement raccordé au réseau électrique le premier kilomètre de ce prototype constitué de cellules photovoltaïques encapsulées dans une résine et collé sur la chaussée à Tourouvre dans l'Orne. Les 2.000 automobilistes qui empruntent en moyenne chaque jour la RD5 pour sortir de la ville vont donc désormais rouler pendant un kilomètre sur 2.800 m2 de dalles photovoltaïques aux allures de carrelage plastifié.
Selon les initiateurs de ce projet baptisé "Wattway", co-inventé par Colas et le CEA Tech, la route solaire normande doit produire l'équivalent de l'éclairage public d'une ville de 5.000 habitants. Les cellules photovoltaïques sont elles fabriquées par la Scop SNA, à Tourouvre.
L'ensemble des travaux est couvert par une subvention d'Etat de 5 millions d'euros hors taxe.
"C'est un prototype qui commence à intéresser au niveau international", a observé la ministre, interrogée au téléphone par l'AFP, relevant que les Chinois, les Africains, et les Marocains, ont marqué leur intérêt en visitant le stand dédié à cette technologie lors de la COP22 à Marrakech.
Beaucoup trop cher?
Si le concept de route solaire présente de nombreux avantages, notamment celui d'utiliser, pour produire de l'électricité, des chaussées qui ne sont en moyenne occupées par les voitures que 20% du temps, selon Colas, des critiques se font néanmoins entendre.
Interrogé par l'AFP, Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER), se dit ainsi "interrogatif". "On a un prototype à environ 17 euros par watt, alors qu'on arrive à 1 euro par watt pour des centrales (photovoltaïques, NDLR) au sol. La question est donc de savoir quel est le potentiel de réduction de ce coût", a-t-il expliqué.
Le représentant de la principale organisation professionnelle du secteur s'interroge aussi sur la quantité d'énergie produite en conditions réelles. "Les panneaux photovoltaïques sont en position horizontale, ce qui n'est pas l'inclinaison optimale", remarque-t-il, ajoutant que le passage de véhicules "diminue la production d'énergie".
Enfin, la durée de vie du produit, beaucoup plus sollicité qu'un panneau sur une toiture, pose aussi question, selon lui. Pas de quoi décourager le volontarisme de la ministre, qui a lancé au public en partant "Bonne route!".
Des projets similaires existent déjà
Si la route solaire ornaise est une première mondiale, au nord d'Amsterdam, une piste cyclable solaire de 70 m est en service depuis deux ans, sur une voie où passent quelques 2.000 vélos par jour. Si le revêtement a mal résisté au premier hiver, le problème a été résolu depuis.
L'Allemagne est aussi sur les rangs, et projette une route test de 150 m près de Cologne. Aux Etats-Unis, le Missouri travaille à l'installation d'environ 19 m2 sur un trottoir.