Partager:
L'ex-Première ministre pro-européenne Maia Sandu, qui a remporté la présidentielle en Moldavie, a promis lundi "un vrai équilibre" dans les relations entre l'Occident et la Russie après la reconnaissance de sa défaite par son rival prorusse.
"Nous allons construire un vrai équilibre dans la politique étrangère" moldave et un "dialogue pragmatique avec tous les pays", notamment l'Union européenne, les Etats-Unis et la Russie, a déclaré la candidate victorieuse.
L'arrivée au pouvoir de Maia Sandu marque un revers pour la Russie, soucieuse de préserver son influence sur cette ex-république soviétique et dont l'armée est déployée en Transdniestrie, un territoire pro-russe ayant fait sécession de la Moldavie.
"La Russie a perdu la Moldavie" qui balançait depuis des années entre ambitions européennes et rapprochement avec Moscou, a commenté auprès de l'AFP Konstantin Kalatchev, un expert indépendant russe.
"Tout n'est pas perdu" pour Moscou, nuance-t-il toutefois: Mme Sandu, dont les pouvoirs sont limités, n'a pas de majorité loyale au parlement et de probables législatives anticipées pourraient déboucher sur la nomination d'un Premier ministre prorusse.
Après avoir appelé la semaine dernière ses partisans à descendre dans les rues pour "protéger" sa victoire, le président sortant pro-russe Igor Dodon a fini par reconnaître sa défaite.
Il a félicité sa rivale et appelé ses partisans au calme, alors que la Moldavie est habituée aux contestations post-électorales.
Peu après, Vladimir Poutine a félicité Maia Sandu et dit souhaiter un "développement constructif des relations entre nos pays", selon un communiqué du Kremlin.
- Faire avancer les réformes -
Confrontée cette année à des mouvements de protestation au Bélarus et au Kirghizstan, dans ce qu'elle considère être sa zone d'influence, la Russie soutenait ouvertement le président sortant.
Maia Sandu, 48 ans, a fait campagne sur la lutte contre la corruption et obtenu 57,75% des suffrages contre 42,25% pour son rival, lui-même visé par des accusations de corruption ayant émaillé son mandat de quatre ans.
"Je veux qu'on arrête d'associer la Moldavie avec la pauvreté, la corruption et l'émigration", a déclaré Mme Sandu. "Les Moldaves veulent avoir un Etat qui ne les vole pas et ne protège pas les voleurs".
Les observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, qui ont supervisé l'élection l'ont reconnue lors d'une conférence de presse lundi comme démocratique et libre, malgré certaines problèmes constatés.
Amputée d'une partie de son territoire avec la perte de la Transdniestrie, la Moldavie, 3,5 millions d'habitants, est un des pays les plus pauvres d'Europe et jusqu'à 40% de sa population a émigré à l'étranger à la recherche de meilleures conditions de vie.
Coincée entre l'Ukraine pro-occidentale et la Roumanie, membre de l'Union européenne, le pays a été secoué en 2015 par un énorme scandale de corruption avec la disparition d'un milliard de dollars - l'équivalent de 15% du PIB - des caisses de trois banques.
Les présidents ukrainien Volodymyr Zelensky et roumain Klaus Iohannis, dont le pays a des liens historiques et une langue commune avec Chisinau, ont eux aussi félicité Maia Sandu, première femme à accéder à la présidence en Moldavie.
Le président du Conseil européen Charles Michel a lui estimé que les Moldaves avaient "choisi clairement une voie qui privilégie la justice, la vraie lutte contre la corruption et une société plus juste".
Mme Sandu, considérée comme personne intègre et incorruptible, "va faire avancer les réformes" et pourra "défendre les intérêts nationaux en dialoguant avec la Russie", a estimé auprès de l'AFP le directeur exécutif de l'Institut de la politique européenne et des réformes à Chisinau, Iulian Groza.
Economiste de formation, elle a travaillé pour la Banque mondiale à Chisinau de 1998 à 2005, puis à Washington de 2010 à 2012. Avant un bref passage comme Première ministre en 2019, elle avait également dirigé le ministère de l'Education.
Mme Sandu avait créé la surprise en arrivant en tête du premier tour grâce au soutien inédit de la diaspora, soutien répété au second puisque l'opposante a obtenu plus de 92% des suffrages chez les Moldaves de l'étranger.