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Un vote des parents avaient lieu ce jeudi soir : le vote a été serré, mais les résultats sont là. L'école Emile Zola de Saint-Ouen, située en Seine-Saint-Denis, va déménager, polluée par les points de deal avoisinants.
Les parents de l'école maternelle Emile Zola, située à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), votaient jeudi sur l'éventuel déménagement de quelques classes de l'établissement, situé en plein milieu d'un quartier miné par le trafic de stupéfiants. Ils étaient appelés à voter jusqu'à 18H00. Les résultats ont été communiqués : 100 personnes ont voté pour, contre 97 contre.
L'annexe de l'école maternelle, qui regroupe quatre classes et 60 élèves, est située dans le passage Elizabeth à Saint-Ouen, à 300 mètres du périphérique. Des cris enjoués d'enfants s'échappent de la cour de récréation, invisible depuis le passage.
Le mur qui ceint l'école est surmonté de hauts grillages et recouverts de street art. Sont également écrits à la bombe de peinture "Arago" et "24/24" soit les horaires d'ouverture supposés du point de deal. "On observe les files des gens qui viennent acheter des stupéfiants, les enfants s'interrogent. C'est vrai qu'on a l'impression que l'école est enclavée au milieu du trafic de drogue qui laisse place à l'insécurité", témoigne Sarah Diallo, responsable des achats de 42 ans, accompagnés de ses deux enfants en petite et grande section.
"Les parents d'élèves ont tiré la sonnette d'alarme, il faut y répondre", ajoute-t-elle, se disant favorable au déplacement des classes. Les avis ne sont pas unanimes. "Comment une commune peut déménager une école à cause d'individus qu'on doit combattre ensemble ? Si on ferme l'école, ça devient quoi demain ?", se demande Yahya Diarrassouba, 51 ans, qui vient chercher à l'école son fils scolarisé en petite section.
"On fuit le problème, on déplace le problème. Qu'est-ce qui est le plus important ? C'est l'avenir de nos enfants", insiste le père de famille qui a voté contre le déplacement de l'école. Organisée par la municipalité, la votation citoyenne intervient après le jet en janvier d'une bonbonne de protoxyde d'azote dans une fenêtre de l'école. Et depuis mai 2024, des petits sachets de drogue ont déjà été retrouvés trois fois dans la cour de récréation, selon préfecture de police de Paris.
"L'attention des services de police sur le secteur est réelle et soutenue", affirme la préfecture, relevant que depuis le 1er janvier, 29 personnes ont été interpellées dans cette zone pour trafic de stupéfiants et 2 kg de produits ont été saisis.
"Dernier signe d'un service public"
"Que font les dealers quand ils se font courser? Ils balancent leurs sachets un peu partout", déplore le maire PS Karim Bouamrane. L'édile rappelle que sa "responsabilité est de mettre les moyens pour apporter la sécurité et pour les enfants, et pour les parents".
Les quatre classes concernées pourraient être transférées à quelques centaines de mètres, dans les locaux du relais petite enfance et au sein d'un groupe scolaire. Les parents d'élèves peuvent opter pour cette "solution transitoire" dès le retour des vacances de printemps et jusqu'à la fin de l'année scolaire, ou attendre une relocalisation pérenne prévue pour la rentrée de septembre.
Jeudi matin sur France 2, la ministre de l'Education nationale Elisabeth Borne a martelé que "l'école ne reculera jamais face à la violence". "On en a parlé avec Bruno Retailleau (ministre de l'Intérieur, ndlr). Évidemment, le gouvernement est déterminé à rétablir un environnement sûr pour cette école" même si "des classes peuvent déménager provisoirement".
"Notre objectif, c'est que l'école puisse se réinstaller", a souligné Mme Borne. Pour cela, il faudra "des travaux de sécurisation, mais surtout un travail pour rétablir un environnement sûr".
De son côté, le député Insoumis Eric Coquerel a estimé que "l'école, à cet endroit-là, était le dernier signe d'un service public, d'une vie citoyenne.(...) L'école fermant, ça veut vraiment dire que vous laissez place nette au trafic". Face aux critiques, le maire de Saint-Ouen assure qu'en cas de déménagement, "une association culturelle d'adultes s'installera (dans ces locaux), donc il n'y aura pas de recul du service public". "Tous les mètres carrés seront occupés par la puissance publique", assure Karim Bouamrane.