Accueil Actu

A un an de la présidentielle, Hollande menacé par une implosion de la gauche

A quatorze mois de l'élection présidentielle en France, la majorité socialiste au pouvoir est menacée d'implosion après la publication d'une tribune au vitriol de personnalités de gauche contre la politique gouvernementale, un climat qui fait douter de la capacité du président François Hollande à se représenter.

"Trop c'est trop !": dans une violente charge publiée mercredi par le quotidien Le Monde, l'ex-patronne du parti socialiste Martine Aubry, fille de Jacques Delors, et d'autres personnalités de poids - telles l'eurodéputé Daniel Cohn-Bendit - taillent en pièces la politique menée par le président et son Premier ministre Manuel Valls.

"C'est quelque chose de lourd et d'inédit", souligne Frédéric Dabi, de l'institut de sondages Ifop. "A un an d'une élection présidentielle, on n'avait pas vu sous les quinquennats précédents une protestation aussi forte d'un camp du parti majoritaire".

Les signataires de cette tribune aux airs de réquisitoire dénoncent pêle-mêle les allègements de charges en faveur des entreprises - "41 milliards d'euros mobilisés pour rien" -, le "désolant débat sur la déchéance de nationalité" des Français coupables d'actes de terrorisme ou encore "l'indécent discours" de M. Valls sur les réfugiés.

"Ce n'est plus simplement l'échec du quinquennat qui se profile, mais un affaiblissement durable de la France qui se prépare, et bien évidemment de la gauche", assènent les auteurs en accusant le gouvernement de "saper" les "principes et fondements" du socialisme.

A l'exception d'un ou deux ministres, montés défendre le gouvernement, l'offensive a été accueillie par un profond silence. Le président Hollande, en voyage en Amérique latine, n'a pas réagi et Manuel Valls a attendu 24 heures pour le faire.

"Il n’y a pas un début de proposition", a rétorqué jeudi Le Premier ministre pour qui "revenir en arrière serait non seulement dommageable pour le président et pour moi, mais aussi pour le pays".

- Une majorité socialiste 'en miettes' -

Le malaise couve depuis des mois entre la gauche et le tandem tantôt décrit comme "réformiste" ou "social-libéral" incarné par François Hollande et Manuel Valls, à la tête du gouvernement depuis mars 2014.

La plupart des ministres représentant l'aile gauche du PS ont quitté le gouvernement, la dernière en date étant la ministre de la Justice Christiane Taubira, qui a démissionné fin janvier pour s'opposer au projet de déchéance de nationalité. Et ceux que l'on surnomme souvent les "frondeurs", comme l'ancien ministre de l'Economie Arnaud Montebourg, n'ont jamais ménagé leurs critiques face au virage "libéral" du gouvernement depuis l'entrée en fonction de Manuel Valls.

Mais cette fois, "ce n'est pas une pique de plus (...) c'est une vraie crise", estime Frédéric Dabi. "La violence du texte correspond à la violence du désaccord", abonde le politologue Thomas Guénolé.

Pour la plupart des analystes, c'est le dernier projet de loi du gouvernement - une réforme du marché du travail - qui a mis le "feu aux poudres".

"Voilà qu'on s'en prend au code du travail !", s'exclament les auteurs de la tribune. "Qui peut faire croire qu'augmenter le temps de travail va diminuer le chômage ?", alors que la gauche, Martine Aubry en tête, plaide traditionnellement pour l'inverse, avec notamment, en 2000, l'instauration de la semaine de 35 heures.

Outre la fille de Jacques Delors, à la personnalité influente, "des intellectuels de gauche de référence comme (le sociologue Michel) Wieworka" et une des personnalités écologistes les plus populaires de France, Daniel Cohn Bendit, ont signé le texte, relève Thomas Guénolé.

"Une rupture aussi profonde" avec des "personnalités aussi majeures (...), c'est grave pour François Hollande", estime-t-il.

"Une forme de divorce est bel et bien consommée entre Hollande et sa gauche, y compris socialiste", estimait jeudi le journal communiste L'Humanité.

Avec une majorité "en miettes", la "question qui se pose, c'est quid de François Hollande comme candidat du parti socialiste en 2017 ?", interroge Frédéric Dabi.

À la une

Sélectionné pour vous