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Les clés de la Maison Blanche: vice-président, un métier dans l'ombre et pourtant si essentiel

Le 5 novembre prochain, les Américains ont rendez-vous avec leur avenir politique alors qu'ils éliront leur 47e président. Pour mieux appréhender les enjeux de cette élection présidentielle majeure, des experts des États-Unis nous éclairent sur les enjeux de ce scrutin. Nous sommes là pour vous donner les clés de la Maison Blanche.

Ils sont souvent dans l'ombre, et pourtant, ont une importance capitale : aujourd'hui, nous allons nous pencher sur le rôle des vice-présidents. Pour nous éclairer sur le sujet, Serge Jaumain, professeur d'histoire à l'ULB et grand spécialiste des États-Unis. Tout d'abord, il explique comment ce rôle est né et comment il a évolué. 

"Avec le premier président des États-Unis, on avait un système un peu particulier. C'est-à-dire que le vice-président, c'était celui qui arrivait en deuxième lieu. Et puis, on s'est rendu compte que ça posait problème parce que généralement, c'étaient des personnes très opposées. Imaginez aujourd'hui que vous auriez Donald Trump président et Joe Biden comme vice-président, ou l'inverse. Donc, c'est à partir de 1804 qu'on s'est dit : 'Il vaut mieux faire des tickets'. Et puis, la particularité, c'est effectivement que le vice-président, c'est quelqu'un qui n'est rien du tout et qui du jour au lendemain est tout, finalement. (...) On a toute une série d'exemples où des vice-présidents ont repris la présidence, souvent parce que le président est mort. (...) Mais il faut savoir que dans un premier temps, le vice-président ne vivait même pas à Washington, c'était la personne de recours au cas où le président viendrait à mourir. Et ce n'est que très progressivement, à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, que l'on a commencé à associer beaucoup plus le vice-président au pouvoir".

Mais quelles sont les tâches que doit accomplir un vice-président ? Eh bien, cela dépend souvent de ce que demande le président, explique Serge Jaumain. "Le vice-président dépend entièrement des tâches données par le président. C'est donc une alchimie entre les deux qui est particulière et souvent difficile à réaliser, parce que généralement, le ticket est organisé de manière à avoir quelqu'un de totalement différent du président. L'idée, c'est d'aller chercher des voix. Ainsi, quand on regarde Obama et Joe Biden, voilà deux personnalités extrêmement différentes. Mais ils se sont alliés parce qu'Obama était la personne jeune d'ascendance africaine, tandis que Joe Biden était beaucoup plus traditionnel et conservateur, ce qui créait un bon équilibre. Donc, on voit qu'on a souvent eu cette approche pour aller chercher des voix".

Un rôle qui a évolué

Comme le précise Serge Jaumain, l'importance du rôle d'un vice-président dépend souvent de son entente avec le président, ainsi que de l'actualité. "Depuis la Seconde Guerre mondiale, ce rôle a pris de l'ampleur, mais cela a vraiment dépendu des présidents. On se rappelle, par exemple, de Bill Clinton avec Al Gore. Al Gore a été un vice-président extrêmement important à qui l'on a immédiatement confié toute une série de fonctions, parce que les deux s'entendaient bien et ont pu travailler ainsi. On a aussi l'exemple de George W. Bush et Dick Cheney, surtout après le 11 septembre, où l'on s'est dit : 'Il faut vraiment avoir deux personnalités fortes pour gérer, au cas où l'un d'eux serait assassiné'. Il y avait beaucoup de crainte à ce moment-là. Et Dick Cheney était véritablement le bras droit de George W. Bush. Donc, cela dépend totalement d'un président à l'autre".

Face à ces tâches importantes que peut remplir le vice-président, cette fonction est-elle un tremplin pour la présidence ? Selon Serge Jaumain, c'est en effet le cas. Il prend notamment l'exemple de Joe Biden.

"(...) Ça peut être un tremplin, mais pas nécessairement. Alors, c'est effectivement une manière de se faire connaître. Il y a par exemple Nixon, qui était un ancien vice-président. Lui n'est pas devenu président directement, mais plus tard. Donc, c'est une façon d'être connu du public, mais rien n'est garanti de ce point de vue-là", explique-t-il.

Le spécialiste explique également comment Joe Biden n'a, pour l'instant, pas réellement mis en lumière sa vice-présidente. "Ces quatre dernières années, beaucoup de personnes pensaient que Kamala Harris serait mise en avant par Joe Biden. Or, il ne l'a pas du tout fait. Il a occupé toute la scène, lui a confié quelques dossiers. Mais globalement, elle est restée dans l'ombre et n'est pas très populaire aujourd'hui. C'est un vrai problème".

Dans l'éventualité où Donald Trump serait élu Président des États-Unis, qui pourrait être son ou sa vice-président(e) ? Selon Serge Jaumain, Nikki Haley représente la candidate parfaite.

"Et quand on regarde de l'extérieur, logiquement, on pourrait se dire que Nikki Haley a le profil idéal. Elle s'est opposée à lui, mais elle pourrait reconstruire le parti. Même si Donald Trump a été très critique envers elle, pendant un moment, elle s'est tenue à distance. Elle a récemment déclaré qu'elle allait voter pour Donald Trump, ce qui marque un changement par rapport à son discours précédent. Mais Donald Trump, lui, a laissé entendre que ce serait impensable qu'elle devienne sa vice-présidente. Cependant, avec lui, tout est possible. (...) Elle aurait un profil idéal, car c'est une femme, elle s'est opposée à Donald Trump et elle pourrait ramener une partie de son électorat vers lui".

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