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La farine d'insectes, va-t-elle se retrouver petit à petit dans tous nos produits alimentaires ? C'est l'inquiétude de Patrick qui y est fortement allergique. Les acteurs du secteur lèvent le voile sur ce qui ressemble à une fake news.
Tout part d'un mail "interpellant" reçu par Patrick. Envoyé par une connaissance, ce mail rapporte que "les gens mangeront désormais des insectes sans le savoir". L'Union européenne aurait accepté, dans le plus grand secret, la présence de grillons dans nos aliments.
"C'est une amie qui connait mes problèmes d'allergies et qui m'a envoyé ça. Le document dit ceci : 'La Commission a autorisé l'ajout de grillons domestiques dans les produits de boulangerie, les pâtes et autres produits finis partiels destinés à la population générale'", explique Patrick. Seule l'inscription latine "Acheta domesticus" serait obligatoire sur les paquets.
Si Patrick est inquiet, c'est parce qu'il est "très allergique aux acariens". Or, la consommation d'insectes peut provoquer des réactions chez les personnes déjà allergiques aux crustacés, aux mollusques ou aux acariens. "Si je mange ça à petites doses toute l'année, qu'est-ce que ça va me faire ?", s'inquiète-t-il.
La farine d'insectes ne sera pas un substitut à une autre farine
En réalité, l'autorisation d'utiliser de la farine d'insectes n'est pas neuve. Cela fait même plusieurs années qu'elle est en vigueur. Géraldine Goffard en sait quelque chose. Cela fait depuis 2014 qu'elle s'est lancée avec sa sœur dans la production de pâtes faites à base d'un mélange de farines de blé et d'insectes. "On utilise la farine d’insectes mélangée à une autre farine pour en faire des pâtes. On a de la farine à base de vers de farine ou de grillons. C’est vrai qu’on utilise le mot ‘farine’, mais la farine d’insectes ne sera pas un substitut à la farine de céréale. Ce n’est pas une farine qui est panifiable (dont on peut se servir pour la préparation du pain, ndlr)", précise la co-fondatrice de Goffard Sisters.
Les deux sœurs sont fières de travailler avec ce produit et le revendiquent même sur l'emballage. Bien loin de l'inscription latine que mentionnait le mail de Patrick. "Dans notre façon de procéder, c'est sûr qu'on va mettre l'insecte en avant. C'est clairement indiqué. À l'arrière, sur toutes les mentions légales, chaque producteur est tenu de respecter une législation de l'étiquetage."
Cette législation impose d'inscrire les noms des ingrédients dans la langue nationale du pays et de mettre les allergènes en évidence (en gras, par exemple). "Personne ne mangera d’insectes à son insu. C’est clairement indiqué sur le paquet. Il est noté en gras dans la liste des ingrédients, car il fait partie des allergènes", assure Géraldine.
Jusqu'à 50 fois plus cher
Alors, est-ce que l'on va réellement retrouver de la farine d'insectes partout dans notre alimentation, comme le sous-entend le mail reçu par Patrick ? "Ça serait assez étonnant, parce que ça coûte assez cher", tempère Vinciane Charlier, porte-parole du SPF Santé Publique. "La farine à base d’insectes coûte beaucoup plus cher qu’une farine normale. Si on l’utilise, c’est vraiment à des fins spécifiques."
Selon Géraldine Goffard, les farines d'insectes coûtent entre 10 et 50 fois plus cher que la farine de blé.
Des risques pour la santé ?
D'un point de vue sanitaire, cette farine particulière n'a rien à se reprocher. Les nouveaux aliments mis sur le marché sont soumis à des études approfondies menées par des organes indépendants, tant au niveau belge qu'européen. "On s'assure que les aliments qui sont mis sur le marché, sont sûr pour la santé et ne comptent pas de risques pour les citoyens", précise encore Vinciane Charlier.
Dans le cas de Goffard Sisters, des contrôles ont lieu trois à quatre fois par an.
Quels insectes ?
Selon le SPF Santé Publique, l'Union européenne autorise trois insectes différents pour produire de la farine : les vers de farine, les grillons domestiques et les criquets migrateurs. "Toute personne qui met un produit sur le marché est obligée d'afficher tous les ingrédients de ce produit sur l'étiquette. Le nom de l'insecte doit être écrit distinctement", conclut Vinciane Charlier.
Si Patrick et les autres personnes allergiques ne sont donc pas très exposés à cette farine et peuvent facilement l'éviter, les curieux ne risquent rien à s'y essayer.