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Les évêques catholiques ont débuté mardi à Lourdes leur réunion bisannuelle largement consacrée au rapport Sauvé sur la pédocriminalité dans l'Église, pressés par des victimes d'agressions sexuelles de reconnaître la responsabilité de l'institution.
Pendant sept jours, les quelque 120 prélats consacreront près de la moitié de leurs travaux à la lutte contre les violences et les agressions sexuelles sur mineur dénoncées dans ce rapport publié le 5 octobre.
Ils ont été accueillis par le président de la Conférence des évêques (CEF), Mgr Eric de Moulins-Beaufort qui "a évoqué la question de la responsabilité" de l’Église, "une question centrale qui nous est posée par le rapport Sauvé" et qui sera "au coeur de notre réflexion tout au long de la semaine", selon Luc Crepy, évêque de Versailles.
"Lors de la dernière assemblée des évêques en mars, il y a déjà eu une affirmation très forte de cette responsabilité de l'Église, des évêques", a poursuivi Mgr Crepy, en conférence de presse, précisant : "Je pense qu'au terme de cette semaine, nous irons plus loin.
Eric de Moulins-Beaufort a aussi "souligné ce qui anime les évêques: il y a une immense attente, de la part des personnes victimes, de beaucoup de fidèles", a-t-il ajouté.
Les chiffres du rapport sont effrayants. Depuis 1950, quelque 216.000 personnes de plus de 18 ans ont fait l'objet de violences ou d'agressions sexuelles, quand elles étaient mineures, de la part de clercs (prêtres ou diacres) ou de religieux et religieuses. La commission estime par ailleurs à environ 3.000 le nombre de prédateurs impliqués en 70 ans.
Après s'être réunis à huis clos mardi matin pour commencer à examiner le rapport Sauvé, les évêques ont reçu dans l'après-midi cinq victimes, également à huis clos.
- "Beaucoup de colère" -
Si quelques victimes avaient été invitées, seules ces cinq personnes ont fait le déplacement à Lourdes. Aucun des collectifs et associations qui représentent les victimes ne participe à la réunion, regrettant que le rapport Sauvé ne soit pas le sujet unique de l'assemblée.
Agressé sexuellement il y a 45 ans, Jean-Luc Souveton, prêtre à Saint-Etienne, a indiqué à l'AFP avoir demandé aux évêques "que soit reconnue et officiellement prononcée la responsabilité de l’Église".
"L’Église peut en sortir grandie si elle accepte avec humilité la remise en cause à laquelle nous confronte ce travail-là", a-t-il dit.
Selon ce prêtre de 60 ans, cette reconnaissance implique notamment "des réparations et une réforme" en profondeur du fonctionnement de l'institution.
Pour Véronique Garnier, une autre victime présente à Lourdes, "le pouvoir des prêtres ne doit plus être considéré comme sacré". "Il n'y a pas d'abus sexuels sans abus de pouvoir" et "l'excès de pouvoir sacré pour les prêtres ouvre la voie" a ces abus, a-t-elle déclaré à l'AFP mardi soir.
Mme Garnier a également tenu à souligner "l'écoute respectueuse" des évêques à l'égard des victimes. "J'ai pu dire ce que j'avais dans le coeur et canaliser ma colère, car j'ai beaucoup de colère", a-t-elle expliqué.
- Indemnisation -
Les questions de "responsabilité" de l’Église mais aussi du dispositif financier permettant de verser, à l'avenir, une contribution aux victimes, seront à l'étude pendant cette conférence, et même parmi "les priorités" de cette rencontre, selon l'épiscopat.
Après une semaine de travaux, plusieurs sujets - dont on ignore encore la teneur - seront soumis au vote des évêques lors de la clôture, le 8 novembre.
Parmi ses 45 recommandations, la commission Sauvé a proposé de reconnaître la responsabilité civile et sociale de l'Église "indépendamment de toute faute personnelle de ses responsables".
Elle préconise aussi d'individualiser le calcul de l'indemnisation due à chaque personne victime en fonction des "préjudices subis".
Pour financer le fonds d'indemnisation, la commission écarte la piste d'un appel aux dons des fidèles, préconisant de financer les indemnités versées aux victimes "à partir du patrimoine des agresseurs et de l'Église de France".