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Lorsque Yousra Aberike se rend chez son médecin traitant habituel mardi matin, elle est loin d’imaginer ce qu’elle s’apprête à vivre. A peine est-elle entrée dans le cabinet qu’il vérifie, à cinq reprises, sa carte d’identité… et se rend qu’elle n’est pas vaccinée. "Suite à ce contrôle d’identité, il se tourne vers moi de manière assez mécontente. Et il me dit ‘Vous n’êtes pas vacciné ? Expliquez-moi ? Pourquoi vous n’êtes pas vacciné ?’ La réaction qui suit m’a assez surprise dans la mesure où il a reculé de sa chaise, il s’est levé, il a été vers la porte et m’a dit ‘Maintenant, vous sortez. La confiance entre nous, moi et le patient, s’est rompue. Vous n’êtes plus ma patiente, vous sortez. Allez voir un autre médecin’", raconte la patiente.
La jeune femme tente de dialoguer, sans succès. Elle quitte le cabinet sans rendez-vous et sans ordonnance. Le médecin en question, Johan Vansintejan, assume complètement : "Absolument, si je ne me sens pas en sécurité, j’estime avoir le droit de refuser des patients. C’est aussi pour la sécurité de mes autres patients, qui sont dans la salle d’attente, certains très malades, il ne faudrait pas qu’ils soient à nouveau contaminés", se justifie-t-il.
Il ne permettra pas, à ceux qui ne sont pas vaccinés, de côtoyer dans sa salle d’attente d’autres patients. "Il peut ne pas être malade mais quand même porteur du virus. Et le transmettre à d’autres malades dont l’immunité est parfois très faible", poursuit-il. Le médecin dit prendre toutes les précautions : "Je porte le masque, il y a un écran, j’ai des gants. Entre chaque patient, je désinfecte tout : les chaises, la table, la porte."
Avant, il prenait quatre patients par heure. Il n’en voit plus que trois pour avoir le temps de désinfecter le cabinet entre chaque visite. Sur son site internet, le docteur Vansintejan prévient d’ailleurs qu’il ne recevra pas les personnes qui refusent de se faire vacciner. Pour lui, il n’y a pas de violation du serment d’Hippocrate. "Je les dirige vers d’autres confrères", dit-il simplement.
Peut-on dès lors refuser un patient qui ne veut pas se faire vacciner ? Selon le Président du Conseil National de l’Ordre des Médecins, cette pratique est à la limite de la déontologie. "Un médecin ne peut pas, comme ça, stigmatiser un patient en disant ‘je ne vous prends pas par principe, parce que vous n’êtes pas vacciné’. Il est possible que dans le cas d’espèce, lorsque l’autorité disciplinaire a examiné la question, qu’elle décide que le médecin a manqué à la dignité de la profession", indique Benoît Dejemeppe.
Avocate, Yousra compte déposer plainte. Le médecin pourrait ainsi être poursuivi par son ordre.