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Il y a quelques jours, Thomas commande une paire de lunettes sur le site Alensa.be. Une fois la commande passée, il tape la référence de sa paire dans un moteur de recherche. C’est là qu’il tombe sur la version néerlandophone du site Alensa.be sur laquelle la même paire de lunettes est proposée avec cette fois 25% de réduction. Le père de famille crie à la discrimination linguistique, mais le site ne veut faire aucun geste commercial. Est-ce légal de proposer une promotion différente uniquement selon la langue choisie?
Thomas nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous pour nous raconter sa mésaventure. Il a besoin de nouvelles lunettes.... après quelques recherches sur Internet, son choix se tourne vers le site Alensa.be, connu pour être l’un des sites où les lunettes sont les moins chères. Il choisit sa paire, ses verres et passe sa commande.
Quelques heures plus tard, il décide de taper la référence des lunettes dans Google: "Je voulais vérifier que j’avais bien commandé la paire la moins chère possible", dit-il. C’est là qu’il tombe sur la version néerlandophone du site : "C’est exactement la même version que la version francophone, si ce n’est la langue sélectionnée." Sur cette version néerlandophone, la paire de lunettes choisie par Thomas est proposée avec 25% de réduction. "Franchement, j’étais choqué, alors j’ai décidé de leur écrire un mail pour réclamer la réduction", explique le père de famille.
Pourquoi ceux qui parlent néerlandais auraient-ils droit à une réduction et les autres non?
Alors que Thomas s’attend à être remboursé par le site, la réponse de la société va le surprendre. "Ils m’ont dit que j’étais un menteur et que la paire choisie était au même prix sur la version francophone et néerlandophone. Heureusement que j’avais fait des captures d’écran." Pourtant, même avec les captures d’écran, la marque ne veut pas faire de geste. Celle-ci affirme à Thomas qu’il s’agissait d’une offre temporaire et qu’ils ne peuvent donc rien faire. "Ils parlent d’offre temporaire alors que ce n’est pas le cas. Quand je me rends sur le site, l’offre est toujours visible", prétend notre interlocuteur.
Thomas a également effectué une recherche de lunettes pour ses enfants. "J’ai eu le même cas avec les lunettes pour mes enfants. Elles sont moins chères sur la version néerlandophone, donc on a commandé sur celle-ci. Mais ce n’est pas normal ! Pourquoi ceux qui parlent néerlandais auraient-ils droit à une réduction et les autres non ?", se demande-t-il.
Légal ou illégal?
Les explications du site sont assez floues. D’ailleurs, le service après-vente n’est proposé qu’en néerlandais, pas facile donc pour un francophone de se faire comprendre : "J'avais l’impression de lire des mails traduits par Google Traduction", explique Thomas.
Nous avons contacté Alensa par mail. La société affirme que les sites francophone et néerlandophone sont deux entités distinctes : "Alensa se réserve le droit de modifier les prix de ses produits selon les fluctuations du marché, la compétition, les demandes du fabricant, etc." Pourtant, il s’agit bien de la même adresse Internet : Alensa.be. La seule chose qui change étant la langue choisie.
La différence de prix est quand même importante
À l’heure actuelle, le prix a été modifié, la paire est proposée à 88,90 euros, peu importe la langue choisie. Mais Thomas, lui, n’a toujours pas reçu de compensation : "88,90 euros à la place de 58,65 euros, la différence est quand même importante", estime le père de famille. Mais alors, est-ce légal de proposer des tarifs différents selon la langue choisie sur un site ?
Étienne Mignolet, porte-parole du SPF Economie, explique qu’il y a plusieurs éléments à prendre en compte : "Un même article peut être vendu à des prix différents si le canal de vente est différent." Par exemple, une robe d’une même enseigne peut être vendue 50 euros sur le site et 80 euros en magasin. Comme il s’agit de deux canaux de ventes différents, cela ne pose pas de soucis. La véritable question est donc de savoir si le site possède deux canaux de vente distincts, l’un francophone et l’autre néerlandophone. C’est ce qu’affirme l’enseigne : "Nous vous informons que ces deux sites sont différents."
Que dit Testachats?
Testachats confirme qu’une entreprise peut pratiquer des prix et des remises différents selon les points de ventes, cependant pour eux, il s’agit tout de même d’une discrimination directe fondée sur la langue : "Un client francophone d’Anderlecht n’a pas le même accès aux produits proposés qu’un client néerlandophone de la même commune", indique Julie Frère, porte-parole de l'organisation de consommateurs.
Selon Testachats, rien n’oblige Alensa à proposer une version francophone du site, mais s’ils le font alors "il s’agit d’une discrimination illégale que de pratiquer des prix plus élevés sur cette version." De plus, cela s’apparente également à une "pratique commerciale trompeuse". Julie Frère développe: "L’existence d’une promotion est en fait cachée à un client francophone qui n’ira jamais sur la version néerlandophone du site et donc ne bénéficiera pas d’une réduction à laquelle il a droit."
L'association des consommateurs conclut que cette différenciation de prix entre un client francophone et un client néerlandophone est donc discriminatoire et trompeuse.